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26/06/2001 | FRANCE | N°99-43078

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2001, 99-43078


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° U 99-43.078 et n° V 99-43.079 formés par M. Vincent, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société anonyme JL Delamare, demeurant 20, rue Casimir-Périer, 76600 Le Havre,

en cassation de deux arrêts rendus le 30 mars 1999 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale, section prud'homale), au profit :

1 / de M. X...,

2 / de Mme Y...,

3 / de Mme Z...,

4 / du Centre de gestion et d'étude AGS (CGEA) de Rouen, dont

le siège est immeuble Le Normandie 1, 89, avenue de Bretagne, 76108 Rouen Cedex,

defendeurs à la ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° U 99-43.078 et n° V 99-43.079 formés par M. Vincent, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société anonyme JL Delamare, demeurant 20, rue Casimir-Périer, 76600 Le Havre,

en cassation de deux arrêts rendus le 30 mars 1999 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale, section prud'homale), au profit :

1 / de M. X...,

2 / de Mme Y...,

3 / de Mme Z...,

4 / du Centre de gestion et d'étude AGS (CGEA) de Rouen, dont le siège est immeuble Le Normandie 1, 89, avenue de Bretagne, 76108 Rouen Cedex,

defendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 mai 2001, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, MM. Boubli, Ransac, Bouret, Lanquetin, Coeuret, Bailly, conseillers, M. Frouin, Mmes Trassoudaine-Verger, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, MM. Funck-Brentano, Leblanc, conseillers référendaires, M. Benmakhlouf, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. Vincent, ès qualités, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X... et de Mmes Y... et Z..., les conclusions de M. Benmakhlouf, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° U 99-43.078 et n° V 99-43.079 ;

Attendu que, selon les arrêts attaqués, la procédure de redressement judiciaire de la société Jacques-Louis Delamare, qui employait Mmes Y... et Z... et M. X... en qualités de sténodactylographe, d'employée de bureau et d'agent commercial, ayant été ouverte le 17 juin 1994, les trois salariés ont été licenciés pour motif économique le 10 juillet 1995 par l'administrateur ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappels de salaires ;

Sur le second moyen, commun aux pourvois :

Attendu que Mme Vincent, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Jacques-Louis Delamare, reproche aux arrêts d'avoir alloué aux salariés un rappel de salaire et un complément d'indemnité de chômage et d'en avoir inscrit le montant au passif de la procédure collective, alors, selon le moyen, que le dol n'est une cause de la nullité de la convention que s'il émane de la partie envers laquelle l'obligation a été contractée ; qu'après avoir établi qu'un arrêt passé en force de chose jugée avait déclaré M. Monnier, chef comptable, par ailleurs membre du directoire, coupable de présentation de bilan inexact, confirmé la relaxe de M. Voisin, président du directoire et reçu la constitution de partie civile de Mme Vincent, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Delamare, la cour d'appel devait en déduire qu'aucune manoeuvre illicite ne pouvait être imputée à la société Delamare ou à la collégialité de son directoire, de nature à justifier l'annulation pour dol de la modification des contrats de travail intervenue au regard des difficultés économiques de la société ; qu'en ordonnant néanmoins de ce chef l'inscription de diverses créances au titre de rappel de salaire et de complément d'indemnité de chômage, la cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 116 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a énoncé que M. Voisin, président du directoire et directeur financier, avait fait preuve d'une légèreté blâmable et que M. Monnier, membre du directoire et chef comptable, avait, dès le mois de mars 1993, dissimulé sciemment les pertes éprouvées par la société à la suite d'opérations spéculatives et en établissant de faux comptes d'exploitation et, de surcroît, avait détourné, au préjudice de la société, des sommes d'argent importantes ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu déduire que les salariés n'avaient accepté la réduction de leurs salaires que parce qu'ils avaient été trompés par ces deux personnes, qui avaient la qualité de représentant de l'entreprise ;

que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen commun aux pourvois pris en sa première branche :

Vu les articles 45 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-37 du Code de commerce et 63 du décret du 27 décembre 1985 ;

Attendu que, pour juger que le licenciement des salariés était dépourvu de cause réelle et sérieuse et pour fixer leurs créances de dommages-intérêts au passif de la procédure collective de l'employeur, les arrêts retiennent qu'une décision d'une juridiction pénale a constaté qu'un mandataire de la société Delamare avait commis des fautes lourdes en dissimulant sciemment, à partir du mois de mars 1993, les pertes éprouvées par la société à la suite d'opérations spéculatives et en établissant, en tant que chef-comptable, de faux comptes d'exploitation et un bilan de l'exercice 1993 volontairement faux ; qu'il avait détourné au préjudice de la société des sommes d'argent importantes ; que les difficultés économiques de l'entreprise sont consécutives aux agissements délictueux de ce mandataire et à la légèreté blâmable du président du directoire, directeur financier ; que, dans ces conditions, le licenciement revêt un caractère abusif ; que l'argument tiré du défaut de recours contre l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé les licenciements est inopérant, compte tenu de ces agissements frauduleux ;

Attendu, cependant, que la cause économique des licenciements que l'administrateur a été autorisé à prononcer en raison de leur caractère urgent, inévitable et indispensable, par une ordonnance du juge-commissaire rendue pendant la période d'observation sur le fondement des articles 45 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-37 du Code de commerce et 63 du décret du 27 décembre 1985 ne peut plus être contestée ;

D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé que l'administrateur avait été autorisé à procéder au licenciement pour motif économique des trois salariés par une ordonnance du juge-commissaire en date du 12 mai 1995 rendue en application des textes susvisés, la cour d'appel a violé lesdits textes ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont jugé que les licenciements de Mmes Y... et Z... et de M. X... étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, en ce qu'ils ont alloué aux salariés précités des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'ils ont inscrit lesdits dommages-intérêts au passif de la procédure collective de la société Jacques-Louis Delamare, les deux arrêts rendus le 30 mars 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille un.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 99-43078
Date de la décision : 26/06/2001
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Redressement ou liquidation judiciaire - Autorisation donnée par le juge-commissaire.


Références :

Code de commerce L621-37
Décret 85-1388 du 27 décembre 1985 art. 63
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 45

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen (chambre sociale, section prud'homale), 30 mars 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2001, pourvoi n°99-43078


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:99.43078
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