La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2002 | FRANCE | N°99-16654

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 septembre 2002, 99-16654


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, pris en leurs diverses branches, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 mai 1999), que la société Promoval, dirigée par M. X..., dont l'objet social était la promotion, la réalisation et éventuellement l'exploitation d'un terrain de golf et de ses aménagements, a conclu deux baux emphytéotiques, d'une durée de quarante ans chacun, l'un avec la ville de Marseille, prévoyant un loyer annu

el de 200 francs, l'autre avec la SCI Les Romans de la Salette (la SCI), dirigé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, pris en leurs diverses branches, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 mai 1999), que la société Promoval, dirigée par M. X..., dont l'objet social était la promotion, la réalisation et éventuellement l'exploitation d'un terrain de golf et de ses aménagements, a conclu deux baux emphytéotiques, d'une durée de quarante ans chacun, l'un avec la ville de Marseille, prévoyant un loyer annuel de 200 francs, l'autre avec la SCI Les Romans de la Salette (la SCI), dirigée par la mère de M. X..., prévoyant un loyer annuel de 420 000 francs ; que les baux imposaient à l'emphytéote la réalisation des travaux d'aménagement du golf, les améliorations de toute nature devant revenir aux bailleurs en fin de bail ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Promoval, le tribunal a étendu cette procédure à la SCI et a reporté la date de cessation des paiements au 21 octobre 1995 ; que la cour d'appel, retenant la confusion des patrimoines des deux sociétés, a confirmé cette décision et dit que par suite de la liquidation judiciaire de la

société Promoval prononcée le 27 octobre 1997, la SCI se trouvait elle-même en liquidation ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / qu'un flux financier entre deux sociétés ne peut présenter un caractère anormal, révélateur d'une confusion de patrimoines, que s'il est dépourvu de contrepartie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à relever, pour considérer qu'il existait un flux financier anormal entre la société Promoval et la SCI, que ces deux sociétés avaient le même dirigeant, que le loyer que lui devait la société Promoval au titre du bail emphytéotique était "fort élevé", et qu'elle lui avait délégué les loyers qui lui étaient versés par la société du Golf de Marseille afin de les affecter au paiement du loyer du bail emphytéotique ; qu'en se prononçant par ces seuls motifs, dont il ne résulte pas que le loyer du bail emphytéotique serait dépourvu de contrepartie, la cour d'appel, qui a elle-même constaté qu'elle ne disposait pas d'éléments de comparaison pour évaluer le loyer de ce bail, n'a pas caractérisé la confusion de patrimoines entre ces deux sociétés et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / qu'en énonçant que le loyer que lui versait la société Promoval était anormalement élevé, même par rapport à un bail de droit commun, sans rechercher si, comme elle le faisait valoir dans ses conclusions d'appel, il n'était pas conforme aux prix pratiqués sur les terrains nus dans le onzième arrondissement de Marseille dans les zones concernées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

3 / qu'en retenant, pour décider que le loyer élevé que lui versait la société Promoval constituait un flux financier anormal entre les deux sociétés, que le terrain qu'elle allait récupérer, aménagé en terrain de golf de treize trous sur dix huit, serait indispensable à l'exploitation du surplus de la superficie, et donc valorisable à sa valeur d'usage, sans rechercher si le fait que ce terrain ne pouvait avoir d'autre destination que celle de complément au terrain voisin ne diminuait pas considérablement sa valeur, aucun autre acquéreur n'étant susceptible de se monter intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

4 / qu'en tout état de cause, la cour d'appel a elle-même constaté qu'elle était créancière au 31 mai 1996 d'une somme de 840 000 francs au titre des loyers du bail emphytéotique, conclu en 1987 ;

qu'il en résulte qu'en réalité la société Promoval ne payait pas la totalité des loyers prévus ; qu'en se fondant sur le seul montant du loyer stipulé dans le contrat de bail pour retenir l'existence d'un flux financier anormal entre les deux sociétés, sans rechercher quel était le montant des sommes réellement versées par la société Promoval à la SCI, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

5 / que dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir que la créance du Crédit agricole correspondait à quatre factures cédées par la société APS par bordereaux Dailly, et que la créance de ce fournisseur avait été réglée par la société Canal de Provence, qui avait passé avec la société Promoval des conventions lui imposant notamment le paiement des factures des fournisseurs ; qu'en laissant ce moyen sans réponse, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la société Promoval avait financé plus de 35 000 000 de francs de travaux, dont près de 19 000 000 de francs restaient impayés, la cour d'appel a constaté que cette société avait donné à bail commercial l'ensemble de ses droits découlant des baux emphytéotiques à une autre société dirigée par M. X... puis, après que celle-ci eut donné son fonds en location-gérance, qu'elle avait délégué l'ensemble des loyers dus par le locataire gérant à la SCI, créancière d'une somme de 840 000 francs au titre de l'emphytéose ; que la cour d'appel a ensuite retenu que le coût des travaux ne pouvait justifier la différence exorbitante des loyers stipulés, le loyer prévu en faveur de la SCI, qu'elle a qualifié, dans son pouvoir souverain d'appréciation, de fort élevé au regard d'un bail de droit commun, ne tenant pas compte de l'avantage que représentait la récupération en fin de bail d'un terrain de golf engazonné pourvu de treize trous sur dix huit, indispensable à l'exploitation du surplus de la superficie aménagée et valorisable à sa valeur d'usage, malgré son état d'enclave ; qu'elle a enfin relevé que la société Promoval s'était progressivement dépouillée de l'essentiel de ses droits et ressources au profit de la SCI de sorte qu'elle ne pouvait plus faire face à ses charges, autres que locatives, et au remboursement de ses dettes à court terme ;

qu'elle en a déduit qu'instrument dès l'origine de l'enrichissement de la SCI et de la famille de ses dirigeants, la société Promoval avait sciemment transféré une part des ressources indispensables à sa survie à la SCI au détriment de ses créanciers ; que par ces motifs caractérisant des flux financiers anormaux constitutifs de la confusion des patrimoines, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer les recherches visées aux deuxième, troisième et quatrième branches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à la simple allégation non assortie d'une offre de preuve que comportaient les conclusions prétendument délaissées ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X..., ès qualités de liquidateur amiable de la SCI Les Romans de la Salette, aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 99-16654
Date de la décision : 17/09/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre civile A), 06 mai 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 sep. 2002, pourvoi n°99-16654


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:99.16654
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award