AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MARIN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La SOCIETE PETER HENNEN, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de METZ, en date du 7 septembre 2000, qui, dans l'information suivie contre François X... du chef d'escroquerie, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de non-lieu partiel rendue par le juge d'instruction ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 6 , du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le troisième moyen de cassation , pris de la violation des articles 198, 802, 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe du contradictoire et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable le mémoire adressé par la partie civile au greffe de la chambre d'accusation et reçu le 17 août 2000 ;
"aux motifs que le mémoire adressé au greffe de la chambre d'accusation par lettre simple et reçu le 17 août 2000, doit être déclaré irrecevable comme ne répondant pas aux prescriptions de l'article 198 du Code de procédure pénale (arrêt attaqué, p. 2, avant-dernier ) ;
1 )"alors que, en relevant d'office un moyen d'irrecevabilité du mémoire tiré d'une irrégularité de forme, sans inviter la partie civile à en discuter, la chambre d'accusation a violé les textes et principes susvisés ;
2 )"alors que, au reste, est valable le mémoire adressé au greffier de la chambre de l'instruction par lettre simple, pourvu que ce mémoire ait été signé, et que le greffier l'ait reçu et visé avant le jour de l'audience ; qu'en l'espèce, en relevant d'office l'irrecevabilité du mémoire "de Me Y..., avocat à Strasbourg, au nom de la partie civile", au prétexte qu'il aurait été communiqué "par lettre simple", tout en reconnaissant que ce mémoire avait été reçu au greffe le 17 août 2000 pour une audience fixée au 7 septembre 2000, et qu'il avait été "régulièrement visé" par le greffier, la chambre d'accusation a violé les textes et principes susvisés" ;
Attendu que les juges ont, à bon droit, sans méconnaître ni le principe du contradictoire ni les dispositions conventionnelles invoquées par le moyen, écarté comme irrecevable le mémoire adressé au greffe de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Metz, par lettre simple, par l'avocat de la partie civile, inscrit au barreau de Strasbourg ;
Qu'en effet, lorsque l'avocat n'exerce pas dans la ville où siège la chambre d'accusation, l'article 198, alinéa 3, du Code de procédure pénale ne l'autorise à envoyer des mémoires que par télécopie ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 186, 502, 503 et 591 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel formé par la société Peter Hennen ;
"aux motifs qu'il résulte des articles 186, 502 et 503 du Code de procédure pénale que l'appel doit être formé dans les dix jours qui suivent la notification de la décision attaquée par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée ; qu'en l'espèce, l'appel formé le 6 juillet 2000 contre l'ordonnance de non-lieu rendue le 23 juin 2000 par le magistrat instructeur et notifiée par lettre recommandée envoyée à la partie civile et à son avocat le même jour accompagnée de la décision rendue, apparaît manifestement irrecevable comme étant hors délai (arrêt attaqué, p. 2 et 3) ;
"alors que, si la notification d'une ordonnance de règlement est faite par lettre recommandée, le délai d'appel commence à courir le lendemain de la date d'envoi de la lettre ;
qu'en l'espèce, il résulte du cachet de la poste faisant foi (production) que l'ordonnance entreprise a été notifiée par lettre recommandée envoyée le 27 juin 2000 ; qu'en retenant que cette lettre avait été envoyée le 23 juin 2000, pour juger tardif l'appel formé le 6 juillet 2000, la cour d'appel a dénaturé ladite lettre, et violé les textes visés au moyen" ;
Attendu qu'en déclarant irrecevable comme tardif, l'appel interjeté le 6 juillet 2000 par la société Peter Hennen, partie civile, de l'ordonnance du juge d'instruction qui lui avait été notifiée le 23 juin 2000, les juges ont fait l'exacte application de la loi ;
Que les mentions de l'ordonnance figurant sous la signature du greffier attestent de l'envoi en copie de cette décision tant à la partie civile qu'à son avocat par lettre recommandée, le 23 juin 2000, faisant courir à cette date, conformément à l'article 183 du Code de procédure pénale, le délai prévu par l'article 186 dudit Code ;
Qu'au demeurant, la société Peter Hennen n'a pas allégué qu'un obstacle insurmontable l'aurait mise dans l'impossibilité d'exercer son recours dans le délai légal ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en ce qu'il se fonde sur une pièce nouvelle non soumise aux juges du fond, doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 186, 502, 503 et 591 du Code de procédure pénale, du principe du contradictoire, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel formé par la société Peter Hennen ;
"aux motifs qu'il résulte des articles 186, 502 et 503 du Code de procédure pénale que l'appel doit être formé dans les dix jours qui suivent la notification de la décision attaquée par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée ; qu'en l'espèce, l'appel formé au greffe d'instruction apparaît manifestement irrecevable comme ne respectant pas les dispositions susvisées (arrêt attaqué, p. 2 et 3) ;
1 )"alors que, en relevant d'office le moyen d'irrecevabilité tiré de l'irrégularité de l'appel, en ce que celui-ci aurait été formé "au greffe d'instruction", sans inviter les parties à en débattre préalablement et contradictoirement, la chambre d'accusation a violé les articles et principes susvisés ;
2 )"alors que, la déclaration d'appel contre une ordonnance de règlement du juge d'instruction peut être faite à toute personne qui en a été chargée et qui a spécialement reçu délégation à cet effet du greffier en chef du tribunal auquel appartient le juge d'instruction ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé "au greffe d'instruction", sans s'expliquer davantage sur la qualité et les pouvoirs de la personne qui avait reçu cet appel, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés" ;
Attendu que ce moyen est devenu inopérant par suite du rejet du premier moyen ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Mazars conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Marin ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;