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07/02/2001 | FRANCE | N°00-81130

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 février 2001, 00-81130


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept février deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de Me L... et de la société civile professionnelle Le BRET-DESACHE et LAUGIER,, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- DE SAINT ETIENNE Bérénice,

- X... Norbert,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en da

te du 3 janvier 2000, qui, a condamné, la première, pour complicité d'escroqueries, à 1 an d'em...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept février deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de Me L... et de la société civile professionnelle Le BRET-DESACHE et LAUGIER,, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- DE SAINT ETIENNE Bérénice,

- X... Norbert,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 3 janvier 2000, qui, a condamné, la première, pour complicité d'escroqueries, à 1 an d'emprisonnement avec sursis, le second, pour escroqueries et démarchage illicite en matière de prêts d'argent, à 2 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires en demande, rectificatif et en défense produits ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par Bérénice de Saint-Etienne, pris de la violation des articles 6-2 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 9-1 du Code civil, 121-6, 121-7, 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal, 2, 427, 485 et 512 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bérénice de Saint-Etienne coupable de complicité d'escroquerie et, en répression, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs propres que : "en bref, Bérénice de Saint-Etienne expose à la Cour, assistée de son conseil, que son nom a été porté à son insu sur les contrats jamais vus par elle, qu'elle n'a pas eu d'intérêt dans les opérations, et qu'elle n'aurait accepté sa participation envisagée que pour veiller au respect du droit ; elle conclut donc à sa relaxe ; qu'ainsi que l'a longuement relevé le tribunal, force est de constater que la complicité d'escroquerie par aide ou assistance de Bernard Barbey et Bernard F... est prouvée car elle est un élément essentiel du montage ;

elle est à l'origine du projet pour l'avoir expérimenté, avec un groupe hollandais, opération soldée par un échec ; elle en a vanté les mérites lors des réunions de Nantes et de Paris au cours desquelles elle a présenté "FINCONSULT" (qui s'avérait être une coquille vide), indiquant : "des personnes ont faits des placements fabuleux.." ;

qu'elle a apporté sa caution juridique à cette affaire en elle-même douteuse, et qui s'est avérée frauduleuse, aucun placement n'étant réalisé ; qu'elle veut faire croire que le 18 décembre 1992, elle cherchait à "faire une fin" ; cependant elle n'a fait retirer son nom des contrats qu'en juillet 1993 ; que les motifs du jugement sont justes et adoptés, tant sur l'élément matériel que moral, ainsi que la peine prononcée en rapport avec la gravité de l'infraction" (arrêt, pages 12 et 13) ;

"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que : "les pièces de l'instruction, spécialement les fax de Bernard Y... à Bernard F... des 16 et 18 septembre 1992 (D 148 pièces 14 et 16) et le fax du 9 septembre 1992 de Bernard Y... à Bérénice de Saint-Etienne démontrent que, contrairement à ce que soutient l'accusation, Bérénice de Saint-Etienne n'est pas la rédactrice du contrat. Cela ressort plus particulièrement du fax du 18 septembre 1992 où Bernard Y..., à propos du contrat, écrit "je finis de l'écrire et de le taper à la machine ce week-end pour l'expédier dès lundi matin à nos principaux correspondants" ; qu'il n'en demeure pas moins que dans le fax du 9 septembre 1992, Bernard Y... exposait à Bérénice de Saint-Etienne "le schéma de principe" de "leur coopération à travers le rassemblement des capitaux bretons" en lui demandant d'être des leurs pour établir un contrat fiduciaire en bonne et due forme et ajoutait qu'il est prêt à défendre auprès du client l'aspect fiscal de l'opération, l'aller comme le retour devant se faire sous le manteau d'une "off-shore fiduciaire", ou autre "paravent" ; Bérénice de Saint-Etienne qui a accepté de participer à la réunion de Nantes, où le produit FINCONSULT fut lancé, n'ignorait donc rien des intentions de Bernard Y... et notamment de son désir de l'associer à l'opération ; à l'audience, Bérénice de Saint-Etienne a prétendu n'avoir "jamais eu en mains le contrat", "n'avoir jamais vu de contrat définitif où son nom figurait", n'être allée à Nantes que pour "se renseigner", en "tant qu'administratrice future d'une société en cours de création" ; pareille affirmation est contraire à ses propres déclarations lors de l'instruction et au témoignage, réitéré à l'audience, de Alain A... ; au magistrat instructeur, elle a indiqué qu'en novembre ou décembre 1992 (elle a admis à l'audience qu'il doit s'agir d'une erreur de date : note d'audience page 4), "Bernard Y... lui a montré un exemplaire de contrat sur lequel son nom apparaissait" ; Alain A... a déclaré à l'audience (en conformité avec ses dépositions lors de l'enquête) : "il y a eu un contrat qui m'a été expliqué et présenté par Bérénice de Saint-Etienne et Bernard Y... à Nantes, dans mon bureau" ; "c'est bien un document comme cela qui m'a été présenté (contrat Z...)" ; "les explications fournies par Bérénice de Saint-Etienne et Bernard Y... étaient qu'un notaire intervenait" ; "pour moi, FINCONSULT était une société de droit suisse, je pensais que mon siège était en Suisse" ; "cela m'a

