CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- le procureur général près la cour d'appel de Paris,
- l'association X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 10 janvier 2001, qui, dans l'information suivie contre Y... et autres, notamment des chefs d'empoisonnement, complicité, administration de substances nuisibles, a constaté l'extinction de l'action publique pour deux personnes mises en examen, a annulé, dans l'ensemble de ses dispositions, l'ordonnance de non-lieu partiel et de transmission de pièces au procureur général et a ordonné le retour de la procédure au juge d'instruction pour poursuivre l'information.
LA COUR, Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi formé par X... :
Vu les pièces produites par la société civile professionnelle Baraduc et Duhamel, avocat en la Cour, au nom de l'association X..., desquelles il résulte que celle-ci se désiste du pourvoi formé le 9 février 2001, contre l'arrêt susvisé ;
Attendu que le désistement est régulier en la forme ;
II. Sur le pourvoi du procureur général :
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 5 février 2001, prescrivant son examen immédiat ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 86, 176, 184 et 591 du Code de procédure pénale, fausse application de la loi :
Vu les articles 176, 181, 184 du Code de procédure pénale, ensemble les articles 201, 202 et 211 du même Code ;
Attendu que la juridiction d'instruction du second degré ne peut, sans excès de pouvoir, annuler l'ordonnance du juge d'instruction portant règlement de la procédure d'information, lorsque cette ordonnance satisfait, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 9 juin 1993, une information a été ouverte, sur plainte avec constitution de partie civile de l'association X... et de plusieurs autres personnes, notamment du chef d'empoisonnement, pour la contamination par le virus HIV à partir de la prescription et de la distribution de produits antihémophiliques d'origine sanguine porteurs de ce virus et par des transfusions sanguines, à l'encontre, principalement, des prescripteurs de ces substances, des intermédiaires et des responsables administratifs ;
Qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a rendu une ordonnance constatant l'extinction de l'action publique à l'égard de deux des personnes mises en examen, disant n'y avoir lieu à suivre contre deux autres et prononçant, pour le surplus, la transmission des pièces au procureur général conformément à l'article 181 du Code de procédure pénale alors applicable ;
Que, par la même décision, le juge d'instruction a requalifié certains faits, poursuivis à l'origine pour empoisonnement, complicité de ce crime et non-assistance à personne en danger, en empoisonnement, complicité, violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, violences aggravées, homicides et blessures involontaires, omission de porter secours ou d'empêcher un crime ;
Attendu que, pour annuler les dispositions de l'ordonnance autres que celles constatant, pour partie, l'extinction de l'action publique et renvoyer la procédure au juge d'instruction en vue de poursuivre l'information, la chambre de l'instruction énonce notamment que toute personne à l'encontre de laquelle il existe des indices laissant présumer qu'elle a participé à la commission d'une ou plusieurs infractions, doit être informée de l'exact contenu des faits à elle reprochés et de leur qualification juridique ; qu'elle ajoute que la requalification des faits, pour lesquels les personnes poursuivies n'ont point été mises en examen ni entendues, n'est pas conforme aux dispositions légales et à celles de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le juge d'instruction avait requalifié les faits par application des dispositions de l'article 176 du Code de procédure pénale, non contraires à l'article 6.3 de la Convention européenne des droits de l'homme, et alors qu'il lui appartenait d'apprécier elle-même si les personnes mises en examen devaient être renvoyées devant la juridiction de jugement sous les qualifications ainsi retenues, quitte à ordonner, le cas échéant, tout acte d'information complémentaire utile, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
I. Sur le pourvoi de l'association X... ;
DONNE ACTE du désistement, et dit qu'il ne sera pas statué sur le pourvoi ;
II. Sur le pourvoi du procureur général ;
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 10 janvier 2001, mais en ses seules dispositions ayant annulé l'ordonnance du juge d'instruction portant non-lieu partiel et transmission des pièces au procureur général, les dispositions constatant l'extinction de l'action publique à l'égard de deux personnes décédées étant expressément maintenues, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée.