AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Imprimerie IBP, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., parc d'activités, Les Radars, 91700 Fleury Z...,
en cassation d'un arrêt rendu le 31 août 1999 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section A), au profit de Mme Françoise Y..., demeurant ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 juillet 2001, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Soury, conseiller référendaire rapporteur, M. Texier, Mme Lemoine Jeanjean, conseillers, Mme Maunand, conseiller référendaire, M. Benmakhlouf, premier avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Soury, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Imprimerie IBP, les conclusions de M. Benmakhlouf, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que Mme Y... a été engagée le 9 mai 1990 par la société Imprimerie IBP en qualité de papetière ; qu'à la suite d'un accident du trajet survenu le 11 octobre 1994, elle a bénéficié d'un arrêt maladie ; qu'elle a été licenciée par lettre du 30 novembre 1995 au motif que son absence prolongée perturbait le bon fonctionnement de l'entreprise ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et des rappels de rémunération ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 31 août 1999) de l'avoir condamné à payer à la salariée des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1 / que procède d'une cause réelle et sérieuse le licenciement d'un salarié dont l'absence prolongée a perturbé le bon fonctionnement de l'entreprise, dès lors que la mesure intervient pendant la période de suspension du contrat de travail de l'intéressé ; que le médecin qui a examiné Mme Y... à sa reprise du travail ne lui avait délivré qu'un avis d'aptitude provisoire, à charge pour la salariée de se représenter à une seconde visite afin que soit ou non constatée son aptitude définitive au travail ; que le fait pour Mme Y... de ne pas se présenter à cette seconde visite a provoqué ipso facto une nouvelle suspension de son contrat de travail ; qu'en conséquence, et compte tenu du fait que la seconde visite médicale était fixée au 29 novembre 1995, le contrat de travail de Mme Y... était de nouveau suspendu à la date de son licenciement, intervenu le 30 novembre 1995 ; qu'en décidant pourtant du contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 241-51 du Code du travail ainsi que l'article 207 de la convention collective nationale des imprimeries de labeur et industries graphiques ;
2 / que le licenciement d'un salarié pour absence prolongée est doté d'une cause réelle et sérieuse dès lors que cette absence a perturbé le bon fonctionnement de l'entreprise et qu'il a été procédé au remplacement effectif du salarié licencié ; qu'afin de suppléer à l'absence de Mme Y..., la société Imprimerie IBP a, dès le mois de janvier 1995, procédé à l'embauche de Mlle X... par contrat à durée déterminée ;
qu'au mois de mai 1996, soit près de six mois après le licenciement de Mme Y..., Mlle X... était toujours rémunérée par la société, et ce au titre d'une qualification professionnelle identique à celle qui lui avait été attribuée lors de son recrutement initial ; qu'en l'état de ces constatations - et compte tenu du fait que la poursuite d'une relation de travail postérieurement à l'échéance du terme démontre sans conteste la volonté des parties d'instaurer entre elles un rapport de travail sans détermination de durée - la relation de travail existant entre Mlle X... et la société ne pouvait procéder que d'un contrat à durée indéterminée ; qu'en estimant cependant que la société Imprimerie IBP ne démontrait pas avoir remplacé définitivement Mme Y..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant par-là même l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que, si l'article L. 122-45 du Code du travail, qui fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même Code, ne s'oppose pas à son licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la salariée avait été déclarée apte à reprendre son travail lors de la visite médicale de reprise du travail du 22 novembre 1995 a décidé, à bon droit, qu'en l'absence de délivrance d'un nouveau certificat médical prescrivant un arrêt de travail, le contrat de travail, à la date du licenciement, n'était pas suspendu, ce dont il résultait que l'employeur ne se trouvait pas dans la nécessité de procéder au remplacement définitif de la salariée ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Imprimerie IBP aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille un.