La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2002 | FRANCE | N°01-83510

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 septembre 2002, 01-83510


REJET du pourvoi formé par X... Laurence, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 23 mars 2001, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de blessures involontaires, a, sur renvoi après cassation, prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591, 592 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la cour d'appel d'Amiens était composée lo

rs des débats du 10 novembre 2000 de : "Président : M. Velly ; Conseillers : M. Alibert...

REJET du pourvoi formé par X... Laurence, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 23 mars 2001, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de blessures involontaires, a, sur renvoi après cassation, prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591, 592 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la cour d'appel d'Amiens était composée lors des débats du 10 novembre 2000 de : "Président : M. Velly ; Conseillers : M. Alibert, M. Laurent ; Ministère public : M. Dray ; Greffier : Mme Solomé" ;

Et lors du prononcé de l'arrêt à l'audience du 23 mars 2001 faisant suite à trois prorogations du délibéré : les 12 janvier 2001, 2 février et 2 mars 2001 de : " Président : M. Velly ; Conseillers :

M. Ducrotte et M. Laurent, assistés de Mme Solomé, greffier, en présence du ministère public " :

" alors que tout jugement ou arrêt doit établir la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu ; qu'aux termes de l'article 592 du Code de procédure pénale, les arrêts et jugements rendus en dernier ressort sont déclarés nuls lorsqu'ils ne sont pas rendus par le nombre de juges prescrits ou qu'ils ont été rendus par des juges qui n'ont pas assisté à toutes les audiences de la cause ; que l'arrêt attaqué qui mentionne deux compositions différentes de la cour d'appel, l'une lors des débats, l'autre lors du prononcé, sans indiquer qu'il a été fait application, pour la lecture de la décision, des dispositions de l'article 485, dernier alinéa, du Code de procédure pénale, ni mentionner une reprise des débats, ne met pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la régularité de la juridiction ayant statué " ;

Attendu que les mentions de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les mêmes magistrats ont participé aux débats et au délibéré et que l'arrêt a été lu par l'un d'eux, en application de l'article 485 du Code de procédure pénale ;

Que, dès lors, le moyen manque en fait ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1891 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Laurence X... responsable des conséquences civiles de l'accident dont Catherine Y..., épouse Z..., a été victime, sur le fondement de l'article 1891 du Code civil et l'a condamnée à titre provisionnel à payer à cette dernière une indemnité de 1 000 000 de francs ;

" aux motifs que la loi du 10 juillet 2000 a renforcé les conditions d'application des articles 222-19 et 121-3 du Code pénal ; la situation des faits évoquée par l'expert ne correspond pas à l'application de ces textes "dès lors que Laurence X... avait pris soin de rencontrer Catherine Z... pour lui donner quelques renseignements indispensables sur Cybèle et pour la prévenir des manières idéales pour l'amadouer..." ; que, l'article 1891 du Code civil édicte que lorsque la chose prêtée a des défauts tels qu'elle puisse causer des préjudices à celui qui s'en sert, le prêteur est responsable s'il connaissait les défauts et n'en a pas averti l'emprunteur ; que dans son rapport d'expertise, du 24 juillet 1995, le professeur Chary estime que Catherine Z... n'avait pas un niveau équestre qui lui permettait de pratiquer l'équitation autrement que sur des chevaux adaptés, calmes et dociles et dans le cadre d'exercices surveillés et dirigés par un enseignant dûment habilité, alors que Cybèle ne présentait pas les caractéristiques requises pour être montée par une telle cavalière, surtout livrée à elle-même ; malheureusement, l'inconscience a conduit par un processus dramatique, mais prévisible pour un professionnel, à la catastrophe connue ; l'expert relève encore le fond calme de Cybèle, mais sa notoire craintivité qui peut la faire réagir brutalement et de façon imprévisible et non maîtrisable si un facteur extérieur inhabituel vient l'inquiéter ; il s'agit encore d'un cheval insuffisamment entraîné et à peine dressé, donc d'une docilité très aléatoire ; à titre d'utilisatrice de Cybèle depuis de longs mois, Laurence X... ne pouvait ignorer les défauts décrits par l'expert et en avertir, de manière particulièrement précise, Catherine Z... ; à ce titre, cette dernière n'avait pas été informée de la chute vécue quelques semaines auparavant par Laurence X..., alors que, cette information apparaissait comme essentielle pour l'emprunteuse ; Catherine Z... ne pouvait déceler les défauts de Cybèle, son vice n'étant pas apparent et rien ne peut être reproché à la victime au titre de ses obligations d'emprunteur ;

" alors que, d'une part, les défauts de la chose prêtée au sens de l'article 1891 du Code civil, c'est-à-dire "tels qu'elle puisse causer du préjudice à celui qui s'en sert", et engager la responsabilité du prêteur, qui n'en aurait pas averti l'emprunteur, s'entend d'un défaut inhérent et intrinsèque de ladite chose ; que la circonstance qu'une cavalière, qui a fait une chute à cheval, ne présentait pas les aptitudes requises pour monter cet animal, ne saurait caractériser un défaut de celui-ci au sens du texte précité ;

" alors que, d'autre part, faute d'avoir établi l'existence d'un défaut de l'animal par rapport à un autre animal "normal" et sans un tel défaut, et en se bornant à reprocher à la prêteuse d'avoir connaissance des défauts du cheval "tels que décrits par l'expert", la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

" alors que, de troisième part, la contradiction de motifs équivaut à une absence totale de motifs ; qu'en énonçant que la prêteuse avait pris soin de prévenir l'emprunteuse de la manière idéale pour amadouer le cheval, de sorte qu'elle ne pouvait se voir reprocher la violation d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité ou d'avoir commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elle ne pouvait ignorer, et en reprochant en même temps à la prêteuse de n'avoir pas averti l'emprunteuse de "manière particulièrement précise" des défauts de l'animal, la cour d'appel a privé sa décision des motifs propres à la justifier " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Catherine Y..., qui montait une jument que lui avait prêtée Laurence X..., a perdu la maîtrise de l'animal qui, après être parti au galop, s'est brusquement arrêté et l'a projetée contre une clôture ; que, victime de blessures ayant entraîné plus de trois mois d'incapacité totale de travail, Catherine Y... s'est constituée partie civile dans les poursuites exercées contre Laurence X... du chef de blessures involontaires ; que, renvoyant Laurence X... des fins de la poursuite, le tribunal correctionnel a en outre débouté la partie civile de la demande de réparation qu'elle avait formulée en application de l'article 470-1 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, pour réformer le jugement sur ce point et déclarer Laurence X... entièrement responsable, en application de l'article 1891 du Code civil, des conséquences dommageables de l'accident, la cour d'appel énonce que, sachant, pour avoir elle-même été victime d'une chute, que l'animal, insuffisamment dressé et entraîné, était craintif et pouvait avoir des réactions brutales et imprévisibles, la prévenue n'en a pas averti Catherine Y... lorsqu'elle le lui a prêté, alors que ces défauts n'étaient pas apparents ;

Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, procédant de l'appréciation souveraine des juges du fond, qui ne contredisent aucunement les motifs par lesquels, constatant que l'usage de l'animal avait été transféré à la victime, ils ont écarté l'application des articles 1382 et 1385 du Code civil, l'arrêt est légalement justifié ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-83510
Date de la décision : 17/09/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Fondement - Infraction - Homicide ou blessures involontaires - Application des règles de droit civil - Conditions - Relaxe - Application de l'article 1891 du Code civil - Possibilité.

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Relaxe - Application des règles de droit civil - Conditions - Application de l'article 1891 du Code civil - Possibilité

Par application de l'article 470-1 du Code de procédure pénale, la juridiction répressive peut, après avoir relaxé le prévenu du chef du délit de blessures involontaires, retenir sa responsabilité sur le fondement de l'article 1891 du Code civil. Dès lors, justifie sa décision la cour d'appel qui, en application de ces textes, après avoir relaxé la prévenue du chef de blessures involontaires, la déclare responsable des conséquences dommageables de l'accident causé par la jument qu'elle avait prêtée à la victime sans l'avertir des défauts non apparents de l'animal, qu'elle connaissait. (1)(1).


Références :

Code civil 1891 Code de procédure pénale 470-1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens (chambre correctionnelle), 23 mars 2001

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1993-03-03, Bulletin criminel 1993, n° 97, p. 233 (rejet) ; Chambre criminelle, 1996-03-20, Bulletin criminel 1996, n° 119, p. 349 (rejet) ; Chambre criminelle, 1999-09-28, Bulletin criminel 1999, n° 198, p. 624 (cassation partielle). CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1997-10-01, Bulletin criminel 1997, n° 316, p. 1053 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 sep. 2002, pourvoi n°01-83510, Bull. crim. criminel 2002 N° 165 p. 609
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2002 N° 165 p. 609

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: M. Blondet.
Avocat(s) : M. Odent, la SCP Peignot et Garreau, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.83510
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award