AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X...,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 septembre 1999 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), au profit de la Y..., dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
La société Y..., venant aux droits de la société Y... industrie, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 11 juillet 2001, où étaient présents : M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bailly, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, M. Frouin , conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bailly, conseiller, les observations de la SCP Richard et Mandelkern, avocat de la société Y..., venant aux droits de la société Y... industrie, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Reims, 22 septembre 1999), M. X... a été engagé en 1977 par la société Y..., ensuite absorbée par la société Y... ;
qu'alors qu'il exerçait depuis le mois de novembre 1990 les fonctions de responsable expédition de nuit, M. X... a été convoqué le 9 septembre 1994 à un entretien préalable et mis à pied à titre conservatoire, puis licencié le 14 septembre suivant pour faute grave, en raison de soustractions de marchandises commises les 3, 4 et 5 août 1994 ; qu'il a alors saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages et intérêts, de salaires et d'indemnités de préavis et de licenciement ;
Sur le moyen unique du pourvoi de M. X... :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes en paiement de dommages et intérêts alors, selon le moyen, que les faits de vols de marchandises n'étaient pas établis, que la cour d'appel avait dénaturé les faits et que sa décision résultait d'une confusion entre les bons de remis et les carnets de bons de remis non probants ;
Mais attendu, d'une part, que la dénaturation des faits ne constitue pas un cas d' ouverture à cassation, d'autre part, que le moyen ne tend pour le surplus qu'à remettre en discussion les éléments de fait et de preuve que le juge du fond a souverainement appréciés ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Y... :
Attendu que la société Y... fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que M. X... n'avait pas commis de faute grave en se livrant à plusieurs vols à son préjudice et de l'avoir en conséquence condamnée à payer des indemnités de préavis et de licenciement, alors selon le moyen, que la seule circonstance du retard prétendu dans le prononcé du licenciement ne peut priver l'employeur du droit d'invoquer l'existence d'une faute grave et qu'en décidant néanmoins que le fait, pour la société Y..., d'avoir attendu un mois après la commission des faits avant de mettre en oeuvre la procédure de licenciement, excluait nécessairement la qualification de faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté, d'une part, que, bien qu'elle ait eu connaissance des faits énoncés dans la lettre de licenciement dès les 5 et 6 août 1994, la société Y... n'avait engagé la procédure de licenciement que plus d'un mois après et, d'autre part, qu'aucune vérification n'était nécessaire, la cour d'appel a pu en déduire que ces faits n'étaient pas de nature à rendre impossible la poursuite du contrat pendant la durée du préavis et ne pouvaient ainsi constituer une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille un.