LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris, 24 avril 2001) que M. X... a été désigné en octobre 1988 délégué syndical au sein de la société Main Sécurité ; que le contrat de travail du salarié a été repris à compter du 13 septembre 2000 par la société Lancry ; que celle-ci a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annulation de la désignation, le 4 janvier 2001, de M. X... en qualité de délégué syndical central par la Fédération du commerce de la distribution et des services CGT, en faisant valoir que, dans une entreprise comprenant moins de 2000 salariés, le délégué syndical central ne peut être choisi que parmi les délégués syndicaux d'établissement, et que M. X... n'avait pas cette qualité ;
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la société Lancry de sa demande tendant à obtenir l'annulation de la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical central d'entreprise, alors, selon le moyen :
1 / que les salariés ayant des fonctions de représentants du personnel en application d'un usage et en l'absence d'accord collectif ne sauraient bénéficier de la protection légale ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations du jugement attaqué dans l'exposé des faits et des prétentions des parties que la société Lancry avait expressément soutenu "que l'existence d'un délégué syndical d'établissement ne résulte que d'un usage, valable en tant que tel au sein seul de l'entreprise Main Sécurité précédemment adjudicataire du marché et que par conséquent les salariés désignés dans ces conditions n'ont pas le statut légal de délégués syndicaux et sont exclus du champ d'application de l'article 4 de l'accord du 18 octobre 1995 aux termes duquel le salarié titulaire d'un mandat attaché au site conserve son mandat après autorisation de son transfert auprès de l'administration compétente" ; que dès lors qu'il n'a jamais été contesté que le site de Cruas-Meysse était un chantier regroupant de façon constante et depuis l'origine bien moins de 50 salariés, et que les fonctions occupées par le salarié résultaient uniquement d'un usage, à l'exclusion de tout accord collectif, ce moyen était de nature à justifier la demande de la société Lancry tendant à obtenir l'annulation de la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical central d'entreprise ; qu'en s'abstenant néanmoins d'y répondre, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'à supposer que le tribunal d'instance aurait implicitement mais nécessairement jugé que le fait que le salarié avait des fonctions de représentant du personnel en application d'un usage et en l'absence d'accord collectif, lui permettait néanmoins de se prévaloir d'un mandat de délégué syndical et du statut attaché à un tel mandat, il a alors violé les articles L. 421-11, L. 425-1 et L. 436-1 du Code du travail ;
3 / que l'accord susvisé du 18 octobre 1995 prévoit expressément en son article 3.2 que "les usages ou autres transferts individuels ou collectifs au sein de l'entreprise sortante ne sont pas transférés" ; qu'il suffit de se reporter à cet article, pour constater que cette disposition est générale, et vise bien l'ensemble des usages ou autres avantages individuels ou collectifs ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal d'instance a violé l'article 3.2 de l'accord du 18 octobre 1995, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
4 / que s'il résulte de l'article 4 de l'accord du 18 octobre 1995 qu'après autorisation de son transfert demandé par l'entreprise sortante à l'administration compétente, le "titulaire d'un mandat attaqué au site" "conserve son mandat jusqu'à son terme", ce texte précise encore que "les modalités du mandat sont celles résultant de l'application de la réglementation en vigueur" ; qu'ainsi, pour être conservé, le mandat en litige doit avoir vocation à subsister ou à être transféré en application de la réglementation en vigueur ; qu'en l'espèce, il n'a jamais été contesté que les dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail n'étaient pas applicables, mais aussi que les mandats de M. X... attachés au site de Cruas-Meysse résultaient uniquement d'un usage, à l'exclusion de tout accord conventionnel, et n'avaient pas vocation à exister en l'absence de cet usage, ce site étant un chantier regroupant de façon constante et depuis l'origne bien moins de 50 salariés ; qu'en ne recherchant pas si dès lors, les dispositions de l'article 4 de l'accord du 18 octobre 1995 ne pouvaient pas s'appliquer en l'espèce, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de cet article, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que le tribunal d'instance a relevé que le contrat de travail de M. X... avait été transféré à la société Lancry aux conditions de l'accord collectif du 15 octobre 1995, lequel accord, s'appliquant aux personnels rattachés à la convention collective nationale des entreprises de sécurité et de prévention, précise notamment les condtions de reprise s'imposant à l'entreprise entrante et prévoit en son article 4 que le titulaire d'un mandat attaché au site conserve son mandat jusqu'à son terme ; qu'ayant constaté que le contrat de travail du salarié se poursuivait sur le site, le tribunal d'instance, après avoir à bon droit énoncé qu'en vertu de l'accord l'intéressé restait titulaire du mandat de délégué syndical, a exactement décidé qu'en cette qualité il pouvait être désigné délégué syndical central, dès lors que sa désignation en 1988 au sein de la société Main n'avait pas été contestée et était purgée de tout vice ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille deux.