AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Max X..., demeurant anciennement ... et actuellement Le Petit Port, ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 octobre 1999 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), au profit de la Société générale de banques au Cameroun, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2001, où étaient présents : M. Buffet, président, M. Etienne, conseiller rapporteur, Mme Borra, M. Séné, Mmes Bezombes, Foulon, conseillers, Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Etienne, conseiller, les observations de Me Vuitton, avocat de M. X..., de la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de la Société générale de banques au Cameroun, les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 18 octobre 1999) et les productions, qu'un jugement rendu le 2 décembre 1993 par le tribunal de grande instance de Douala (Cameroun) a condamné M. X... à verser une certaine somme à la Société générale de banques au Cameroun (la banque) ; que M. X... ayant résidé en France, la banque a demandé l'exequatur de cette décision ; que M. X... a interjeté appel du jugement du 10 décembre 1997 ayant accueilli cette demande ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné l'exequatur, alors, selon le moyen :
1 / que les parties avaient été avisées le 7 octobre 1998 de ce que la clôture serait prononcée le 23 juin 1999 ; qu'en l'espèce, l'intimée, qui savait pertinemment que l'appelant résidait à l'étranger, a signifié ses conclusions le 10 juin 1999, de sorte que l'ordonnance de clôture avait été reportée pour permettre à l'appelant d'y répondre ; que dès lors, l'arrêt qui, pour rejeter les conclusions signifiées le 20 juillet 1999 par l'appelant, s'est borné à énoncer que lesdites conclusions signifiées la veille de l'ordonnance de clôture n'ont pu être contradictoirement discutées, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 135 du nouveau Code de procédure civile :
2 / que le juge doit relever, fut-ce d'office, l'irrecevabilité des conclusions déposées après l'ordonnance de clôture ; qu'en l'espèce, l'arrêt qui a fait droit aux conclusions déposées et signifiées par l'intimée le 6 septembre 1999, soit plus d'un mois après l'ordonnance de clôture intervenue le 21 juillet 1999 et 3 jours avant l'audience de plaidoirie, par lesquelles celle-ci concluait au rejet des conclusions de M. X... signifiées le 20 juillet 1999, a violé l'article 135 du nouveau Code de procédure
civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que M. X... avait déposé ses dernières conclusions et communiqué ses dernières pièces la veille de l'ordonnance de clôture, laquelle avait déjà été reportée, et qu'ainsi les parties n'avaient pu en discuter contradictoirement ; qu'elle a pu en déduire que, par ce comportement, M. X... avait porté atteinte au principe de la contradiction ;
Et attendu que la cour d'appel n'avait pas à écarter des débats les conclusions que la banque avait déposées après l'ordonnance de clôture qui se bornaient à relever la tardiveté des écritures et des pièces de la partie adverse ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception de nullité du jugement du 10 décembre 1997 et d'avoir ordonné l'exequatur du jugement du 2 décembre 1993, alors, selon le moyen, qu'il appartient aux juges du second degré, statuant sur un jugement réputé contradictoire de vérifier que le premier juge a fait droit aux fins de la demande après avoir examiné qu'elle était juste, et vérifié que cette décision était motivée et portait en elle la preuve de sa régularité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel saisie de la demande de nullité du jugement rendu en première instance ne pouvait confirmer celui-ci sans rechercher si la décision déférée satisfaisait aux exigences de l'article 472 du nouveau Code de procédure civile ; qu'à défaut d'avoir procédé à cette recherche, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 472 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de ses conclusions ni de l'arrêt que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel les prétentions qu'il fait valoir au soutien de son moyen ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable ;
Sur le troisième moyen ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception de nullité du jugement déféré, alors, selon le moyen, que la présomption de ce que l'adresse à laquelle l'acte a été signifié et qui a été celle de la lettre recommandée prévue à l'article 688 du nouveau Code de procédure civile revenue avec "non réclamée" est une présomption simple ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait estimer que le retour de la lettre recommandée prévue à l'article 686 du nouveau Code de procédure civile, revenue avec la mention "non réclamée" laissait présumer que les coordonnées postales de M. X... étaient exactes sans rechercher si celui-ci justifiait d'une autre adresse ; qu'en omettant de procéder à une telle recherche, la cour d'appel a violé les articles 1353 du Code civil et 686 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les conclusions qui invoquaient le moyen que M. X... met actuellement en oeuvre ayant été déclarées irrecevables comme tardives, le moyen présenté n'a pas été soumis aux juges du fond ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, il est irrecevable ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné l'exequatur alors, selon le moyen, que le contrôle, à titre incident, de la régularité internationale d'un jugement étranger peut être opéré par tout juge devant lequel ce jugement est invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir ; qu'il résulte des conclusions de M. X... que ce dernier avait excipé, sans se défendre au fond, de ce que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Douala ne répondait pas suffisamment à l'obligation de motivation telle que visée aux articles 34 et 38 de l'Accord franco-camerounais du 21 février 1974, au regard du rejet de son exception d'irrecevabiltié de l'action engagée contre lui et fondée sur le défaut d'enregistrement de l'acte de cautionnement ; qu'en omettant de s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 34 et 38 de l'Accord franco-camerounais du 21 février 1974 et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que le juge de l'exequatur n'a aucun pouvoir de révision au fond de la décision étrangère ; que l'Accord invoqué limite le contrôle de régularité du jugement, notamment au respect de l'ordre public ; que l'arrêt attaqué a fait une exacte application de cet Accord en relevant que la décision du tribunal de Douala avait rejeté le moyen d'irrecevabilité proposé par M. X... en exposant les motifs de ce rejet, sans qu'il lui appartînt d'apprécier la pertinence ou la suffisance de cette motivation ;
Que la décision attaquée est, sur ce point, légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à la Société générale de banques au Cameroun la somme de 2 275 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, prononcé et signé par Mme Borra, conseiller le plus ancien, non empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en l'audience publique du trente et un janvier deux mille deux et signé par Mlle Laumône, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.