AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Daniel B..., demeurant ...,
2 / Mme Francine Y..., épouse B..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 12 mars 1998 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile, section civile et commerciale), au profit de Mme Michelle Z..., épouse X..., demeurant ...,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 25 avril 2001, où étaient présents : M. Leclercq, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, Mme Mouillard, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Mouillard, conseiller référendaire, les observations de Me Foussard, avocat des époux B..., les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Reçoit M. A..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de M. B..., en son intervention ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Caen, 12 mars 1998) qu'aux termes d'un acte notarié du 4 octobre 1991, Mme X... a vendu aux époux B... un fonds de commerce de droguerie, le stock devant être payé en douze mensualités ; qu'invoquant des difficultés financières, les époux B... ont demandé un réaménagement de leur dette, de telle sorte qu'un projet d'acte a été établi par le notaire le 4 juillet 1992 en vue de leur permettre de régler le prix en vingt-quatre mensualités, la dernière d'entre elles devant être versée le 1er juillet 1994 ; que le 13 octobre 1994, les époux B..., invoquant des anomalies du stock, ont assigné Mme X... pour obtenir la remise des documents comptables des trois dernières années ; que Mme X... ne s'y est pas opposée mais, indiquant n'avoir reçu qu'un seul règlement depuis juillet 1992, a demandé reconventionnellement paiement du solde de sa créance ;
Attendu que M. et Mme B... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à Mme X... deux sommes au titre du stock qui avait été cédé, après avoir condamné Mme X... à la remise des pièces comptables et notamment des factures afférentes au stock, alors, selon le moyen :
1 ) que le droit au procès équitable postule le respect du principe de l'égalité des armes ; qu'ayant estimé nécessaire d'enjoindre à Mme X... de mettre à disposition de M. et Mme B... les pièces comptables, et notamment les factures relatives au stock, les juges du fond ont considéré par là-même que l'examen de ces pièces par M. et Mme B... était nécessaire pour qu'ils puissent faire valoir leur moyen ; qu'en statuant sur la demande de Mme X..., sans attendre que M. et Mme B... aient disposé des pièces qu'ils avaient enjoint à Mme X... de mettre à leur disposition, les juges du fond ont violé l'article de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en même temps que le principe de l'égalité des armes ;
2 ) les juges du fond ne pouvaient, sans contradiction de motifs, estimer que la production des pièces était nécessaire, tout en estimant pouvoir arrêter le montant de la dette de M. et Mme B... ;
3 ) que, subsidiairement, faute d'avoir recherché si les pièces dont la communication était demandée n'était pas nécessaire pour que M. et Mme B... fassent valoir leur droit, comme l'avaient retenu les premiers juges, l'arrêt attaqué est entaché d'un défaut de base légale au regard du principe de l'égalité des armes et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui se devait de statuer sur les demandes tant principale que reconventionnelle dont elle était saisie, n'a fait qu'appliquer les principes généraux qui gouvernent le procès civil ; que statuant sur la demande principale, elle s'est bornée à tirer les conséquences de l'accord de Mme X... quant à la communication des pièces comptables aux acquéreurs sur lequel elle n'aurait pu revenir sans méconnaître les termes du litige, et ce sans prendre parti sur l'utilité de cette communication ; que statuant sur la demande reconventionnelle, elle a retenu, justifiant par là-même sa décision, que les époux B... n'avaient jamais contesté l'inventaire établi contradictoirement le 30 juin 1991, qu'ils n'avaient pas émis la moindre objection pendant trois ans, qu'ils n'expliquaient pas en quoi ils auraient été trompés par la venderesse et qu'ils n'apportaient pas le moindre commencement preuve d'une quelconque anomalie, pour en déduire qu'ils devaient exécuter leur engagement conventionnel ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux B... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son audience publique du six juin deux mille un.