Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 21 septembre 1999) que le comité d'entreprise de la société Benoist Girard a désigné le Cabinet d'expertise société Syndex pour l'assister dans l'examen des comptes annuels de 1995 et des documents prévisionnels de l'exercice 1996 ; que la société Syndex a demandé la communication de divers documents ; que la société a répondu que cette communication était impossible pour certains documents qui étaient inexistants et qu'elle n'était pas justifiée pour les autres ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé la société Syndex, expert-comptable désigné par le comité d'entreprise de la société en commandite par actions Benoist Girard (Hérouville-Saint-Clair, Calvados) à se faire communiquer sous astreinte de 1 000 francs par jour de retard, par ladite entreprise :
- les ventes consolidées de la division Howmedica par grandes familles (de produits) en Europe et dans le monde ; - l'évaluation des stocks des produits de la division Howmedica, par grandes familles de produits, à la fin de l'année 1994 et à la fin de l'année 1995 ; - les résultats consolidés de la même division, pour 1994 et 1995, ainsi que les prévisions pour 1996, pour l'Europe et le monde, en ventilant entre ventes, marge brute et bénéfices d'exploitation ; - l'évolution du marché européen et du marché mondial pour la reconstruction et la traumatologie, par grandes familles de produits, en 1995 et l'évolution prévue à moyen terme ; - la position du groupe Howmedica sur les différents marchés mondiaux et la position, connue, de la concurrence sur ces mêmes marchés ; - les investissements par sites, en 1994 et 1995, en Europe et dans le monde ; - les effectifs par sites industriels et commerciaux en 1994 et 1995 ; - la description des fabrications actuelles par sites industriels et dans le monde ; - les projets de réorganisation du groupe au niveau mondial, avec conséquences sur le plan industriel pour les différents sites de la division (en décrivant les fabrications projetées sur ces sites), alors, selon le moyen :
1° que les investigations du commissaire aux comptes prévues par l'article 229 de la loi du 24 juillet 1966, qui servent de limite à celles de l'expert-comptable du comité d'entreprise, sont diligentées " tant auprès de la société que des sociétés mères ou filiales " ou auprès de l'ensemble des entreprises comprises dans la consolidation ; que, dès lors, viole nécessairement le texte susvisé ainsi que les articles L. 434-6 et L. 439-1 du Code du travail, l'arrêt attaqué qui dispense l'expert-comptable d'effectuer lui-même ses investigations " auprès " de l'ensemble des entreprises susvisées et qui condamne personnellement et sous astreinte, une filiale française, la société Benoist Girard d'Hérouville-Saint-Clair, à procurer à l'expert de son comité d'établissement l'ensemble des documents intéressant notamment des ventes consolidées de la " division Howmédica " en Europe et dans le monde, des résultats consolidés de la " même division " et la position du " groupe Howmedica " sur les différents marchés mondiaux ainsi que les investissements par site en Europe et dans le monde ;
2° que prive sa décision de toute base légale au regard des articles 228, 229 de la loi du 24 juillet 1966, L. 434-6 et L. 439-2 du Code du travail, l'arrêt attaqué, qui ordonne la communication à l'expert du comité d'entreprise de la société française Benoist Girard, de documents intéressant la " division Howmedica " et le " groupe au niveau mondial " et qui, s'abstenant de rechercher s'il existe une relation de maison mère à filiales entre les différentes entités ainsi visées et la société exposante et de définir, en Europe ou dans le monde, le périmètre de consolidation de la prétendue " division " qui autoriserait de telles investigations, laisse totalement indéterminé le cadre légal dans lequel se déroule la mission de l'expert-comptable ;
3° qu'à supposer même que les différentes entités concernées par de prétendues " ventes " ou " comptes consolidés " aient été suffisamment déterminées par les juges du fond, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître le principe de la territorialité du droit du travail et sans violer les articles 1er du Code civil, L. 439-1, L. 439-2, L. 434-6 du Code du travail et 228 de la loi du 24 juillet 1966, ordonner la communication de documents autres que ceux éventuellement détenus par la société dominante du groupe français, société dominante dont l'arrêt ne mentionne pas l'existence et qu'il s'abstient d'identifier ;
Mais attendu qu'en application de l'article L. 434-6 du Code du travail, la mission de l'expert-comptable porte sur tous les documents d'ordre économique, financier ou social nécessaires à l'intelligence des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ;
Attendu que la cour d'appel a relevé que la société Benoist Girard était une société captive du groupe Division Howmedica ; qu'ayant exactement rappelé que l'expert-comptable avait, comme le commissaire aux comptes, accès aux comptes et documents des sociétés mère ou filiales et qu'aucun élément ne permettait d'établir que la société Benoist Girard, société de droit français, n'était pas en mesure de recueillir les informations relatives aux entreprises du groupe situées sur le territoire d'un autre pays, elle a pu décider que ces informations devaient être communiquées au comité d'entreprise ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir autorisé la société Syndex, expert-comptable désigné par le comité d'entreprise de la société en commandite par actions Benoist Girard (Hérouville-Saint-Clair, Calvados) à se faire communiquer sous astreinte de 1 000 francs par jour de retard, par ladite entreprise, les mêmes documents, alors, selon le moyen :
1° que ne justifie pas légalement sa décision en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué, qui fait droit à la demande de communication du Cabinet Syndex aux motifs hypothétiques et incontrôlables des premiers juges, que la communication des résultats consolidés pour le monde " ne paraît pas insurmontable " (jugement p. 4, dernier alinéa), que la communication des stocks de la division peut " techniquement être satisfaite " (jugement p. 4, al. 5), que la description des fabrications en Europe et dans le monde peut être consultée sans problème " particulier " (jugement p. 5, al. 6), que la demande concernant les effectifs par site est " purement mathématique " (jugement p. 5, al. 5), que certains documents auraient pu être communiqués par le passé (jugement p. 4, al. 4 et p. 5, al. 1 et 2) et que les documents concernant le projet d'organisation mondiale peuvent être " élaborés pour les besoins de la cause " (jugement p. 5, al. 7) ;
2° que l'expert-comptable ne peut pas exiger la production de documents qui n'existent pas ou dont l'établissement n'est pas obligatoire dans l'entreprise eussent-ils été établis par le passé ; qu'en décidant d'une part, que les documents revendiqués étaient " disponibles " (arrêt p. 8, al. 2) et, d'autre part, qu'ils " nécessitaient des recherches et des études pouvant être relativement longues " (jugement p. 6 al. 2) ce qui a amené les premiers juges puis la cour d'appel à reculer le point de départ de l'astreinte de six mois, la décision attaquée a mis à la charge de la société la confection de documents en violation de l'article L. 434-6 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a ordonné la communication de documents dont elle a constaté, par motifs adoptés des premiers juges, qu'ils existaient et qu'ils avaient fait l'objet de communications pour les exercices antérieurs ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.