AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par le Préfet de Police de Paris, domicilié Préfecture de Police, Direction de la Police générale, 8e bureau, ...,
en cassation d'une ordonnance rendue le 25 novembre 2000 par le premier président de la cour d'appel de Paris, au profit de Mlle Suwanna X..., alias Miou A M Y..., sans domicile certain,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 23 octobre 2001, où étaient présents : M. Buffet, président, M. Trassoudaine, conseiller référendaire rapporteur, M. Guerder, conseiller doyen, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Trassoudaine, conseiller référendaire, les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, tel que modifié par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 ;
Attendu que le délai de 5 jours de prolongation du maintien en rétention peut être prorogé d'une nouvelle durée maximale de 5 jours par ordonnance du président du tribunal de grande instance lorsque l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement résulte de la dissimulation par l'intéressé de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que Mlle X..., ressortissante thaïlandaise séjournant irrégulièrement sur le territoire français, a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière et de placement en rétention administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; qu'un premier président a prolongé cette rétention pour une durée de 5 jours ; que sur la requête du préfet de Police de Paris visant l'impossibilité d'exécuter la mesure par suite de la dissimulation de l'identité de l'étrangère et de l'obstruction volontaire à son éloignement, un juge délégué a ordonné la prorogation du délai de rétention pour une nouvelle durée de 5 jours ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à prorogation de la rétention, l'ordonnance retient qu'en application de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le délai de 5 jours peut être prorogé d'une durée maximale de 72 heures lorsque l'étranger n'a pas présenté à l'autorité administrative un document de voyage et que des éléments de fait montrent que ce délai est de nature à permettre l'obtention du document ; que c'est à tort que le préfet de Police a considéré que Mlle X... dissimulait son identité puisqu'elle a déclaré dès le début de sa garde à vue l'identité dont elle fait preuve par la présentation d'un passeport à l'audience de ce jour ; qu'en tout état de cause, l'argumentaire présenté par l'autorité administrative pour solliciter la prorogation de la rétention démontre qu'aucun élément ne lui permettait de penser qu'un délai supplémentaire serait de nature à permettre l'obtention de ce document ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants se rattachant à une rédaction du texte précité antérieure à celle applicable, issue de la loi du 11 mai 1998, et alors que Mlle X... séjournait en France sans détenir, comme elle y était obligée, son passeport, lequel n'a, selon les propres énonciations de l'ordonnance, été produit qu'à l'audience d'appel, et que le préfet de Police avait été contraint, du fait de l'étrangère, d'effectuer des démarches auprès de l'ambassade de Thaïlande pour obtenir la délivrance d'un laissez-passer, ce dont il résultait que l'intéressée avait volontairement fait obstruction à la mesure d'éloignement, le premier président a, par fausse application, violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 25 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille un.