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22/05/2002 | FRANCE | N°01-85685

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mai 2002, 01-85685


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mai deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de Me THOUIN-PALAT, la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Joël,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 11 juin 2001, qui, pour

homicide involontaire, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mai deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de Me THOUIN-PALAT, la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Joël,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 11 juin 2001, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 175, alinéa 2, 463 et 512 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté le complément d'information demandé par le docteur Joël Y... ;

" aux motifs que le prévenu n'a pas utilisé au cours de l'information les prérogatives que lui confère l'article 175 du Code de procédure pénale, ne peut valablement solliciter, au surplus pour la première fois en cause d'appel, un supplément d'information ;

" alors que la forclusion édictée par l'article 175, alinéa 2, du Code de procédure pénale ne fait pas obstacle à ce que, en application des articles 463 et 512 du même Code, les parties puissent saisir la juridiction de jugement de demandes tendant à l'accomplissement d'un supplément d'information ; que les parties sont donc toujours recevables à solliciter du juge correctionnel, même pour la première fois en cause d'appel, une mesure d'instruction " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal et 388, 512, 515 et 593 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Joël Y... coupable d'homicide involontaire et l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis ;

" aux motifs adoptés qu'il résulte des pièces du dossier qu'il ne peut être reproché au docteur Y... d'avoir pratiqué l'ablation de l'appendice sous coelioscopie, ce qui, au demeurant, n'est pas visé dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal, le prévenu étant poursuivi pour avoir été défaillant dans la surveillance médicale et le management des suites opératoires ;

" aux motifs propres qu'il résulte de la procédure que la victime est décédée des suites d'une perforation de l'aorte abdominale effectuée lors de la mise en place " à l'aveugle d'un trocart ombilical au début d'une intervention pour appendicectomie " ; cette plaie a été méconnue par le chirurgien au cours de l'intervention ; l'opération effectuée et la perforation de l'aorte étant la cause directe du décès, il incombe à la Cour de dire si le chirurgien a commis une faute d'imprudence, de négligence, un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou s'il a accompli les diligences normales lui incombant, compte tenu de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, en étant notamment défaillant dans le management des suites opératoires ; si le prévenu a déclaré pratiquer depuis de nombreuses années ce type de chirurgie, il en connaissait nécessairement les dangers et les risques encourus et se devait d'utiliser les techniques permettant d'en limiter les risques ; il a choisi de continuer l'opération malgré les difficultés de repérage de l'appendice au lieu de faire une conversion (poursuite de l'intervention selon la chirurgie traditionnelle) au motif qu'il avait promis à son patient d'avoir recours à ce type de chirurgie ; la perforation, connue comme l'un des risques majeurs de l'opération dès la date des faits, n'a pas été prise en compte par le chirurgien malgré l'état de son patient, les signes et risque d'hémorragie interne, de telle sorte, qu'alors même que l'incision a été faite à 13 heures, ce n'est qu'au cours de la seconde intervention effectuée la nuit suivante entre 5 heures 30 et 10 heures 30 qu'elle a été diagnostiquée ; les experts ont noté les retards inexpliqués pris pour procéder à la seconde intervention et le retard pris de même au cours de cette intervention pour ouvrir le péritoine postérieur, de telle sorte qu'alors même que l'opération a commencé à 5 heures 30 ce n'est que trois heures après, à 8 heures 30, qu'a été suturée la perforation aortique, alors qu'il aurait dû y être procédé dans les plus brefs délais ; le prévenu ne peut ainsi valablement faire état d'une intervention conduite dans une situation d'urgence ; si toute opération comporte des aléas et si une simple erreur de diagnostic n'est pas fautive, il convient de relever qu'en l'espèce le chirurgien a bien commis des fautes d'imprudence et de négligence dans la conduite des deux opérations effectuées par lui ; il n'a pas accompli les diligences normales lui incombant, compte tenu de ses compétences (2 000 interventions à ses dires en coeliochirurgie) qui
auraient dû le conduire, connaissant les risques d'une perforation possible de l'aorte, à la suturer dans les plus brefs délais ; en effectuant les opérations et le suivi opératoire de manière non conforme aux données acquises de la science à l'époque des faits, le prévenu a fait perdre à Patrice D... toute chance de survie et a commis une faute, cause directe du décès " ;

" alors 1) que les juridictions de jugement ne peuvent légalement statuer que sur les fait relevés par l'ordonnance de renvoi qui les a saisis ; que, dans son ordonnance du 16 juin 1998, Jean-Pierre Rousseau, juge d'instruction, avait renvoyé le docteur Y... devant le tribunal correctionnel pour avoir à Nice le 17 janvier 1997 " par maladresse, imprudence, inattention, négligence, en l'espèce en étant notamment défaillant dans la surveillance médicale et le management des suites opératoires, involontairement causé la mort de Patrice D... " ; qu'en condamnant le docteur Y... en raison de la faute prétendument commise au cours de l'intervention chirurgicale elle-même, fait non dénoncé dans l'ordonnance de renvoi, la cour d'appel a violé les articles 388 et 512 du Code de procédure pénale ;

" alors 2) qu'une cour d'appel ne peut accueillir des demandes nouvelles ni prononcer une condamnation pour une infraction nouvelle révélée par les débats d'appel ; que, dans son jugement du 8 février 1999, le tribunal correctionnel de Nice avait jugé qu'il résulte des pièces du dossier qu'il ne peut être reproché au docteur Y... d'avoir pratiqué l'ablation de l'appendice sous coelioscopie, ce qui au demeurant n'est pas visé dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal, le prévenu étant poursuivi pour avoir été défaillant dans la surveillance médicale et le management des suites opératoires (jugement p. 2 1) ; qu'en condamnant néanmoins le docteur Y... pour avoir pratiqué l'ablation de l'appendice sous coelioscopie, fait non visé dans l'ordonnance de renvoi et non soumis au tribunal correctionnel, la cour d'appel a violé l'article 515 du Code de procédure pénale ;

" alors 3) que, pour condamner le docteur Y..., la cour d'appel s'est contentée d'affirmer, dans des motifs généraux et abstraits, que " la perforation était connue comme l'un des risques majeurs de l'opération dès la date des faits " et que le docteur Y... avait effectué " les opérations et le suivi opératoire de manière non conforme aux données acquises de la science à l'époque des faits " ;

qu'en statuant ainsi, sans indiquer sur quels documents précis elle se fondait pour dire que l'intervention pratiquée par le docteur Y... n'était pas conforme aux règles de l'art à l'époque des faits, la cour d'appel a privé sa décision de toute véritable motivation et ce faisant violé les articles 121-3 et 221-6 du Code pénal " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Joël Y... coupable d'homicide involontaire et l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis ;

