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10/07/2002 | FRANCE | N°00-42340

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2002, 00-42340


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 14 décembre 1994 en qualité d'attaché à la direction générale chargé des achats et de la supervision des fonctions de production des usines par la société Nodet-Gougis ; que, le 11 juillet 1995, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan de continuation de la société dont le redressement judiciaire avait été ouvert le 4 février 1987 et a ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire ;

que le plan de cession de l'entreprise à la société Khun, prévoyant des licenciem...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 14 décembre 1994 en qualité d'attaché à la direction générale chargé des achats et de la supervision des fonctions de production des usines par la société Nodet-Gougis ; que, le 11 juillet 1995, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan de continuation de la société dont le redressement judiciaire avait été ouvert le 4 février 1987 et a ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire ; que le plan de cession de l'entreprise à la société Khun, prévoyant des licenciements pour motif économique, a été arrêté le 21 janvier 1996 ; que M. X... a été licencié le 7 mars 1996 pour motif économique par l'administrateur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour avoir paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, non-respect de la procédure de licenciement et licenciement abusif; qu'après son décès son action a été reprise par ses ayants droit ;

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branche :

Attendu que les ayants droits de M. X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation du préjudice moral de leur auteur, alors, selon le moyen :

1 / que les dispositions de l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985 constituent des règles dérogatoires au droit commun du licenciement économique qui ne sauraient être écartées au profit de l'application de l'article L. 321-4-1 du Code du travail ; qu'en considérant qu'un salarié licencié à l'occasion d'un plan social ne pouvait se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article 63 précité dans la mesure où son licenciement est intervenu en respect de ses droits au terme de la procédure de licenciement économique prévu par l'article L. 321-4-1 du Code du travail, la cour d'appel, qui a décidé d'office que les règles du licenciement économique devaient prévaloir sur les dispositions de la loi du 25 janvier 1985, a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 122-14-2 et L. 321-1 du Code du travail que la lettre de licenciement pour motif économique doit préciser la raison économique qui fonde le licenciement et sa conséquence sur l'emploi ; qu'il ne peut être dérogé à cette exigence, en cas de redressement judiciaire, qu'à la condition que la lettre de licenciement, notifiée dans le délai d'un mois après le jugement, vise expressément le jugement du tribunal de commerce ayant autorisé les licenciements économiques ; qu'en l'espèce, en décidant que la lettre de licenciement, notifiée après expiration du délai prescrit par l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985 et qui visait uniquement comme motif du licenciement l'arrêt du plan de cession à la société Khun, répondait aux exigences légales de motivation, la cour d'appel a violé les articles L. 122-12-2 et L. 321-1 du Code du travail et 63 de la loi du 25 janvier 1985 ;

3 / que si, dans le délai d'un mois après le jugement, les licenciements interviennent "sur simple notification", de l'administrateur judiciaire, le licenciement économique intervenant après expiration de ce délai doit être prononcé conformément aux règles de droit commun gouvernant la motivation de la lettre de licenciement, laquelle doit alors préciser la raison économique qui fonde le licenciement et sa conséquence sur l'emploi ; qu'en constatant que le licenciement de M. X... avait été prononcé après l'expiration du délai prescrit par l'article 63 de la loi du 25 Janvier 1985 et en décidant néanmoins que la lettre de licenciement qui visait uniquement comme motif l'arrêt du plan de redressement de la société Nodet-Gougis par voie de cession à la société Khun répondait aux exigence légales de motivation, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui, abstraction faite des motifs critiqués par la deuxième branche du moyen qui sont surabondants, d'une part, a constaté que le plan de redressement par cession de l'entreprise avait prévu le licenciement pour motif économique de soixante-douze salariés et qui, d'autre part, a fait ressortir que l'emploi occupé par l'intéressé avait été supprimé, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, ensuite, que la lettre de licenciement, qui énonce que la rupture du contrat de travail du salarié "se place dans le cadre d'un licenciement collectif pour motif économique dont les causes sont les suivantes : arrêt du plan de redressement de la société Nodet-Gougis par voie de cession à la société Khun", se référant ainsi au jugement qui a arrêté le plan de redressement et prévu des licenciements pour motif économique, satisfait aux exigences légales de motivation ;

D'où il suit que les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen ne peuvent être accueillies ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 621-64, alinéa 2, du Code de commerce ;

Attendu qu'en vertu de ce texte, les licenciements pour motif économique prévus par le plan de continuation ou de cession de l'entreprise en redressement judiciaire doivent intervenir dans le délai d'un mois après le jugement sur simple notification de l'administrateur ;

Attendu qu'après avoir décidé que le licenciement de M. X... avait une cause économique, l'arrêt retient, pour débouter les ayants droit du salarié de leur demande de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, que leur auteur a été licencié plus d'un mois après le jugement du tribunal de commerce autorisant les licenciements et qu'il ne pouvait plus être utilisé la procédure prévue à l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985 devenu l'article L. 621-64 du Code de commerce ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la méconnaissance par l'administrateur judiciaire du délai prévu par le texte précité pour notifier aux salariés concernés la rupture de leur contrat de travail constitue une irrégularité de forme du licenciement de nature à causer un préjudice aux intéressés qui peuvent en demander réparation, la cour d'appel a violé ledit texte ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les consorts X... de leur demande de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 28 février 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne les défendeurs aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-42340
Date de la décision : 10/07/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Licenciement collectif - Entreprise en difficulté - Plan de redressement - Plan de cession - Licenciement par l'administrateur judiciaire - Notification - Délai - Inobservation - Sanction.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Licenciement collectif - Entreprise en difficulté - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Plan de cession - Licenciement par l'administrateur judiciaire - Obligations de l'administrateur judiciaire - Etendue.

1° En vertu de l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-64 du Code de commerce, les licenciements pour motif économique prévus par le plan de continuation ou de cession de l'entreprise en redressement judiciaire doivent intervenir dans le délai d'un mois après le jugement sur simple notification de l'administrateur. Il résulte de ce texte que la méconnaissance par l'administrateur judiciaire du délai qu'il prévoit pour notifier aux salariés la rupture de leur contrat de travail constitue une irrégularité de forme du licenciement de nature à causer un préjudice aux intéressés qui peuvent en demander réparation.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Formalités légales - Lettre de licenciement - Contenu - Mention des motifs du licenciement - Motif précis - Définition.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Plan - Jugement l'arrêtant - Licenciement - Lettre de licenciement - Motivation - Référence au jugement arrêtant le plan - Portée.

2° Satisfait aux exigences légales de motivation la lettre de licenciement qui mentionne que la rupture du contrat de travail du salarié se place dans le cadre d'un licenciement collectif pour motif économique dont elle précise les causes, qui se réfèrent au jugement ayant arrêté un plan de redressement par voie de cession.


Références :

1° :
1° :
Code de commerce L621-64 al. 2
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 63

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 février 2000

A RAPPROCHER : (2°). Chambre sociale, 1998-11-18, Bulletin 1998, V, n° 500, p. 373 (rejet) ;

Chambre sociale, 1999-10-05, Bulletin 1999, V, n° 367, p. 270 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2002, pourvoi n°00-42340, Bull. civ. 2002 V N° 242 p. 237
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 242 p. 237

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos .
Avocat général : M. Fréchède.
Rapporteur ?: M. Chagny.
Avocat(s) : la SCP Defrenois et Levis.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.42340
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