AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Henri Z...,
2 / Mme Thérèse Z..., épouse Y...,
demeurant ensemble ...,
3 / la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), dont le siège est 79038 Niort Cedex,
en cassation d'un arrêt rendu le 2 juillet 1998 par la cour d'appel de Douai (3e chambre), au profit :
1 / de la compagnie Assubel, compagnie d'assurances accidents et dommages de droit belge dont le siège est ...,
2 / de M. Johan X..., domicilié ... 34, Duinkerkestraat, Furnes (Belgique), pris en sa qualité de syndic de la société SPRL Caillau,
défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 mai 2001, où étaient présents : M. Sargos, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Bouscharain, conseiller rapporteur, M. Aubert, conseiller, M. Roehrich, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bouscharain, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat des consorts Z... et de la MAIF, de Me Capron, avocat de la compagnie Assubel, les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1131 du Code civil et L. 124-1 du Code des assurances ;
Attendu que le versement des primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant la période d'application de la garantie ; que toute clause qui tend à réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause, comme telle illicite et réputée non écrite ;
Attendu que la société Caillau, qui avait fourni aux époux Z... et installé dans leur maison une cheminée à foyer fermé, avait ultérieurement souscrit auprès de la compagnie Assubel une police garantissant sa responsabilité civile et comportant une clause prévoyant la garantie des dommages causés aux tiers par les cheminées vendues et placées pendant les trois années précédant sa date d'effet et stipulant que cette garantie cesserait de plein droit au terme d'une période de trois ans ; qu'un incendie ayant occasionné des dommages à la maison des époux Pasternak, ces derniers, ainsi que la Mutuelle assurance des instituteurs de France, partiellement subrogée dans leurs droits, ont recherché la responsabilité de l'installateur et la garantie de l'assureur de celui-ci ;
Attendu que pour les débouter de leur demande dirigée contre l'assureur, l'arrêt attaqué retient qu'il était constant que la police prévoyait que la garantie des dommages causés aux tiers par les cheminées vendues et placées pendant les trois années précédant la date d'effet du contrat cesserait de plein droit au terme d'une période de trois ans ; qu'il retient encore qu'il n'était pas contesté que le contrat d'assurance avait pris effet le 30 mars 1987, que la cheminée avait été installée en juillet 1986 et que le sinistre, dont la responsabilité incombait à la société Caillau, était survenu le 4 février 1991 ; qu'il en déduit que, sans qu'il soit nécessaire de rechercher si le contrat prévoyait la garantie de l'assureur durant trois ans après la livraison ou durant trois ans à compter de la prise d'effet du contrat d'assurance, plus de trois ans s'étaient écoulés, dans l'un ou l'autre cas, lorsque l'incendie était survenu, en sorte que la garantie n'était pas due ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il était établi que l'incendie survenu le 4 février 1991 trouvait son origine dans les fautes commises par l'assuré au moment de l'installation de la cheminée et que la garantie de l'assureur s'étendait à cette période, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'il n'y a lieu à renvoi du chef de la garantie de l'assureur ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juillet 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la garantie de l'assureur ;
Dit que l'assureur est tenu à garantie ;
Renvoie sur les autres points la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la compagnie Assubel et M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la compagnie Assubel ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille un.