été présenté comme une société de placement à court terme susceptible de rapporter gros" (note d'audience, page 3) ; Bernard Y... quant à lui déclare : "pour moi il est évident que le nom de Bérénice de Saint-Etienne apparaissait avec son accord (...) ;

tout ceci a été fait en connaissance des uns et des autres" ; "si Bérénice de Saint-Etienne avait demandé à Bernard F... et à moi-même de retirer son nom, nous l'aurions fait immédiatement, ce qu'elle n'a pas fait" (note d'audience, page 4) ; qu'il résulte de ce qui précède : que Bérénice de Saint-Etienne ment lorsqu'elle soutient n'avoir pas vu le contrat FINCONSULT ; qu'il importe peu qu'elle n'ait signé aucun des contrats de placements dès lors qu'en acceptant que son nom et sa qualité d'avocate y soient mentionnés, elle crédibilisait l'opération, comme l'ont confirmé plusieurs souscripteurs, à commencer par Alain A... ; après avoir rencontré celui-ci dans son bureau, Bérénice de Saint-Etienne a participé à la réunion de Nantes, au lendemain de laquelle fut signé le premier contrat FINCONSULT (Sylvie Z...) ; Pierre E... et Josette J... témoignent : Pierre E... : "étaient présents, Bernard Y..., Bernard F..., Me B... de Saint-Etienne ; j'ai cru en leur affaire du fait qu'une avocate était présente ; "ils m'ont proposé deux choses : les produits de crédit qu'ils vendaient et leur histoire de placement à une rentabilité importante mais présentée sous forme de crédit à long terme ; il fallait présenter 120 000 francs et à la sortie, au bout de trois mois, il y avait environ 5 fois plus. Selon Bernard Y..., Bernard F... et Bérénice de Saint-Etienne, ils faisaient des "roll programm" avec ces fonds en Suisse, par l'intermédiaire de banques suisses ; ils m'ont demandé de démarcher des clients dans mon domaine d'activité ; une commission de 10 % devait m'être réservée sur les capitaux produits ; une autre personne était présente à la réunion de Nantes, l'associée de Bernard Y..., dans l'affaire d'édition, Josette J... ; Bernard Y... disait avoir fait fortune avec ce produit, personne ne l'a désavoué ; Bérénice de Saint-Etienne créditait tout ce que disait Bernard Y... car les statuts, ou plutôt les contrats qu'ils proposaient avaient été rédigés par l'avocate, c'est elle qui le disait. Elle a dit que le produit était viable, que des américains l'avaient expérimenté et qu'à partir de là, il fallait trouver un contrat conforme avec la législation française ; Josette J... ; "à l'hôtel, j'ai assisté à l'entretien avec des clients, notamment un couple de personnes dont les parents avaient une scierie. L'exposé financier a été fait par Bernard Y... et Bérénice de Saint-Etienne. Il leur a été proposé le même système de prêt que le mien décrit ci- dessus" ; Bérénice de Saint-Etienne a donc accompli des actes positifs de complicité par aide et assistance ; l'intention coupable ne fait pas non plus de doute ; si l'on doit admettre que le 22 septembre 1992, elle ignorait que le prêt contracté par son client Beeber Corporation, avec l'intervention du notaire D..., serait un échec, elle ne pouvait de bonne foi prétendre que le produit avait déjà été expérimenté alors que le système FINSCONSULT - s'il puisait son inspiration dans le contrat D..., n'en constituait pas moins une dénaturation de celui-ci, Bernard Y... proposant en réalité aux clients, sous couvert d'un contrat de prêt destiné à cacher au fisc la véritable

