AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois octobre deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ARNOULD, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-en- PROVENCE, en date du 27 juin 2001, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction le renvoyant devant la cour d'assises des ALPES- MARITIMES sous l'accusation de viols, tentative de viol et agressions sexuelles aggravés ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de l'article 191 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction était composée de "Monsieur Le BOURDON, Président de Chambre de l'Instruction, Madame GREISS, Conseiller, Madame ROBIN, Conseiller" (p. 11) ;
"alors que l'exigence d'impartialité posée par l'article 6 de la Convention européenne fait obstacle à ce que le magistrat ayant eu à connaître déjà de l'affaire lors d'un recours contre une ordonnance du juge d'instruction se prononce ensuite sur l'appel contre l'ordonnance de mise en accusation ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction, lors de l'appel contre l'ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté la demande de mise en liberté de X... ayant abouti à l'arrêt du 11 janvier 2001 était composée de "Monsieur Le BOURDON, Président de Chambre de l'Instruction, Madame GREISS, Conseiller, Madame ROBIN, Conseiller" (p. 7) ;
qu'en cet état ces magistrats ne pouvaient, ensuite connaître de l'appel contre l'ordonnance de mise en accusation sans que soit méconnu, objectivement, le principe d'impartialité ;
Attendu que l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme ne fait pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction connaisse successivement, dans la même composition, d'une demande de mise en liberté présentée par un mis en examen, puis de son renvoi devant la cour d'assises, aucune des deux décisions ainsi rendues ne préjugeant de la culpabilité ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-23, 222-24, 222-29, 222-31, 121-5 du Code pénal, 331, 332 de l'ancien Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'il résultait des charges suffisantes contre le mis en examen d'avoir, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de la partie civile, en l'espèce des actes de fellation et des introductions digitales anales, d'avoir tenté de commettre un viol sur la personne de la partie civile, ladite tentative ayant été manifestée par un commencement d'exécution, d'avoir commis des atteintes sexuelles avec violence, contrainte, menace ou surprise sur la personne de la partie civile, en pratiquant la mise en accusation du mis en examen devant la cour d'assises des Alpes Maritimes ;
"aux motifs qu'il sera observé qu'il ne peut être tiré aucun élément de l'absence de témoin direct de cette affaire, les agressions sexuelles se produisant de manière habituelle dans un cadre intime exclusif de tout regard extérieur ; qu'il en est de même du caractère tardif de la dénonciation, que X... n'a pas toujours contesté les faits reprochés ; qu'il a reconnu la matérialité des attouchements sur le sexe, les fesses, des baisers sur le sexe, de masturbation qu'il pratiquait sur lui, même en présence de l'enfant, contestant tout acte de pénétration et toute connotation sexuelle à de tels gestes ; que ces dénégations partielles sont contredites par des accusations détaillées, réitérées après confrontation, portées par Y... dont aucun élément objectif ne permet de mettre en doute le témoignage ;
1 / "alors que la chambre de l'instruction ne pouvait dire qu'il existait des charges suffisantes d'avoir commis les actes de pénétration sexuelle, en l'espèce des actes de fellation et des introductions digitales anales sans préciser d'abord si les actes de fellation allégués avaient été réalisés par le mis en examen sur la partie civile, ou par la partie civile sur le mis en examen, car dans la première hypothèse, l'élément matériel de l'infraction ne serait pas constitué et ensuite quelles auraient été les introductions digitales anales avancées ;
2 / "alors qu'aucun élément n'est formulé par l'arrêt attaqué sur la tentative de viol retenue en sorte que la chambre de l'instruction n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de déterminer s'il existait des charges suffisantes à cet égard ;
3 / "alors que l'instruction a lieu à charge et à décharge ;
que la chambre de l'instruction, en l'état des témoignages favorables au mis en examen dont elle était saisie, émanant notamment de personnes, également mineur de moins de quinze ans dans la période retenue par la prévention, indiquant n'avoir jamais fait l'objet du moindre acte déplacé de la part du mis en examen, tel celui de A... Z..., corroboré par le témoignage de son père B... Z..., ne pouvait énoncer qu'aucun élément objectif ne permettait de mettre le témoignage de la partie civile en doute sans même s'être prononcée sur les témoignages favorables au mis en examen" ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre X... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de viols, tentative de viol et agressions sexuelles aggravés ;
Qu'en effet, les chambres de l'instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre de l'instruction était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle l'accusé a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Chemithe ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;