Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 janvier 1999), que la société Esprit international (société Esprit) est titulaire de la marque semi figurative " Esprit " déposée le 20 août 1984, renouvelée le 5 juillet 1994 et enregistrée sous le n° 1 282 286 et de la marque dénominative " Esprit ", déposée le 19 novembre 1980, renouvelée le 17 octobre 1990 et enregistrée sous le n° 1 622 074, pour désigner les produits de la classe 3 ; que cette société a assigné en contrefaçon de ses marques la société nouvelle des produits de beauté et parfums René X... (société Garraud), titulaire de la marque " Esprit bleu ", déposée le 5 octobre 1994 et enregistrée sous le n° 94 538 821 pour désigner les mêmes produits en classe 3 ; que le 17 janvier 1996, la société X... a reconventionnellement demandé la déchéance des droits de la société Esprit sur ses deux marques pour défaut d'exploitation ;
Attendu que la société Esprit fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit à cette demande en déchéance, alors, selon le moyen, que la directive n° 89-104 du 21 décembre 1988, à la lumière de laquelle doit s'interpréter la loi de transposition en droit interne, dispose en son article 10 que " si, dans un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la procédure d'enregistrement est terminée, la marque n'a pas fait l'objet par le titulaire d'un usage sérieux dans l'Etat membre concerné pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque est soumise aux sanctions prévues dans la présente directive " ; qu'il en résulte que le demandeur à la déchéance ne peut pas choisir librement la période d'inexploitation qu'il prétend invoquer, celle-ci étant fixée par la date d'enregistrement de la marque ou, en cas d'usage commencé puis interrompu, à la date de cette interruption ; que la cour d'appel ayant d'abord constaté que les marques litigieuses avaient été déposées en 1980 et 1984, il en découlait, en l'absence de tout commencement d'usage suivi d'interruption, que ces marques, non exploitées pendant plus de cinq ans sous l'empire de la loi du 31 décembre 1964 sans qu'aucune demande de déchéance ait été formée, avaient acquis le droit de ne pas être sanctionnées au titre de cette loi ; qu'ensuite, la loi nouvelle du 4 janvier 1991, édictant des sanctions plus sévères que l'ancienne (effet absolu, effet dès l'expiration des cinq ans, impossibilité de conservation par l'usage pour des produits voisins), le délai de cinq ans auquel s'attache cette sanction ne pouvait commencer à courir avant son entrée en vigueur fixée au 28 décembre 1991 ; que dès lors en déclarant recevable la demande de déchéance formée avant le 17 janvier 1996 et en prononçant la déchéance à cette date, soit avant l'expiration de ce délai de cinq ans, la cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1964 est déchu de ses droits le propriétaire d'une marque, qui, sauf excuse légitime, ne l'a pas exploitée de façon publique pendant les cinq ans précédant la demande en déchéance ; qu'ayant constaté par motifs propres et adoptés, que la période de non-exploitation alléguée avait commencé sous l'empire de cette loi et que la société Esprit ne justifiait pas avoir fait un usage sérieux des deux marques entre le 17 janvier 1991 et le 17 janvier 1996, date de la demande en déchéance, c'est à bon droit que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.