" aux motifs adoptés que, si le rapport H...et I... faisant état des risques encourus par la coelioscopie, notamment la plaie de gros vaisseaux, a été publié postérieurement à l'opération de Patrice D..., le 17. 01. 1995, il n'en reste pas moins que ce rapport concernait les " accidents " post opératoires survenus après une intervention sous coelioscopie, sur plusieurs années jusqu'en 1994 ; divers spécialistes s'étaient auparavant penchés sur le problème lié à l'introduction aveugle du 1er trocart, à l'origine de 90 % des accidents graves ; ainsi, le docteur Y... ne pouvait ignorer les risques encourus par une telle intervention et aurait dû redoubler de vigilance, dans la surveillance du patient post opératoire ; il apparaît des éléments du dossier, notamment du rapport d'expertise, du compte rendu de l'examen médico légal de la victime que l'intervention pratiquée avait été particulièrement délicate, du fait de la situation de l'appendice et de la survenance de deux hémorragies ; le caractère particulier de l'intervention avait été rapporté par le docteur Y... lui-même, qui avait indiqué que le patient lui avait fait " la totale " : des déclarations des infirmières ayant eu à surveiller le jeune opéré, apparaît constant que celui-ci présentait dès le retour dans sa chambre, des symptômes " anormaux " et inquiétants à tel point qu'un encadrement spécial avait été mis en oeuvre (perfusion, oxygène, appareil pour prendre le pouls filant) ; le docteur Y... lui-même, à 15h30 avait demandé à une infirmière d'effectuer une surveillance particulière de Patrice D..., car celui-ci avait saigné à l'opération ; d'autre part, lors de sa visite auprès de l'opéré, à 18 heures ou 18h30, le chirurgien a méconnu la tachycardie de Patrice D..., le pouls s'élevant à 139, ce qui, selon les experts n'était pas normal, 3 heures après l'intervention ; à 21h30, appelé par Mme Z..., infirmière, inquiète et très soucieuse de l'état du jeune malade qui ne faisait qu'empirer (pouls élevé, tension très basse, maux de ventre, vomissements...), le docteur Y... ne s'est ni déplacé, ni inquiété, demandant à l'infirmière de prendre la tension du jeune homme toutes les heures ;

le déroulement de la chronologie des faits, démontre que le docteur Y... a été imprudent et négligent dans la surveillance du patient après l'opération ; en effet, il a méconnu les divers symptômes au demeurant alarmants et a trop tardé à se rendre compte qu'il existait une hémorragie interne importante ; pourtant, alors qu'il n'ignorait pas les difficultés rencontrées lors de l'opération et les risques de toute coelioscopie, le docteur Y... n'a jamais envisagé la reprise de l'hémorragie interne, celle-ci n'ayant été évoquée qu'à 2h30 du matin, le 18. 01. 1995 ; en méconnaissant l'existence d'un pouls anormalement élevé, il n'a pas su diagnostiquer à temps l'hémorragie interne et l'éventualité de la plaie d'un organe ou d'un vaisseau ; de plus, la suture de la plaie avait été effectuée trop tard selon les experts ; le retard apporté dans le diagnostic de l'hémorragie rétro-péitonéale, lequel, aurait dû être fait, selon les experts, en fin de journée (retard de 4 heures), constitue l'inattention, l'imprudence et la négligence reprochées au chirurgien, postérieurement à l'opération ; les faits sont donc établis à l'encontre du docteur Y..., les dites fautes ayant involontairement entraîné la mort du jeune Patrice ; en effet, celui-ci est décédé 14 jours plus tard, " dans un tableau de défaillance polyviscérale, due à une ischémie prolongée, elle-même due à une hémorragie rétro-périnatale post opératoire " dont le point de départ a été la perforation de l'aorte abdominale par la mise en place à l'aveugle du trocart ombilical ;

