AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Ventmeca, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 25 janvier 2000 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre), au profit de M. Alain X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 25 septembre 2001, où étaient présents : M. Weber, président, M. Martin, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Villien, Cachelot, Mme Lardet, conseillers, Mmes Fossaert-Sabatier, Boulanger, conseillers référendaires, M. Guérin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la société Ventmeca, les conclusions de M. Guérin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 janvier 2000), que la société Ventmeca, ayant fait installer dans son usine des générateurs d'air chaud, a chargé M. X... de l'alimentation en fuel et de l'évacuation des fumées ; que la rupture d'un filtre et la défaillance d'une électro-vanne fournie par celui-ci ont entraîné un écoulement de fuel dans une rivière alimentant la pisciculture des époux Y..., que la société Ventmeca a été condamnée à indemniser ; que la société Ventmeca a assigné M. X... en garantie de cette condamnation ;
Attendu que la société Ventmeca fait grief à l'arrêt de retenir la responsabilité de M. X... sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, alors, selon le moyen :
1 / que constitue un travail de construction le travail qui fait appel aux "techniques de bâtiment" , telle la réalisation d'une installation de chauffage comportant une chaudière équipée d'un brûleur et d'une pompe à chaleur ; qu'en ne recherchant pas dès lors, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions de la société Ventmeca, si le travail de M. X... faisait appel aux techniques du bâtiment et ne constituait pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
2 / qu'aucune disposition légale ne limite la responsabilité de plein droit des locateurs d'ouvrage au cas où ils ont réalisé seuls l'installation défectueuse ; qu'en écartant dès lors la garantie légale de l'entreprise X..., dont il est acquis qu'elle avait participé à l'installation défectueuse, sous la considération qu'aucune société n'avait été chargée de "l'installation globale", la cour d'appel, qui y a ajouté une condition qui n'y figure pas, a violé par fausse interprétation l'article 1792 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les différents éléments de l'installation de chauffage avaient fait l'objet de commandes distinctes et directes de la société Ventmeca à diverses sociétés, dont aucune n'avait assumé l'installation globale, et que M. X... n'avait été chargé que de la mise en oeuvre de l'alimentation en fuel des générateurs et de l'évacuation des fumées, la cour d'appel a pu déduire, de ces seuls motifs et sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, qu'il n'avait pas réalisé un travail de construction et que sa responsabilité devait être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle de l'article 1147 du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société Ventmeca en garantie de sa condamnation par M. X..., l'arrêt retient que les dommages éprouvés par les époux Y... ne pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le recours en garantie des condamnations prononcées contre la société Ventmeca au profit des époux Y... qu'elle a indemnisés, trouvant sa source dans le dommage causé à des tiers au contrat la liant à M. X..., ne pouvait avoir qu'un fondement quasi-délictuel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la société Ventmeca de sa demande en garantie par M. X... des condamnations prononcées contre elle au profit des époux Y..., l'arrêt rendu le 25 janvier 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille un.