nature de l'opération, un placement financier avec promesse de rendements exceptionnels à très bref délai, sans fournir aucune explication sur le mécanisme d'obtention des plus-values ; ce contrat "opaque" où son nom et sa qualité sont mentionnés, elle l'a avalisé, servant ainsi de "référence juridique" comme le dit Bernard Y..., et garantissant aux yeux des tiers la fiabilité de l'opération ; sa conscience du caractère frauduleux de celle-ci est d'autant plus certaine qu'elle savait qu'une société de droit étranger ne pouvait recueillir des capitaux en France et qu'elle prétend avoir dit à Bernard Y... que "ça finirait sur le bureau d'un juge" ; Bérénice de Saint-Etienne a également participé à une autre réunion à Paris à l'hôtel Méridien ; si Me G... relate que cette réunion lui a laissé une impression bizarre ("rien de concret n'en est sorti") (...) "tout est resté dans le flou artistique"), André H... déclare que Bernard Y... et Bérénice de Saint-Etienne intervenaient à tour de rôle pour présenter le produit ; Bérénice de Saint-Etienne a joué un rôle déterminant dans la décision de André H... de conclure un contrat puisque celui-ci explique que, sans citer de nom, elle expliqua que "des personnes avaient fait des placements fabuleux avec FINCONSULT de l'ordre de 3 à 4 millions de francs" ; or, elle savait, le 17 décembre 1992, que les opérations Beeber Corporation et Gauthier étaient un échec ;

Me K... précise qu'il ne leur a pas été présenté de modèle de contrat mais que Bérénice de Saint-Etienne évoquait notamment le fait que l'argent était déposé sur un compte séquestre chez un notaire hollandais dont elle n'a pas donné le nom ; Bérénice de Saint-Etienne a prétendu que lors de cette réunion elle savait que le "contrat avec le notaire ne pourrait pas fonctionner" car son "compte était plein et il fallait donc chercher d'autres formules" ;

dans un fax adressé le 18 décembre 1992 à 14 h 30 à Bernard Y..., elle dit avoir expliqué à "K... et G... que le notaire avait maintenant presque atteint la limite maximale des fonds couverts par sa garantie financière professionnelle" et que "bientôt le contrat notarié serait remplacé par un contrat bancaire" ; si, à l'audience, André H... déclare que Bérénice de Saint-Etienne a "parlé de système hollandais" et qu'il a compris que "l'opération était en cours mais pas qu'elle avait échoué", K..., lors de son audition par le magistrat instructeur, dit qu'il lui semble que Bérénice de Saint-Etienne a expliqué "qu'avec une garantie bancaire il serait possible de délivrer immédiatement un reçu" ; quoi qu'il en soit, il demeure qu'elle a continué à présenter le système par référence à des personnes qui avaient fait des placements avec FINCONSULT et en mentionnant la garantie d'un notaire hollandais, sans révéler à ses interlocuteurs une information essentielle, à savoir que le notaire était suspendu de ses fonctions par le conseil de l'ordre, ainsi qu'elle l'écrit dans son fax du 18 décembre 1992 ; à l'audience, et pour la première fois, Bérénice de Saint-Etienne a prétendu avoir eu cette information, le matin même du 18 décembre 1992, par un coup de fil du cabinet de Me D... et elle a produit aux débats une lettre adressée au notaire, datée du 19 décembre 1992, rédigée en anglais qui relate en substance que le président de la chambre des notaires d'Arnheim a notifié à Me D... l'ordre de quitter sa charge à partir du 24 novembre 1992 et que celui-ci n'a