" aux motifs propres qu'il résulte de la procédure que la victime est décédée des suites d'une perforation de l'aorte abdominale effectuée lors de la mise en place " à l'aveugle d'un trocart ombilical au début d'une intervention pour appendicectomie " ; cette plaie a été méconnue par le chirurgien au cours de l'intervention ; l'opération effectuée et la perforation de l'aorte étant la cause directe du décès, il incombe à la Cour de dire si le chirurgien a commis une faute d'imprudence, de négligence, un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou s'il a accompli les diligences normales lui incombant, compte tenu de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, en étant notamment défaillant dans le management des suites opératoires ; si le prévenu a déclaré pratiquer depuis de nombreuses années ce type de chirurgie il en connaissait nécessairement les dangers et les risques encourus et se devait d'utiliser les techniques permettant d'en limiter les risques ; il a choisi de continuer l'opération malgré les difficultés de repérage de l'appendice au lieu de faire une conversion (poursuite de l'intervention selon la chirurgie traditionnelle) au motif qu'il avait promis à son patient d'avoir recours à ce type de chirurgie ; la perforation, connue comme l'un des risques majeurs de l'opération dès la date des faits, n'a pas été prise en compte par le chirurgien malgré l'état de son patient, les signes et risques d'hémorragie interne, de telle sorte, qu'alors même que l'incision a été faite à 13 heures, ce n'est qu'au cours de la seconde intervention effectuée la nuit suivante entre 5 heures 30 et 10 heures 30 qu'elle a été diagnostiquée ; les experts ont noté les retards inexpliqués pris pour procéder à la seconde intervention et le retard pris de même au cours de cette
intervention pour ouvrir le péritoine postérieur, de telle sorte qu'alors même que l'opération a commencé à 5 heures 30 ce n'est que trois heures après, à 8 heures 30, qu'a été suturée la perforation aortique, alors qu'il aurait dû y être procédé dans les plus brefs délais ; le prévenu ne peut ainsi valablement faire état d'une intervention conduite dans une situation d'urgence ; si toute opération comporte des aléas et si une simple erreur de diagnostic n'est pas fautive, il convient de relever qu'en l'espèce le chirurgien a bien commis des fautes d'imprudence et de négligence dans la conduite des deux opérations effectuées par lui ; il n'a pas accompli les diligences normales lui incombant, compte tenu de ses compétences (2 000 interventions à ses dires en coeliochirurgie) qui auraient dû le conduire, connaissant les risques d'un perforation possible de l'aorte, à la suturer dans les plus brefs délais ; en effectuant les opérations et le suivi opératoire de manière non conforme aux données acquises de la science à l'époque des faits, le prévenu a fait perdre à Patrice D... toute chance de survie et a commis une faute, cause directe du décès " ;

" alors 1) que les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement uniquement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'en l'espèce, le docteur Y... n'était pas poursuivi pour avoir causé directement la mort de Patrice D... mais uniquement " pour avoir été défaillant dans la surveillance médicale et le management des suites opératoires " (jugement p. 2 1) ; qu'en entrant en voie de déclaration de culpabilité envers le docteur Y..., sans établir ni qu'il avait violé de façon manifeste une obligation de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ni commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, la cour d'appel a violé les articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

" alors 2) qu'il résultait des propres constatations des juges du fond que l'opération de Patrice D... s'était terminée à 15h20 (arrêt p. 7 1) ; que, dès son retour dans sa chambre, " un encadrement spécial a été mis en oeuvre (perfusion, oxygène, appareil pour prendre le pouls) " ; que " le docteur Y... lui-même, à 15h30, a demandé à une infirmière d'effectuer une surveillance particulière de Patrice D... " (jugement, p. 2 10) ; qu'avant de regagner son domicile, le docteur Y... avait rendu, entre 18 heures et 18h30, une visite à son patient (jugement p. 2 11) ; qu'à 19 heures, le docteur B..., anesthésiste avait également rendu visite à l'opéré avant de regagner son domicile (jugement, p. 4 2) ;

qu'à partir de cet instant, le patient avait été pris en charge par le docteur A..., médecin de garde, " qui a affirmé que son confrère le docteur B... l'avait bien informé des problèmes de surveillance que posait son malade et que l'opération avait été difficile " (arrêt p. 7 4) ; qu'en condamnant néanmoins le docteur Y... pour avoir été défaillant dans la surveillance médicale de Patrice D..., sans expliquer en quoi la surveillance post opératoire qu'il avait organisée n'était pas manifestement conforme aux lois ou règlements en vigueur au jour de l'infraction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

" alors 3) que, pour condamner le docteur Y..., la cour d'appel lui a reproché de pas avoir réopéré son patient dans les plus brefs délais alors qu'il connaissait " les risques d'une perforation possible de l'aorte " ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à établir qu'à un moment quelconque le docteur Y... avait eu conscience que son patient était victime d'une hémorragie interne et donc qu'il était exposé à un risque d'une particulière gravité, de sorte qu'il n'avait pas accompli les actes chirurgicaux qui s'imposaient à ce moment là, la cour d'appel a violé les articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

