AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre décembre deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY, les observations de la société civile professionnelle VINCENT et OHL, et de Me JACOUPY, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 1er février 2001, qui, pour mauvais traitements à animaux domestiques, l'a condamné à 18 amendes de 500 francs chacune, a ordonné la remise des chevaux à une oeuvre de protection animale, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par le mémoire personnel, pris de la violation des articles R.654-1 du Code pénal et 591 du Code de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation du respect des droits de la défense, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 531 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a, par confirmation du jugement dont appel, déclaré Paul X... coupable de la contravention réprimée par l'article R. 654-1, alinéas 1 et 2, du Code pénal et, en répression, l'a condamné au paiement de dix-huit amendes de 500 francs chacune, ainsi qu'à la remise de l'ensemble des dix-huit chevaux restant lui appartenait à la Ligue Française de Protection du Cheval ;
"aux motifs que "ainsi que l'a relevé le tribunal, le dossier photographique établi par les gendarmes et les déclarations recueillies permettent d'établir que 18 chevaux appartenant à Paul X... ont été laissés dans des conditions d'abandon qui constituent l'infraction visée à l'article R. 654-1 du Code pénal ; les éléments récents, dont la Cour n'est pas saisie mais dont elle est informée par la partie civile, montrent que cet état d'abandon s'est perpétué au point de nécessiter une intervention du préfet ; cette situation n'est pas surprenante dès lors que Paul X..., qui habite en HLM, dispose de revenus très faibles, ne lui permettant pas d'assurer, dans des conditions sanitaires adaptées, l'entretien d'un tel cheptel ; le prévenu n'apporte aucun élément permettant de penser qu'il sera mieux à même, à l'avenir, d'entretenir les animaux survivants, les références à un passé relativement lointain au cours duquel il aurait été reconnu apte à l'élevage des chevaux n'étant en l'espèce d'aucun effet ; la déclaration de culpabilité sera confirmée ;
s'agissant de la peine, il apparaît, précisément en raison de l'impécuniosité de Paul X..., que la somme mise à sa charge par le tribunal est excessive, et la Cour fixera à 500 francs chacune des amendes ; en revanche, il apparaît conforme à l'intérêt des animaux concernés de faire droit à la demande de la partie civile en ordonnant, ainsi que le prévoit le 2ème alinéa de l'article R. 654-1 du Code pénal qui fonde les poursuites, la remise des 18 chevaux à la Ligue Française de Protection du Cheval, qui pourra librement en disposer (arrêt attaqué, page 4) ;
"alors que les tribunaux de police ne peuvent statuer que sur les faits relevés par la citation qui les a saisis ; qu'en condamnant le prévenu à dix-huit amendes et à la remise des dix-huit chevaux restant lui appartenir à la Ligue Française de Protection du Cheval quand il résulte du dossier que celui-ci avait été cité devant le tribunal de police pour mauvais traitements infligés sans nécessité à un animal domestique apprivoisé ou captif équidé et sans qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Paul X... aurait accepté d'être jugé sur des faits distincts de ceux résultant de la prévention, la cour d'appel, qui a excédé les limites de sa saisine, a méconnu le principe ci-dessus rappelé" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des faits reprochés et le condamner, notamment, à 18 amendes, l'arrêt énonce que Paul X... a laissé 18 chevaux parqués dans des landes, sans surveillance, sans eau propre ni complément d'alimentation, et sans soins vétérinaires ; qu'en particulier une jument est morte en mettant bas ; qu'un poulain, affaibli et blessé, a succombé ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que la citation, délivrée pour "mauvais traitements infligés, sans nécessité, à un animal domestique, apprivoisé ou captif", précise que l'infraction concerne des "équidés", au pluriel, les juges, qui n'ont pas excédé leur saisine, ont, sans insuffisance, caractérisé les contraventions ; qu'en effet, l'article R.654-1 du Code pénal réprime les mauvais traitements, même s'ils résultent d'abstentions, dès lors que leur auteur ne justifie d'aucun empêchement légitime ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Mais sur le second moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation de l'article 751 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a fixé la contrainte par corps conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale ;
"alors que la contrainte par corps ne peut être prononcée contre les personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans au moment de la condamnation, en sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, bien qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Paul X... était âgé de plus de soixante-cinq ans au moment de la condamnation, pour être né le 6 janvier 1931, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 751 du Code de procédure pénale" ;
Vu l'article 751 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, la contrainte par corps ne peut être prononcée contre les personnes âgées d'au moins 65 ans au moment de la condamnation ;
Attendu qu'après avoir déclaré Paul X... coupable de mauvais traitements à animal, les juges d'appel le condamne notamment à des peines d'amende et fixe la durée de la contrainte par corps conformément à la loi ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que, selon les mentions de l'arrêt attaqué, le prévenu était âgé de 70 ans au moment de sa condamnation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 1er février 2001, en ses seules dispositions ayant prononcé, à l'encontre de Paul X..., la contrainte par corps, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DECLARE IRRECEVABLE la demande au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale présentée par l'Association Lotoise de Défense des Equidés après le dépôt du rapport du conseiller rapporteur ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Dijon, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Gailly conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;