pu informer Beeber Corporation (P/A Bérénice de Saint-Etienne) plus tôt car il n'a pu utiliser son bureau depuis le 20 novembre 1992 ; il est surprenant que cette pièce n'ait pas été produite par Bérénice de Saint-Etienne au cours de l'instruction et sa date n'est pas certaine, seule la lettre ayant été produite sans aucun cachet de la poste ; en tout état de cause, Bérénice de Saint-Etienne n'est pas crédible lorsqu'elle prétend n'avoir été avisée de la suspension du notaire que le lendemain de la réunion du 17 décembre 1992 : en effet, dans le fax du 18, elle explique qu'elle s'est entretenue de nombreuses fois avec lui, que les fonds ne courent aucun risque car il n'a pas de créancier, qu'elle est en contact avec Gubbay, que le système présenté par Schaeffer n'est pas convaincant et qu'elle a déjà pris toutes les mesures afin que les fonds de Bernard Barbey et Josette J... ne soient pas en danger, ce qui démontre qu'elle savait avant la réunion que le notaire avait été démis de ses fonctions ; en définitive, par les actes ci-dessus décrits Bérénice de Saint-Etienne a apporté la caution juridique indispensable à une opération intrinsèquement frauduleuse, quand bien même aurait elle ignoré les détournements opérés par Bernard Y..., comme celui-ci l'a indiqué à l'audience ;

elle prétend qu'il s'agissait pour elle de "faire une fin" à la réunion du 17 décembre 1992, mais elle n'a jamais demandé à Bernard Y... de retirer des contrats son nom et sa qualité et la référence au notaire, après cette réunion ; le délit de complicité d'escroquerie est établi" (jugement, pages 35 à 40) ;

"alors 1 ) que : ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui n'indique pas l'origine des constatations de fait lui ayant permis de forger sa conviction ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni du jugement, ni d'aucune pièce de la procédure que la demanderesse aurait été à l'origine du projet de placement litigieux, pour l'avoir préalablement et personnellement expérimenté avec un groupe hollandais, ni que cette opération ait été un échec ; qu'ainsi en se déterminant par un tel motif, sans indiquer l'origine de ses constatations de fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors 2 ) que : et subsidiairement, il résulte expressément des motifs du jugement du 14 janvier 1999, que la cour d'appel tient pour "justes et adoptés", que si le placement FINCONSULT, objet des présentes poursuites, puisait son inspiration dans le prêt contracté par Beeber Corporation, client américain de Bérénice de Saint-Etienne, avec l'intervention du notaire hollandais D..., il constituait néanmoins une dénaturation de ce produit, et avait été élaboré par Bernard Y..., de sorte que la demanderesse ne pouvait avoir valablement prétendu, le 22 septembre 1992, que le produit FINCONSULT, dont l'économie se distinguait de celle du contrat de prêt susvisé, avait déjà été expérimenté (jugement, page 37, in fine) ; que, dès lors, en se déterminant par la circonstance que Bérénice de Saint-Etienne était à l'origine du projet pour l'avoir expérimenté avec un groupe hollandais, opération soldée par un échec, pour en déduire que sa complicité par aide et assistance de Bernard Y... et bernard F... était établie, tout en constatant, par motifs adoptés, que les deux produits financiers précités se distinguaient l'un de l'autre, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"alors 3 ) que : il résulte expressément des motifs du jugement du 14 janvier 1999, que la cour d'appel tient pour "justes et adoptés", que le 22 septembre 1992, Bérénice de Saint-Etienne ignorait que le prêt contracté par son client Beeber Corporation, avec l'intervention du notaire D..., était un échec ; que, dès lors, en estimant que la demanderesse aurait expérimenté le projet avec un groupe hollandais, et qu'elle aurait su - au moment où elle participait au projet litigieux - que l'opération initiale s'était soldée par un échec, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires ;