" alors 4) que les juges du fond ont constaté qu'avant de retourner à son domicile, le docteur Y... avait rendu une dernière visite à l'opéré " à 18 H ou 18 H 30 " (jugement, p. 2) et que c'était seulement " à 19 H 30, que les suites de l'appendicectomie subie en début d'après-midi sont devenues anormales " (arrêt, p. 7 5) ; qu'il résultait ainsi des propres constatations de la cour d'appel qu'à l'heure où le docteur Y... avait rendu visite à son patient, il lui était impossible de percevoir le risque encouru par Patrice D... ; qu'en entrant néanmoins en voie de déclaration de culpabilité envers le docteur Y..., la cour d'appel a donc violé les articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

" alors 5) que, pour relaxer le docteur B..., qui avait rendu visite à la victime " vers 19 heures " (arrêt p. 8 in fine), les juges du fond ont considéré que " si le docteur B... n'a pas envisagé ainsi qu'il aurait dû le faire une reprise d'hémorragie, en présence d'une tachycardie persistante à 139 bat/ min, cette erreur de diagnostic n'est pas constitutive de la faute caractérisée qu'exige la loi du 10 juillet 2000, le praticien n'ayant pas eu une perception nécessaire du risque encouru par la victime, le danger n'étant pas pour lui objectivement prévisible " (arrêt p. 9 2) ; que, pour condamner le docteur Y..., la cour d'appel lui a néanmoins reproché de ne pas avoir diagnostiqué, lors la visite qu'il avait effectuée " entre 18 heures et 18 heures 30 " (jugement p. 2), la reprise d'hémorragie dont était victime Patrice D... ; qu'en n'expliquant pas comment le docteur Y... aurait pu percevoir un risque qui, une demi-heure plus tard n'était toujours pas " objectivement prévisible " pour son confrère le docteur B..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

" alors 6) qu'en retenant le docteur Y... dans les liens de la prévention en raison du retard qui aurait été pris au cours de la seconde intervention destinée à ouvrir le péritoine postérieur de Patrice D... pour juguler l'hémorragie interne dont il était la victime, alors qu'il était établi que cette opération avait été confiée au docteur X..., spécialiste vasculaire compétent, la cour d'appel a violé les articles 121-3 et 221-6 du Code pénal " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Patrice D... a été opéré d'une appendicite le 17 janvier 1995 par Joël Y..., qui a procédé par coelioscopie ; qu'il est décédé le 1er février 1995, malgré deux opérations chirurgicales, des suites d'une hémorragie interne décelée tardivement ;

Attendu que, pour déclarer Joël Y... coupable d'homicide involontaire, l'arrêt, après avoir observé qu'il existe des différences minimes entre le compte-rendu opératoire soumis aux experts et la photocopie de cette même pièce produite par le prévenu, retient que, suivant les conclusions de l'expertise, l'hémorragie à laquelle a succombé la victime est consécutive à une blessure de l'aorte au cours de la coelioscopie et que le chirurgien a commis une faute en procédant à l'appendicectomie par cette méthode sans en prévenir les risques par une laparoscopie et sans assurer une surveillance postopératoire suffisante ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel, qui a nécessairement écarté la demande de supplément d'information sur l'origine des différences entre les deux versions du compte-rendu opératoire présentées par le prévenu et qui a caractérisé un lien de causalité direct entre la faute et le dommage, a, sans excéder sa saisine, justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens, le premier inopérant en ce qu'il critique des motifs erronés mais surabondant, doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

CONDAMNE Joël Y... à payer à Augusta C..., épouse G..., Denis D..., Magali D..., Jacqueline F..., veuve D..., Roger G... et Sylviane G..., épouse D..., la somme de 2 000 euros au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Palisse conseiller rapporteur, MM. Roman, Blondet, Le Corroller, Beraudo conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Beaudonnet, Gailly conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-85685
Date de la décision : 22/05/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, 11 juin 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mai. 2002, pourvoi n°01-85685


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.85685
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