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26/02/2002 | FRANCE | N°00-40722

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2002, 00-40722


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Marc Y..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 1er décembre 1999 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre sociale), au profit de la société L'Estelan, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La société l'Estelan a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 2002, où étaient prés

ents : M. Merlin, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Soury, conseiller référendaire rapport...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Marc Y..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 1er décembre 1999 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre sociale), au profit de la société L'Estelan, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La société l'Estelan a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 2002, où étaient présents : M. Merlin, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Soury, conseiller référendaire rapporteur, M. Finance, conseiller, Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Soury, conseiller référendaire, les observations de Me Blanc, avocat de M. Y..., de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société L'Estelan, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. Y... a été engagé le 22 octobre 1988 par la société l'Estelan en qualité de veilleur de nuit ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 21 avril 1995 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de rappels de salaire, d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et de primes de qualification ainsi que de d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir exclu ses temps de pause, représentant une heure par jour, pour le calcul de son rappel de salaire alors, selon le moyen :

1 / que la cour d'appel ne pouvait se borner à constater, pour les deux laps de temps litigieux, que M. Y... n'avait pas à répondre aux sonnettes des chambres et que son planning de travail n'indiquait aucune tâche précise à accomplir, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par le salarié qui faisait valoir que le volume de son travail ne lui permettait pas de s'arrêter 30 minutes à chaque repas, s'il n'effectuait pas alors les nombreuses autres tâches lui incombant ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4 du Code du travail ;

2 / qu'il y a travail effectif lorsque le salarié, en l'absence même de toute tâche à accomplir, reste à la disposition de l'employeur sans pouvoir quitter le lieu de travail pour se livrer à des occupations personnelles ; que la cour d'appel aurait dû rechercher et expliquer, ainsi qu'elle y était invitée, dans quelle mesure un veilleur de nuit qui prends ses repas dans la salle à manger de la maison de retraite qui l'emploie a réellement la possibilité de se livrer à ses occupations personnelles; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4 du code du travail ;

3 / que l'absence d'indication expresse sur le planning de travail d'un temps de pause crée pour le moins un doute quant au point de savoir si le salarié reste à la disposition de l'employeur, doute qui doit profiter au salarié ; que la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 212-4 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que de 7h30 à 8h et de 20h30 à 21h le salarié n'était pas à la disposition de son employeur et n'était pas tenu de répondre aux sollicitations de résidents, en a exactement déduit que ces périodes de temps s'analysaient en des temps de pause qui ne devaient donc pas être pris en compte pour le calcul de la durée du travail effectif; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1 / que la circonstance que le salarié, qui devait effectuer une ronde chaque heure dans les étages et dans un pavillon annexe et qui ne se trouvait donc pas nécessairement à proximité de la chambre considérée au moment des agressions, n'ai rien entendu, est radicalement inopérante pour en déduire qu'il n'avait pas effectué ses rondes ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6 et L. 122-14-3 du Code du travail ;

2 / que la lettre de licenciement fixant les limites du litige, la cour d'appel ne pouvait reprocher au salarié de ne pas avoir eu de vigilance particulière envers Mme X... en raison de l'agressivité de celle-ci, motif non invoqué ; que la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;

3 / que la faute de l'employeur est susceptible d'atténuer celle du salarié ; que la cour d'appel aurait dû rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par M. Y... qui produisait des attestations selon lesquelles Mme X... était particulièrement agressive, faisait valoir que "la direction savait qu'inévitablement en mettant Mme X... avec une autre pensionnaire, il allait se passer un incident", ne l'inscrivant pourtant pas sur la liste des personnes devant faire l'objet d'une surveillance spéciale, si l'employeur n'avait pas ainsi commis une faute enlevant son caractère de gravité à celle éventuellement commise par le salarié; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-6 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a apprécié les éléments de fait et de preuve du litige et estimé que le salarié avait, sans motif légitime, manqué à ses obligations professionnelles en n'effectuant pas ses rondes de nuit suivant la périodicité imposée par l'employeur ; que, s'en tenant au motif énoncé dans la lettre de licenciement, elle a pu décider que ce comportement du salarié était de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :

Vu les articles L. 212-2 et L. 212-4 du Code du travail, dans leur rédaction alors en vigueur, ensemble le décret du 22 mars 1937 déterminant les modalités d'application de la loi du 21 juin 1936 sur la semaine de 40 heures dans les hôpitaux, hospices, cliniques, dispensaires, maisons de santé, asiles d'aliénés, et tous établissements hospitaliers ;

Attendu que décider que le régime d'heures d'équivalence instauré par le décret du 22 mars 1937 n'était pas applicable, l'arrêt énonce que ce régime d'exception ne peut s'appliquer qu'aux activités strictement définies par ce texte ; que ledit décret concerne uniquement les établissements qui ont pour activité principale de donner des soins aux personnes malades, ce qui n'est pas le cas des maisons de retraite qui accueillent principalement des personnes valides ; que l'activité exercée par la société l'Estelan est celle d'une maison de retraite ; que cette activité n'entre pas dans la liste de celles dressées par le décret du 22 mars 1937, ce qui exclut l'application du régime réglementaire d'équivalence ;

Attendu, cependant, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 22 mars 1937, sont soumis à ses dispositions les établissements publics ou privés ci-après énumérés : hôpitaux, hospices, cliniques, dispensaires, maisons de santé, maisons d'accouchement, asiles d'aliénés, sanatoriums, préventoriums, établissements thermaux et climatiques et tous établissements de cure, repos, soins, convalescence, régime ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les termes "hospice" et "résidence du 3ème âge" recouvrent la même réalité, en sorte que la société était fondée à se prévaloir de l'horaire d'équivalence institué par le décret du 22 mars 1937, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition écartant l'application du régime d'heures d'équivalence instauré par le décret du 22 mars 1937, l'arrêt rendu le 1er décembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-40722
Date de la décision : 26/02/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Durée hebdomadaire.

TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Horaire d'équivalence - Application aux établissements de santé - Hospice - Résidence du troisième âge.


Références :

Code du travail L212-2 et L212-4
Décret du 22 mars 1937
Loi du 21 juin 1936

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre sociale), 01 décembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 fév. 2002, pourvoi n°00-40722


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MERLIN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.40722
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