"alors 4 ) que : il ne résullte d'aucun témoignage ni d'aucune pièce de la procédure que Bérénice de Saint-Etienne aurait vanté les mérites du produit FINCONSULT au cours de la réunion tenue à Paris le 17 décembre 1992 ; qu'au contraire, lors de son audition du 23 juin 1994, André H... qui avait assisté à cette réunion, avait déclaré, que la demanderesse "n'a pas évoqué la société FINCONSULT" ; qu'ainsi, en s'abstenant de préciser l'origine des constatations de fait d'où elle a déduit que Bérénice de Saint-Etienne aurait vanté les mérites du produit FINCONSULT lors de ces réunions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors 5 ) que : dans ses conclusions d'appel, la demanderesse soutenait que, si elle avait assisté à la réunion tenue à Nantes le 22 septembre 1992, dans le bureau de Alain A..., elle ne pouvait avoir présenté le contrat FINCONSULT à ce dernier qui déclarait, le 19 août 1994, avoir rédigé lui-même son contrat, lequel était identique à tous les contrats types signés par les victimes ;

qu'ainsi, en se déterminant par la circonstance que Bérénice de Saint-Etienne avait vanté les mérites du produit FINCONSULT au cours, notamment, de la réunion de Nantes, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions d'appel de ladite prévenue, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"alors 6 ) que : l'intention coupable du complice - caractérisée par la connaissance du caractère frauduleux de l'action

- doit exister au moment même où il fournit son aide ou assistance à l'auteur principal ; qu'en l'espèce, pour déclarer Bérénice de Saint-Etienne coupable de complicité d'escroquerie, les juges du fond se sont bornés à relever qu'elle avait vanté les mérites du projet, apporté sa caution juridique à cette affaire elle-même douteuse et qui s'était avérée frauduleuse, et qu'elle n'aurait fait retirer son nom des contrats qu'en juillet 1993 ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions d'appel de la prévenue, si lors des réunions auxquelles certains clients avaient accepté de participer et indépendamment du caractère douteux ou même frauduleux de l'opération - Bérénice de Saint-Etienne savait déjà que les mises de fonds de clients ne donneraient lieu à aucun placement et que les rendements promis étaient inexistants, et si elle savait ainsi que ces mises de fonds devaient être détournées par Bernard Y..., auteur principal, la cour d'appel qui s'est déterminée par une motivation inopérante, a derechef privé sa décision de base légale" ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par Norbert bahier, pris de la violation des articles 2, 10, 591, 593 du Code de procédure pénale, 9, 11 et 15 de la loi du 28 décembre 1966 modifié, du décret n 76-463 du 16 juin 1967, 331-1 et suivants du nouveau code pénal, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;

"pris de ce que, l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Norbert X... coupable des faits d'escroquerie et de démarchage interdit qui lui était reprochés et en répression l'a condamné à la peine de 2 ans d'emprisonnement dont 1 an assorti du sursis, a, en application de l'article 465 du Code de procédure pénale, décerné à son encontre un mandat d'arrêt et, enfin, a statué sur les intérêts civils ;

"aux motifs que Norbert X... fait plaider la relaxe pour absence d'élément moral de l'éscroquerie et subsidiairement sollicite l'indulgence ; que cependant près de la moitié des capitaux appréhendés ont été démarchés par lui ; qu'ainsi, c'est en se prévalant de sa qualité d'ancien banquier qu'il a fait déposer 1 000 000 francs par Brunel, premier plaignant mis en confiance, car Norbert X... lui a présenté des clients satisfaits, Pavis et Blondeau ; que les faits d'escroquerie sont ainsi prouvés à son égard ainsi que le démarchage à domicile en violation des dispositions légales, comme l'a justement motivé le jugement ; que son rôle dans la manipulation de fonds importants et de compte à compte, le fait qu'il ait déjà été condamné justifient la peine pour partie d'emprisonnement ferme prononcée par les premiers juges ;

