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18/12/2001 | FRANCE | N°99-44642

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 décembre 2001, 99-44642


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Alcatel business System, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 23 juin 1999 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), au profit de M. Serge X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 novembre 2001, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, Mme Quenson, conse

iller, Mmes Maunand, Duval-Arnould, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat généra...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Alcatel business System, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 23 juin 1999 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), au profit de M. Serge X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 novembre 2001, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, Mme Quenson, conseiller, Mmes Maunand, Duval-Arnould, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de Me Hémery, avocat de la société Alcatel business system, les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. X... a été engagé, à compter du 2 septembre 1992, en qualité d'ingénieur conseil par la société DSF Opus Alcatel, devenue la société Alcatel business systems ; que sa rémunération comportait une partie fixe et une partie variable définie par un plan d'intéressement annuel ; qu'après avoir été muté à Bordeaux, il a exercé les fonctions d' account manager , secteur santé-social ; qu'il a signé le plan d'intéressement 1994 ; qu'il a été affecté à compter du 1er septembre 1995 au secteur armée-défense ; qu'il a refusé de signer le plan d'intéressement 1995 ; que par lettre du 31 octobre 1995, il a été licencié pour avoir refusé ledit plan d'intéressement ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Sur le premier moyen, en tant que dirigé contre le chef de décision ayant accueilli la demande du salarié en paiement d'un rappel de commissions sur l'année 1994 et, par voie de conséquence, des rappels d'indemnité de licenciement, de préavis et de congés payés :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / que, selon le plan de commissionnement de 1994, le tableau de répartition des primes pour les produits Data fixait, pour un objectif égal ou supérieur à 200 % une prime de commande de 1,90 P, une prime d'identification de projet de 0,26 P, et une prime de fidélisation ou référencement de 0,22 P dès que l'objectif atteignait 100 %, P étant égal au montant de la prime correspondant à une atteinte des objectifs à 100 %, et fixé à 90 000 francs et il était prévu, en outre, un coefficient accélérateur de 1,2 sur les primes du trimestre suivant dès et tant que l'objectif cumulé était dépassé ; que l'expert qui a reproduit ce tableau de commissionnement, qui a constaté que P était égal à 90 KF, et qu'il était prévu un coefficient accélérateur de 1,2 sur les primes du trimestre dès et tant que l'objectif cumulé était dépassé, a relevé que M. X... avait perçu, au titre de la prime Data, une prime de commande de 90 000 francs x 1,9 = 171 000 francs, une prime de

fidélisation ou de référencement de 90 000 francs x 0,22 = 19 800 francs, une prime d'identification de projet de 90 000 francs x 0,26 = 23 400 francs, ainsi qu'un accélérateur trimestriel égal à 21 870 francs ; qu'en énonçant que la société Alcatel business systems avait unilatéralement décidé de ne pas rémunérer la part supérieure à 200 % et que c'est à tort que l'expert avait conclu que les modalités de calcul avaient été normalement appliquées pour la réalisation d'un objectif égal ou supérieur à 200 %, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

2 / que le plan de commissionnement pour 1994, qui prévoyait pour les seuls produits Data, jusqu'à 200 % de réalisation des objectifs, une rémunération progressive, par tranche, et une rémunération fixe pour les résultats égaux ou supérieurs à 200 % des objectifs, prévoyait simplement que la direction étudierait les modalités de calcul des primes au-dessus de 200 % sans stipuler que les résultats au-dessus de 200 % feraient obligatoirement l'objet d'une rémunération distincte de celle prévue par le plan de commissionnement ; qu'en énonçant que la société Alcatel business systems s'était engagée sur le principe d'une telle rémunération et avait modifié unilatéralement le contrat de travail en ne faisant aucune proposition de fixation des primes au-delà de 200 %, la cour d'appel a violé derechef l'article 1134 du Code civil ;

3 / que la cour d'appel, qui s'est abstenue de rechercher si la société Alcatel business systems n'avait pas effectivement étudié la possibilité de rémunérer de manière spécifique les objectifs dépassant 200 % sans la retenir en raison de ce que les objectifs étaient communs au secteur tout entier, de sorte que leur réalisation ne dépendait pas exclusivement de l'activité d'une personne, ainsi qu'elle le faisait valoir dans ses conclusions, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

4 / que, dans ses conclusions d'appel, la société alcatel business systems avait souligné que la demande de rappel d'intéressement formée par M. X... au titre de l'année 1994, d'un montant de 221 400 francs portait à concurrence de 23 400 francs sur une prime d'identification d'objet qui lui avait été effectivement réglée ainsi qu'il résultait des constatations du rapport de l'expert ; qu'en énonçant, pour condamner la société Alcatel business systems à payer à M. X... l'intégralité des sommes réclamées, que leur évaluation n'était pas contestée, la cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que le plan d'intéressement 1994 mentionnait qu' au-dessus de 200 % de la réalisation de l'objectif, la direction étudiera les modalités de calcul de l'intéressement ; que c'est, dès lors, sans dénaturer le plan d'intéressement, que la cour d'appel a retenu que l'employeur s'était engagé à instituer un taux d'intéressement en cas de dépassement de plus de 200 % de la réalisation de l'objectif ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel, a relevé qu'en sa qualité d' account tous produits, tout service , le salarié n'avait pas un secteur d'activité déterminée au sein de la région aquitaine et qu'en conséquence, l'intéressement, auquel il avait droit portait sur l'ensemble de l'activité de cette région ;

Attendu, enfin, que la procédure étant orale, la constatation faite par l'arrêt, qui vaut jusqu'à inscription de faux, démontre qu'à l'audience, la société a renoncé à contester les modalités de calcul du rappel de commission ;

Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait, encore, grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié une somme à titre de rappel de commission sur l'année 1995 et, par voie de conséquence, des rappels d'indemnité de licenciement, de préavis et de congés payés, alors, selon le moyen :

1 / que, dans ses conclusions d'appel, la société Alcatel business systems contestait le bien-fondé de cette demande, faisant valoir que les objectifs quantitatifs de 40 MF prévus par le plan, dont M. X... avait lui-même souligné dans ses propres écritures qu'ils n'appelaient pas d'observation particulière, n'avaient pas été atteints, de sorte que la somme réclamée, correspondant au maximum de la prime prévue par le plan qui n'avait pas été atteint, n'était pas due ; qu'en énonçant que cette évaluation n'était pas contestée, la cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ;

qu'en faisant droit à la demande de paiement de la somme de 32 000 francs formée par M. X... au titre des commissions de l'année 1995 dues pour le secteur santé, sans justifier le bien-fondé de cette demande, contestée par la société Alcatel business systems, et chiffrée de manière seulement hypothétique par l'expert, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que l'expert avait précisément défini les commissions pour l'année 1995 et que le conseil de prud'hommes, en se fondant sur les conclusions de l'expert, avait exactement déterminé la partie variable de la rémunération du salarié pour l'année 1995 ; que sans méconnaître les limites du litige et par une décision motivée, elle a, ainsi, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen, qui est préalable :

