AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / Mme Raymonde Z..., veuve X...
A..., demeurant ...,
2 / Mme Nadia A..., épouse Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 juin 1999 par la cour d'appel de Versailles (4e Chambre civile), au profit :
1 / de M. Hervé C..., demeurant ...,
2 / du syndicat des copropriétaires du ..., pris en la personne de son syndic en exercice, le Cabinet Biennait, dont le siège social est ...,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 juillet 2001, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Gabet, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Toitot, Bourrelly, Mme Stéphan, MM. Peyrat, Dupertuys, Philippot, Assié, conseillers, M. Betoulle, Mme Nési, conseillers référendaires, M. Guérin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Gabet, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat des consorts A..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. C..., de la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat du syndicat des copropriétaires du ..., les conclusions de M. Guérin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 juin 1999), que les consorts A... ont vendu à M. C... un appartement en copropriété ; que M. C... a sollicité l'annulation de la vente pour dol ;
Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de prononcer la nullité de la vente, alors, selon le moyen :
1 / que les époux A... faisaient seulement valoir dans leurs écritures d'appel, sans prétendre ignorer les problèmes d'inondations, connus épisodiquement depuis 1981, ni affirmer que M. C... en avait été informé par la société Demeure, qu'ils avaient pu croire de bonne foi que les nombreux travaux effectués étaient suffisants et qu'ils n'avaient pu penser en aucune façon que leur appartement était inhabitable, comme l'a dit l'expert, et que s'ils avaient eu une quelconque intention de tromper l'acquéreur, ils n'auraient pas mandaté comme intermédiaire la société Demeure, syndicat des copropriétaires ; qu'ils énonçaient seulement que celle-ci leur avait "affirmé avoir informé M. C... de ces précédentes inondations" ; qu'en affirmant, dès lors, pour retenir l'intention dolosive des époux A..., que ceux-ci "soutiennent tout à la fois qu'ils ignoraient cette situation et que leur mandataire aurait averti l'acquéreur de la difficulté", la cour d'appel a dénaturé les conclusions prises et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que le dol suppose l'intention de tromper ; qu'en se bornant à relever que "les époux B... et leur mandataire ont caché" la situation à M. C..., sans caractériser davantage l'intention de tromper qui les aurait animés, que même "une certaine mauvaise foi" n'aurait pu constituer, et sans rechercher si la croyance qu'ils avaient pu avoir de l'efficacité des travaux déjà effectués et de la véracité de l'affirmation de la société Demeure, leur mandataire, selon laquelle elle avait informé M. C..., n'était pas fondée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que, dans leurs conclusions, les consorts A... soutenaient à la fois qu'ils n'avaient pas eu connaissance des inondations et dégâts des eaux survenus en 1981-1982 et en 1992 dans l'appartement en copropriété par eux vendu à M. C... le 20 avril 1993 et que leur mandataire aurait averti l'acquéreur de ces difficultés, que les inondations concernaient les lots du rez-de-chaussée et les parties communes, que les époux A... étaient régulièrement convoqués aux assemblées générales et informés des travaux réalisés en 1984 et 1993 et que le dernier locataire avait donné congé à la suite de l'inondation de 1992 ayant rendu les lieux inhabitables, la cour d'appel a pu en déduire, sans dénaturation et sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, que les vendeurs s'étaient rendus coupables d'un dol ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de rejeter leur appel en garantie formé à l'encontre du syndicat des copropriétaires, alors, selon le moyen :
1 / que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que les époux A... invoquaient expressément, dans leurs écritures d'appel, la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 ;
qu'en décidant que cette question n'était pas dans le débat, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'en opposant aux époux A... un véritable déni de justice, la cour d'appel a violé ensemble l'article 4 du Code civil et, par refus d'application, l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le syndicat des copropriétaires était tiers à la vente et qu'il n'était pas intervenu dans les négociations, la cour d'appel en a exactement déduit que l'appel en garantie, qui ne pouvait être fondé que sur le dol, devait être rejeté ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les intérêts ne sont dus que du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent ;
Attendu que pour condamner les époux A... à la restitution du prix augmentée des intérêts au taux légal au jour de la vente et au paiement des accessoires avec intérêts à la date des versements effectifs, l'arrêt retient que la nullité de la vente produit un effet rétroactif au jour de sa réalisation ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné les époux A... au paiement des intérêts au taux légal, sur le prix de vente, à compter de l'acte de vente, et sur les accessoires, à compter des paiements effectifs, l'arrêt rendu le 29 juin 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de M. C... et du syndicat des copropriétaires du ... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du dix octobre deux mille un par Mlle Fossereau, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile.