AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Drouant, société anonyme, dont le siège est ci-devant, ... et actuellement ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 décembre 1999 par la cour d'appel de Paris (8e chambre civile, section B), au profit :
1 / de la société Cofibis, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / de M. Z..., domicilié ..., antérieurement ès qualités d'administrateur au redressement judiciaire de la société Cofibis et actuellement commissaire à l'exécution du plan,
3 / de Mme Monique X..., domiciliée ..., prise en sa qualité de représentant des créanciers de la société Cofibis,
4 / de la société Gan, société anonyme, dont le siège est ...,
défendeurs à la cassation ;
En présence de M. Y..., demeurant ...,
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 décembre 2001, où étaient présents : M. Buffet, président, M. Séné, conseiller rapporteur, Mme Borra, M. Etienne, Mmes Bezombes, Foulon, conseillers, Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire, Mme Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Séné, conseiller, les observations de Me Choucroy, avocat de la société Drouant, de la SCP Defrénois et Levis, avocat de la société Gan, de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la société Cofibis et Mme X..., ès qualités, les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société Drouant de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en tant que dirigé contre M. Y... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 décembre 1999) qu'en vertu d'un acte authentique de prêt, la société Gan a pratiqué une saisie-attribution à l'encontre de la société Cofibis, entre les mains de la société Drouant, débitrice de loyers commerciaux envers la société Cofibis ; que celle-ci, mise ensuite en redressement judiciaire ainsi que les organes de la procédure collective ont demandé à un juge de l'exécution de donner mainlevée de la saisie ; que le tiers saisi est intervenu volontairement à l'instance ; que la société Cofibis, M. Z... et Mme X..., ès qualités ont interjeté appel des jugements qui les avaient déboutés de leur demande puis se sont desistés de leur appel en ce qu'il était dirigé contre la société Gan ; qu'antérieurement à ce désistement, la société Drouant a formé un appel incident et exposant qu'un jugement du juge des loyers commerciaux du 1er juillet 1999 avait réduit le prix du bail commercial pour la période courue du 1er juillet 1996 au 30 juin 1999, a remis en cause la validité de la saisie-attribution et demandé la restitution des sommes sequestrées en exécution de la saisie ;
Attendu que la société Drouant fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré ses demandes irrecevables, alors, selon le moyen :
1 / que saisie de l'entier litige, notamment de la question de la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la société Drouant, par l'effet dévolutif de l'appel lorsque celle-ci a formé son appel incident tendant "à contester la validité de la saisie pratiquée et à former une demande de restitution des sommes versées pour son exécution", la cour d'appel n'a pu affirmer que le jugement rendu le 1er juillet 1999 par le juge de loyers ne pourrait "qu'être cause d'une créance en restitution à valoir dans les rapports futurs de la locataire avec son bailleur, sans pouvoir remettre en cause rétroactivement la saisie opérée antérieurement et exécutée", sans violer l'article 562 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que la cour d'appel a constaté que le jugement du juge des loyers en date du 1er juillet 1999, "qui a fixé les loyers à compter du 1er juillet 1996 à un prix tel que la société Drouant considère pouvoir se prévaloir d'un trop-versé de loyers" avait été rendu postérieurement aux jugements entrepris ; qu'en déclarant la société Drouant irrecevable à contester la saisie et demander restitution des sommes versées pour son exécution, pour la première fois en cause d'appel, sans rechercher si le jugement du 1er juillet 1999 ne constitutait pas un fait survenu en cause d'appel, au sens de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de cette dernière disposition ;
3 / qu'en toute hypothèse, en s'abstenant de rechercher si les prétentions émises par la société Drouant dans son appel incident n'étaient pas recevables en ce qu'elles tendaient à faire écarter les prétentions du Gan, tendant, antérieurement au désistement des appelants et par suite à l'appel incident de la société Drouant, à ce que soit validée la saisie-attribution pratiquée entre les mains de cette dernière, la cour d'appel a privé l'arrêt attaqué de toute base légale au regard de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir accueilli la fin de non-recevoir tirée de la reconnaissance par le tiers saisi d'une dette de loyers à l'égard de la débitrice saisie, faite sans aucune réserve des modalités susceptibles de l'affecter et de l'exécution par celui-ci de la saisie dans les conditions prévues par l'article 71 du décret du 31 juillet 1992, la cour d'appel qui n'avait pas à statuer au fond retient, justifiant légalement sa décision, que le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux ne pouvait remettre rétroactivement en cause la saisie antérieurement pratiquée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Drouant aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Cofibis et Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille un.