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13/03/2001 | FRANCE | N°00-84422

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 mars 2001, 00-84422


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mars deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 15 juin 2000, qui l'a condamné, pou

r blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité du tra...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mars deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 15 juin 2000, qui l'a condamné, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité du travail, à 50 000 francs d'amende, a ordonné la publication de la décision et a statué sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-19 et 222-20 du Code pénal, dans leur rédaction issue de la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000, 112-1, 222-44, 222-46 et R. 625-2 du même code, L. 263-2, L. 231-2 et L. 263-6 du Code du travail, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilles X... coupable de blessures involontaires sur la personne de Marie-Françoise Z..., épouse Y..., ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois ;

" aux motifs propres que l'infraction pénale reprochée à Gilles X... n'est constituée qu si, l'origine de l'accident étant établie de façon certaine, la faute commise par l'employeur a un lien direct de cause à effet avec cet accident ; qu'en l'espèce, il est constant que Marie-Françoise Y... a glissé sur le sol du couloir menant à la cafétéria, et que ce sol était " humide, voire glissant ", ainsi que l'écrit le prévenu dans ses conclusions d'appel (page 3) :
l'accident est bien dû à la nature du revêtement du sol qui a été la cause déterminante ; la faute commise par Gilles X... réside dans le fait de n'avoir pas pris les mesures nécessaires à l'époque pour y remédier (en changeant le revêtement par exemple), alors qu'il avait été averti clairement du danger par le comité d'hygiène et de sécurité en 1991 et 1992 ; dans ces conditions le chef d'entreprise a pris un risque, violant l'article L. 230-2 du Code du travail qui l'obligeait à remplacer " ce qui est dangereux " ; les faits, établis, ont provoqué une incapacité initiale de deux mois et 27 jours d'incapacité temporaire de travail, et postérieurement vu l'aggravation démontrée par les expertises 3 mois d'incapacité totale du 13 septembre 1997 au 31 décembre 1997 ; la prévention délictuelle est fondée, mais elle ne justifie pas le prononcé d'une peine d'emprisonnement avec sursis ni l'affichage dans l'entreprise, toutes les mesures de protection étant en application aujourd'hui (arrêt, pages 4 et 5) ;

" et aux motifs adoptés, des premiers juges, que le prévenu conteste les faits reprochés prétendant avoir mis en oeuvre tous les moyens disponibles pour assurer la sécurité du personnel et évoquant l'éventualité d'un accident fortuit éventuellement imputable à la maladresse de la victime ; que, toutefois, devant la fréquence des accidents, de même nature, survenus au même endroit pour les mêmes raisons, les déclarations de la victime sur les raisons de sa chute sont parfaitement crédibles et que le prévenu ne rapporte pas la preuve contraire ; qu'il ne rapporte pas davantage la preuve d'une tentative de renseignement auprès de la CRAM pour une information sur les normes applicables au sol concerné, ni à plus forte raison d'une mise en oeuvre de ces normes ; qu'il fait état de difficultés de compatibilité entre les normes sanitaires et de sécurité sans exposer les démarches accomplies pour résoudre le problème ; que de plus l'inspection du Travail relève, dès l'origine des accidents, un rythme de nettoyage insuffisant et qu'il eût probablement suffi d'un nettoyage plus fréquent pour éviter les accidents ; que le prévenu ne fait pas la démonstration d'une telle tentative alors que le danger ne cessait d'être souligné par les CHSCT ; qu'ainsi l'infraction est constituée (jugement, page 3) ;

" 1/ alors que conformément aux dispositions de l'article 121-3, alinéa 4, du Code pénal, issu de l'article 1er de la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000, immédiatement applicable aux instances en cours, les personnes qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé, ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, ne sont responsables pénalement que s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'il était reproché à Gilles X... de n'avoir pas pris les mesures nécessaires pour remédier au caractère glissant du sol du couloir dans lequel Marie-Françoise Y... a été victime d'une chute, et d'avoir pris un risque en ne remplaçant pas le carrelage jugé dangereux ; qu'ainsi, il n'était pas reproché au prévenu d'avoir directement causé le dommage, à savoir les blessures dont Marie-Françoise Y... a été victime, mais d'avoir contribué à créer la situation ayant permis sa réalisation ou de n'avoir pas pris les mesures permettant de l'éviter ; que, dès lors, en déclarant le prévenu coupable de blessures involontaires, sans rechercher si l'intéressé avait soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé ;

" 2 l alors, subsidiairement, que dans ses conclusions d'appel, le demandeur a expressément fait valoir que le caractère glissant du sol ne suffisait pas à expliquer la chute de la salariée et qu'en l'absence de témoin direct de l'accident, les circonstances de la chute demeuraient indéterminées, rien ne permettant notamment d'exclure une imprudence, un faux mouvement, un malaise ou une défaillance passagère de la victime ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que le sol était glissant, pour en déduire que l'accident est bien dû à la nature du revêtement du sol, qui a été la cause déterminante de la chute, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions du prévenu, tendant à démontrer que la preuve d'un lien de causalité entre le caractère glissant du sol, à le supposer fautif, et la chute de la salariée, n'était pas rapportée, compte tenu du caractère indéterminé des circonstances de la chute, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la chute d'une salariée, Gilles X..., président de la société Ronsard, a été cité devant le tribunal correctionnel pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité du travail ;

Attendu que, pour le condamner de ces chefs, les juges, après avoir relevé que la victime avait glissé sur le sol, retiennent que la nature du revêtement a été la cause déterminante de l'accident, et que le prévenu, pourtant averti du danger depuis plusieurs années par le comité d'hygiène et de sécurité, n'a pas pris les mesures propres à y remédier ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant d'une appréciation souveraine, dont il résulte que le prévenu a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du Code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juillet 2000, applicable en la cause, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Que le moyen ne peut dès lors être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-84422
Date de la décision : 13/03/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Faute - Faute exposant autrui à un risque d'une particulière gravité - Employeur - Employeur averti du danger.


Références :

Code pénal 121-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre, 15 juin 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 mar. 2001, pourvoi n°00-84422


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.84422
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