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10/07/2001 | FRANCE | N°99-43024

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2001, 99-43024


Attendu que M. X... a été engagé le 1er octobre 1973 par la société Setec Bâtiment ; qu'à la fin de l'année 1994, la société Setec a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique à l'issue de laquelle M. X... a été licencié le 8 mars 1995 ; que, faisant valoir notamment qu'il avait été privé du bénéfice de la retraite progressive prévue par le plan social, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Setec Bâtiment fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 mars 1999) d'a

voir décidé que le licenciement n'était pas justifié par un motif économique et de l'avo...

Attendu que M. X... a été engagé le 1er octobre 1973 par la société Setec Bâtiment ; qu'à la fin de l'année 1994, la société Setec a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique à l'issue de laquelle M. X... a été licencié le 8 mars 1995 ; que, faisant valoir notamment qu'il avait été privé du bénéfice de la retraite progressive prévue par le plan social, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Setec Bâtiment fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 mars 1999) d'avoir décidé que le licenciement n'était pas justifié par un motif économique et de l'avoir condamnée à des dommages-intérêts de ce chef alors, selon le moyen :

1o que la convention de préretraite progressive, prévue par le plan social, à laquelle pouvaient adhérer les salariés dont le licenciement était envisagé, était réservée à ceux ayant atteint l'âge légal de 55 ans au moment de leur adhésion à cette convention, conformément à son article premier ; qu'en décidant que le salarié aurait été privé de la possibilité d'adhérer à la convention de préretraite progressive qui n'avait été conclue que cinq mois après son licenciement, et était réservée au personnel ayant adhéré à ladite convention à compter du 1er août 1995, ce dont il résultait que l'adhésion de l'intéressé était impossible, la cour d'appel a dénaturé par omission l'article premier de ladite convention et a, ainsi, violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;

2o que l'employeur n'est tenu de sauvegarder des emplois, en application d'un plan social, que dans la limite de ses engagements ; qu'en décidant que l'employeur n'aurait pas dû licencier le salarié avant qu'il n'ait eu la possibilité d'adhérer à une convention de préretraite progressive instituée par le plan social, sans rechercher si ce dernier avait interdit tout licenciement de personnes de moins de 55 ans ou si, au contraire, il n'avait pas fixé la date limite de cette adhésion au moment du dépôt de la demande de conclusion de ladite convention, laquelle était intervenue avant la cinquante-cinquième année de l'intéressé comme le soutenait l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 du Code civil et L. 321-4-1 du Code du travail ;

3o en toute hypothèse, que la méconnaissance par l'employeur d'une mesure prévue par un plan social et destinée à limiter le nombre des licenciements en proposant aux salariés d'adhérer à une convention de préretraite progressive n'a pas d'incidence sur la cause réelle et sérieuse du licenciement économique et n'ouvre pas droit à des dommages-intérêts de ce chef ; qu'en décidant le contraire, aux motifs que le salarié avait été privé d'une mesure qui aurait pu éviter son licenciement en lui permettant d'adhérer à une convention de préretraite progressive, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 321-1, L. 321-4-1 et L. 122-14-4 du Code du travail ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article 3.1 du plan social l'entreprise s'engageait à solliciter auprès de la direction départementale du Travail et de l'Emploi la conclusion d'une convention de préretraite progressive du FNE pour faciliter la transformation en emplois à temps partiel des emplois à temps complet occupés par des salariés âgés de plus de 55 ans et qu'elle s'engageait, après signature d'une telle convention, à la proposer aux salariés qui rempliraient les conditions pour y adhérer ; qu'il ressort des constatations de la cour d'appel que la convention a été signée par l'Administration le 1er août 1995 et que le salarié avait 55 ans depuis le 8 mai précédent ; qu'il s'ensuit qu'il remplissait les conditions prévues par le plan social pour prétendre au bénéfice de la préretraite progressive ;

Et attendu que c'est, dès lors, à bon droit que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait demandé le 27 février 1995 à bénéficier de la préretraite progressive prévue par le plan social, a décidé qu'en le licenciant dès le 8 mars 1995 et en le privant ainsi du bénéfice d'une mesure à laquelle il pouvait prétendre l'employeur avait agi avec une légèreté blâmable en sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Setec Bâtiment fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au salarié une indemnité pour méconnaissance de la priorité de réembauchage alors, selon le moyen, que l'obligation de réembauchage d'un salarié licencié pour motif économique est limitée à l'entreprise qui l'emploie et ne s'étend pas aux autres sociétés du même groupe ; qu'en décidant le contraire, parce que le salarié avait travaillé pour une autre société et qu'il existait une pratique habituelle de mutation au sein du groupe, considération parfaitement inopérante, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 321-14 du Code du travail ;

Mais attendu que, si le droit à priorité de réembauchage ne peut s'exercer qu'à l'égard de l'entreprise qui a licencié le salarié, la cour d'appel, qui a fait ressortir que le poste pourvu par la société Setec Foulquier et non proposé au salarié était destiné à être commun à cette société et à la société Setec Bâtiment, a, sans encourir le grief du moyen, légalement justifié sa décison ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Setec Bâtiment fait enfin grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au salarié des dommages-intérêts pour préjudice moral alors, selon le moyen, que l'indemnisation du préjudice causé au salarié licencié sans motif réel et sérieux englobe nécessairement le préjudice moral consécutif à cette rupture, qu'en allouant au salarié des dommages-intérêts pour préjudice moral, en sus de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans constater l'existence d'un dommage distinct de celui résultant de la rupture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, contrairement aux énonciations du moyen, a constaté que le salarié avait subi un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 99-43024
Date de la décision : 10/07/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Refus d'une mesure permettant d'éviter un licenciement.

1° Une cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait demandé le 27 février 1995 à bénéficier de la préretraite progressive prévue par le plan social, a décidé à bon droit qu'en le licenciant dès le 8 mars 1995 et en le privant ainsi du bénéfice d'une mesure à laquelle il pouvait prétendre l'employeur avait agi avec une légèreté blâmable en sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Réembauchage - Priorité - Obligation de l'employeur - Cadre d'appréciation - Groupe d'entreprises - Condition.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Réembauchage - Priorité - Obligation de l'employeur - Etendue.

2° Si le droit à priorité de réembauchage ne peut s'exercer qu'à l'égard de l'entreprise qui a licencié le salarié, la cour d'appel qui a fait ressortir que le poste pourvu par une société distincte et non proposé au salarié était destiné à être commun à cette société et à l'entreprise qui employait le salarié, a légalement justifié sa décision tendant à condamner la société à payer au salarié une indemnité pour violation de la priorité de réembauchage.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement économique - Indemnités - Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse - Dommages-intérêts pour préjudice moral - Cumul - Possibilité.

3° Justifie sa condamnation d'une société à payer au salarié licencié des dommages-intérêts pour préjudice moral, la cour d'appel qui constate que le salarié a subi un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 mars 1999

EN SENS CONTRAIRE : (2°). Chambre sociale, 1994-04-06, Bulletin 1994, V, n° 134 (2), p. 91 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2001, pourvoi n°99-43024, Bull. civ. 2001 V N° 253 p. 201
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2001 V N° 253 p. 201

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. .
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Frouin Premier avocat général : M. Benmakhlouf.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:99.43024
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