CASSATION sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 26 octobre 2000, qui a annulé la procédure suivie contre Richard X..., et les sociétés Midi France Distribution et Medtrans International, pour importations réputées sans déclaration de marchandises prohibées.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 336, 396, 406, 407, 414, 426-3, 426-4 du Code des douanes, 593 et 802 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré nulle la procédure ;
" aux motifs que les procès-verbaux de notification d'infraction ont pour fondement juridique des documents communiqués dans le cadre du règlement relatif à l'assistance administrative mutuelle ; que les griefs articulés par l'Administration concernant les importations de Macao ont pour fondement un document de travail interne de la Commission, lui-même fondé sur deux rapports de mission ; que concernant les importations de Chine, l'Administration se fonde sur un rapport communiqué aux Etats membres ; que ces trois rapports ont servi de support à la Commission pour remettre en cause les importations et à l'Administration pour fonder ses notifications d'infraction ; que ces rapports n'ont pas été communiqués devant la CCED ni devant le tribunal ; que ce ne fut qu'après le jugement avant dire droit que le rapport du 18 décembre 1990 a été communiqué qui ne concerne que la période antérieure au 14 décembre 1990 alors que le litige porte également sur les importations en 1991 et 1992 ; que ces conclusions sont imprécises et hypothétiques ; que le second rapport du 6 avril 1992 n'a jamais été produit ; qu'à sa place l'Administration a communiqué une lettre de la commission indiquant que ce rapport n'était pas destiné aux autorités compétentes en charge des enquêtes douanières, n'avait pas vocation à être transmis dans le cadre du règlement d'assistance mutuelle et ne fait pas grief aux parties à l'instance pénale française ; que le principe des droits de la défense exige non seulement que les prévenus fassent connaître leur point de vue sur la pertinence des faits allégués à leur encontre mais qu'ils puissent prendre connaissance des documents retenus par l'Administration pour fonder la prévention ;
" alors qu'en matière douanière, c'est par le procès-verbal que sont fixés l'objet de l'inculpation et l'étendue des poursuites ; qu'il ressort du procès-verbal de notification d'infraction du 22 juin 1994 que la teneur des rapports communautaires était relatée avec précision ce qui permettait aux prévenus de les contester ; qu'en s'abstenant d'indiquer en quoi le fait qu'ils n'avaient pas eu connaissance de ces rapports les auraient empêchés de critiquer le fondement des poursuites, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Et sur le moyen relevé d'office, pris de la violation de l'article 338-1 du Code des douanes :
Vu l'article 338-1 du Code des douanes ;
Attendu que, selon ce texte, les tribunaux ne peuvent admettre contre les procès-verbaux de douanes d'autres nullités que celles résultant de l'omission des formalités prescrites par les articles 323-1, 324 à 332 et 334 dudit Code ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société Midi France Distribution, dont Richard X... est le gérant, a importé de 1989 à 1993, avec le concours de la société Medtrans International, commissionnaire en douane, des cassettes vidéo déclarées originaires de Chine ou de Macao qui ont bénéficié de tarifs douaniers préférentiels selon un régime mis en place par la Commission des Communautés européennes, dit " système des préférences généralisées ", sur présentation de certificats d'origine délivrés par les autorités habilitées des pays précités ;
Que les enquêtes effectuées par les autorités de la Communauté européenne, à Hong-Kong en Chine et à Macao, ayant révélé que les marchandises importées avaient été frauduleusement déclarées originaires de ces deux derniers pays, l'administration des Douanes, s'appuyant sur un document de travail interne à la Commission, en date du 24 novembre 1992, fondé sur deux rapports de mission des 18 décembre 1990 et 6 avril 1992, a notifié à Richard X... et aux deux sociétés précitées, par procès-verbaux des 22 juin et 20 septembre 1994, des infractions aux articles 426-3° et 4° du Code des douanes ;
Attendu que les intéressés ont été poursuivis pour importations réputées sans déclaration de marchandises prohibées, par l'administration des Douanes, devant la juridiction correctionnelle qui, par jugement avant dire droit du 17 novembre 1997, a ordonné la production par l'Administration des rapports de mission des 18 décembre 1990 et 6 avril 1992 ; que, par jugement, en date du 5 juin 1998, le tribunal correctionnel, constatant que seul avait été communiqué le premier rapport, a annulé la procédure douanière pour violation des droits de la défense ;
Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt attaqué, outre les motifs repris au moyen, énonce notamment que l'absence de communication du second rapport des enquêteurs de la Communauté européenne ne permet pas à la cour d'appel d'apprécier la réalité des faits incriminés, ni la pertinence des allégations soutenues par l'administration des Douanes et qu'elle a pour effet de porter une grave atteinte aux droits de la défense en lui interdisant de prendre connaissance de documents qui ont servi de fondement aux poursuites ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui était tenue de statuer au vu des procès-verbaux et des pièces produites par l'administration des Douanes dont il lui appartenait d'apprécier la valeur probante, a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 26 octobre 2000, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes.