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18/06/2002 | FRANCE | N°00-13774

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 juin 2002, 00-13774


Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 27 octobre 1999), que, par jugement du 4 juin 1998, le tribunal correctionnel de Pau a déclaré M. X... coupable d'importation, de transport et de détention non autorisés de stupéfiants, l'a condamné à une peine d'emprisonnement et, statuant sur l'action douanière, l'a condamné au paiement d'une amende et a fixé la contrainte par corps conformément à la loi ; que l'administration des Douanes a délivré à M. X..., le 15 juillet 1998, alors qu'il était incarcéré à la Maison d'arrêt de Pau

pour exécuter la peine d'emprisonnement, un commandement de payer la so...

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 27 octobre 1999), que, par jugement du 4 juin 1998, le tribunal correctionnel de Pau a déclaré M. X... coupable d'importation, de transport et de détention non autorisés de stupéfiants, l'a condamné à une peine d'emprisonnement et, statuant sur l'action douanière, l'a condamné au paiement d'une amende et a fixé la contrainte par corps conformément à la loi ; que l'administration des Douanes a délivré à M. X..., le 15 juillet 1998, alors qu'il était incarcéré à la Maison d'arrêt de Pau pour exécuter la peine d'emprisonnement, un commandement de payer la somme de 2 400 000 francs, puis a déposé une réquisition d'incarcération entre les mains du procureur de la République, notifiée au condamné le 8 septembre 1998 ; qu'exécutant cette contrainte par corps depuis le 22 septembre 1998, M. X... a, le 12 novembre 1998, assigné en référé l'administration des Douanes aux fins d'en obtenir la mainlevée ;
Attendu que l'administration des Douanes fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné la mainlevée de la contrainte par corps, alors, selon le moyen :
1° qu'aux termes de l'article 5.2 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce n'est que lorsqu'une personne est arrêtée qu'elle doit être informée dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que de surcroît le droit à l'information garanti par l'article 5.2 précité ne s'étend pas aux voies de recours permettant de contester la légalité de la privation de liberté ; qu'enfin le texte de l'article 5.2 n'impose aucune forme particulière pour la communication des renseignements exigés ; qu'en l'espèce M. X... était un justiciable, déjà arrêté et accusé, condamné et incarcéré ; qu'en estimant pour ordonner la mainlevée de la contrainte par corps que ni le commandement ni la réquisition ne portent mention de ce que le condamné a été informé dans une langue qu'il comprend de la voie de recours qui lui était ouverte, la cour d'appel a violé l'article 5.2 de la Convention ;
2° que l'article 5.4 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit le droit d'intenter une procédure tendant à faire contrôler par un tribunal le respect des conditions de légalité d'une privation de liberté ; qu'en l'espèce, il est constant que M. X... a pu saisir un tribunal pour voir statuer sur la régularité de sa détention ; qu'en ordonnant la mainlevée de la contrainte par corps motifs pris de ce que ni le commandement ni la réquisition ne portent mention de ce que le condamné a été informé dans une langue qu'il comprend de la voie de recours qui lui était ouverte, la cour d'appel a violé l'article 5.4 de la Convention ;
Mais attendu que le terme " arrestation ", au sens de l'article 5.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, doit recevoir une interprétation autonome, conforme à l'objet et au but de cet article qui est de protéger toute personne contre les privations arbitraires de liberté ; que, par ailleurs, la contrainte par corps doit être regardée comme une détention à part entière au sens de l'article 5.4 de la Convention, pour la période postérieure à l'exécution de la peine principale, et que le condamné doit bénéficier d'un droit à introduire un recours devant un tribunal afin qu'il soit statué sur la légalité du maintien en détention au titre de la contrainte par corps, s'agissant d'une privation de liberté dont la régularité dépend de la solvabilité, élément qui peut évoluer dans le temps ; que c'est donc à bon droit que, relevant que ni la réquisition ni le commandement de payer ne portait mention de ce que le condamné avait été informé dans une langue qu'il comprenait de la voie de recours qui lui était ouverte, et constatant que le recours n'avait été exercé que le 12 novembre 1998, soit plus d'un mois et demi après la réquisition, ce dont il résultait qu'à défaut d'avoir eu la révélation dans le plus court délai de son droit à recours, M. X... n'avait pu efficacement s'en prévaloir, la cour d'appel a décidé que la procédure était irrégulière au regard des textes invoqués ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 00-13774
Date de la décision : 18/06/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5.4. - Arrestation ou détention - Tribunal - Décision à bref délai - Contrainte par corps - Commandement et réquisition - Droit à recours - Révélation - Tardiveté - Mainlevée de la contrainte .

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5.2. - Arrestation - Information - Contrainte par corps - Commandement et réquisition - Mention - Voie de recours - Langue - Compréhension - Omission - Effet

DOUANES - Contrainte par corps - Formalités préliminaires - Commandement - Mention - Voie de recours - Langue - Compréhension - Omission - Effet

DOUANES - Contrainte par corps - Réquisition d'incarcération - Mention - Voie de recours - Langue - Compréhension - Omission - Effet

Une cour d'appel a, à bon droit, ordonné la mainlevée d'une contrainte par corps exécutée par un condamné pour un délit douanier, après avoir relevé que ni la réquisition ni le commandement de payer ne portait la mention de ce que le condamné avait été informé dans une langue qu'il comprenait de la voie de recours qui lui était ouverte et constaté que ce recours avait été exercé plus d'un mois et demi après la réquisition, ce dont il résultait qu'à défaut d'avoir eu la révélation dans le plus court délai de son droit à recours, l'intéressé n'avait pu s'en prévaloir et que la procédure était irrégulière au regard des articles 5.2 et 5.4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 06 novembre 1950 art. 5.4, art. 5.2

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 27 octobre 1999

A RAPPROCHER : Cour européenne des droits de l'homme, 1990-02-21, Van der Leer c/ Pays-Bas, A, n° 170-A ;

Cour européenne des droits de l'homme, 1990-08-30, Fox, Campbell et Hartley c/ Royaume-Uni, A, n° 182 ;

Cour européenne des droits de l'homme, 1998-08-24, Soumare c/ France, Recueil 1998, V, fascicule 86.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 jui. 2002, pourvoi n°00-13774, Bull. civ. 2002 IV N° 107 p. 115
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 IV N° 107 p. 115

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dumas .
Avocat général : Avocat général : M. Jobard.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Favre.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Boré, Xavier et Boré.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.13774
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