Attendu que l'employeur fait de plus grief à l'arrêt d'avoir décidé que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1 / que la cassation, qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen de cassation privera de fondement les motifs de l'arrêt attaqué par lesquels la cour d'appel a considéré, pour juger le licenciement de M. X... dépourvu de cause réelle et sérieuse, que la société Alcatel business systems avait manqué à ses obligations contractuelles à son égard et entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt attaqué de ce chef, par application des dispositions de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que la lettre de licenciement imputait aux difficultés relationnelles opposant M. X... à sa hiérarchie son refus de signer son plan d'intéressement pour 1995 et la nécessité subséquente de le muter du secteur santé-social au secteur armée-défense, et de le licencier après qu'il ait, à nouveau, refusé de signer le plan d'intéressement proposé pour ce secteur, pour les derniers mois de l'année 1995 ; que la cour d'appel qui a énoncé que la société n'établissait pas l'imputabilité à M. X... des difficultés relationnelles existant entre lui-même et son supérieur hiérarchique, difficultés à l'origine de la mutation refusée par M. X... a mis à sa charge une preuve qui ne lui incombait pas et a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la modification tardive et unilatérale du plan d'intéressement 1995, qui détermine les modalités de la rémunération variable constituant un élément essentiel de la rémunération du salarié, caractérisait un abus de droit de l'employeur justifiant le refus du salarié de signer ledit plan d'intéressement, de sorte que le licenciement fondé sur ce refus était sans cause réelle et sérieuse ; que par ces seuls motifs, elle a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que l'employeur fait, en outre, grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement de dommages-intérêts pour "perte de chance du salarié", alors, selon le moyen, que, dans ses conclusions d'appel, la société Alcatel business systems avait fait valoir que la clause de mobilité inscrite dans le contrat de travail de M. X... s'opposait à ce qu'il puisse prétendre à une rémunération supplémentaire pour perte de chance, pour un travail qu'il n'avait pas réalisé et qui concernait des commandes prises dans un secteur qu'il avait quitté, une rémunération variable lui ayant, en outre, été versée pour cette même période sur la base de l'intéressement versé au cours des douze mois précédents ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant décidé que la mutation du salarié du secteur santé-social au secteur armée-défense avait pour cause son refus de signer le plan d'intéressement 1995, motif invoqué de son licenciement, que, par un chef de décision devenu irrévocable, elle a jugé sans cause réelle et sérieuse et ayant estimé que la somme, qui lui avait été versée à titre de rémunération variable, ne réparait pas intégralement son préjudice résultant de la cessation de ses fonctions dans le secteur santé-social, la cour d'appel a répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que l'employeur fait, enfin, grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement d'une somme à titre de remboursement de frais pour le premier trimestre 1993, alors, selon le moyen :

1 / qu'ayant constaté l'existence d'un accord verbal relatif à un remboursement exceptionnel des frais afférents aux trajets entre le domicile et le lieu de travail jusqu'en février 1993, ce dont il résultait l'existence d'un accord limité dans le temps, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé la société Alcatel business systems liée par cet accord jusqu'au terme du premier trimestre 1993, n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement et a violé l'article 1134 du Code civil ;

2 / que dans ses conclusions d'appel, la société Alcatel business systems avait fait valoir qu'elle avait remboursé à M. X... ses frais de trajet et de déplacement des mois de janvier et de février 1993 à concurrence des sommes respectivement de 10 817,77 francs et de 9 220,60 francs, après avoir opéré un contrôle des notes de frais présentées par M. X..., qui paraissaient très exagérées, et avoir notamment refusé de lui régler des indemnités forfaitaires de repas lorsqu'il n'était pas en déplacement ; qu'en condamnant la société à rembourser à M. X... des frais pour la même période sans répondre à ce chef de ses conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que, dans ses conclusions d'appel, la société Alcatel business systems avait fait valoir que M. X... n'avait adressé et n'avait justifié d'aucun décompte de frais pour le mois de mars 1993 ; qu'en condamnant la société à rembourser à M. X... des frais couvrant cette période sans répondre à ce chef de ses conclusions, la cour d'appel a, derechef, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'après avoir constaté, d'une part, que l'employeur avait pris en charge les frais de déplacement en vertu d'un accord verbal pour les mois de janvier et février 1993, et que, d'autre part, la longueur des déplacements domicile-lieu de travail n'avait pris fin qu'à l'expiration du premier trimestre 1993, la cour d'appel a fait ressortir que l'employeur avait accepté tacitement d'en prolonger la prise en charge pour le mois de mars 1993 ;

Attendu, ensuite, qu'en ayant déterminé le montant des frais de déplacement, la cour d'appel a répondu aux conclusions invoquées ;

Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Alcatel business system aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille un.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 99-44642
Date de la décision : 18/12/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), 23 juin 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 déc. 2001, pourvoi n°99-44642


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WAQUET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:99.44642
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