"et aux motifs adoptés que Norbert X... est le plus important démarcheur (3 651 548 francs ; qu'il ne remplissait pas les conditions posées par l'article 9 de la loi du 28 décembre 1966 ; que le délit est constitué ; que, sur l'escroquerie, il résulte des témoignages concordants de André H..., M.Pavis, M.Quesnel, Guy C... et Mme I... que lorsqu'l expliquait le produit FINCONSULT, Norbert X... se présentait comme ancien banquier ;

qu'il n'a, à aucun moment, vérifié la réalité des placements dont en sa qualité d'ancien banquier il n'ignorait pas le risque d'autant que les taux pratiqués étaient très supérieurs à ceux du marché officiel, comme l'a déclaré le responsable des fraudes du Crédit Lyonnais ;

qu'il l'admet puisqu'il déclare "j'ai eu des réclamations des clients au sujet du non remboursement de leur placement ou du non versement des intérêts dans le courant du milieu de l'année 1993. Je le répercutais à Bernard Y..., Bernard Y... me donnait comme explication que les banques bloquaient l'argent. j'ai demandé à Bernard Y... des justificatifs de sa bonne foi. Il ne m'en a jamais fourni. Je n'ai jamais eu de preuve effective des placements par Bernard Y..." ; que Bernard Y... confirme que Norbert X... ne lui demandait pas la preuve de la réalité des placements ; que, malgré cela, il a, au moins à trois reprises, argué de retour sur investissements pour convaincre des souscripteurs ; que le cas de Sylvie Z... illustre la pleine conscience de Norbert X... de participer à une escroquerie ; que le 1er février 1993, il lui a fait signer un reçu de 230 000 francs censés représenter la plus value de la première souscription au taux de 67,5 %, la cliente acceptant de réinvestir ce gain prétendu avec promesse d'un capital de 385 250 francs à l'échéance ; que Norbert X..., comme il le reconnaît, ne s'est jamais préoccupé de l'évidence des fonds ; que l'escroquerie, telle que décrite dans l'ordonnance de renvoi, est caractérisée dans tous ses éléments ;

"alors que, d'une part, tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que l'insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en entrant en voie de condamnation à l'encontre du prévenu du chef de délit de démarchage en vue de proposer des placements de fonds, motifs pris de ce que Norbert X... ne remplissait pas les conditions posées par l'article 9 de la loi du 28 décembre 1966, sans même préciser quelles étaient ces conditions et sur quels éléments de fait elle se fondait pour proférer pareille affirmation, la chambre des appels correctionnels n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;

"alors que, d'autre part, le simple mensonge aurait-il déterminé la remise, est insuffisant pour constituer l'escroquerie s'il n'est accompagné d'aucun fait extérieur de nature à lui donner force et crédit ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour déclarer Norbert X... coupable du délit d'escroquerie, qu'il avait fait usage "de sa qualité d'ancien banquier" sans rechercher si ledit usage avait été déterminant de la remise des fonds, la chambre des appels correctionnels n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

"alors qu'en tout état de cause Norbert X... avait rappelé dans ses conclusions d'appel qu'il avait été salarié pendant plusieurs années du Crédit Mutuel où il avait exercé les fonctions de guichetier à Montaudin en Mayenne et à Gonon ; qu'il n'avait donc jamais été banquier ; qu'en déclarant cependant que Norbert X... coupable du délit d'escroquerie, motif pris de ce qu'il avait fait usage de sa qualité d'ancien banquier, sans répondre à ces conclusions péremptoires qui étaient de nature à influer sur la décision entreprise si elles avaient été prises en considération et sans rechercher, comme elle y était invitée, si Norbert X... avait eu un rôle dans la conception du produit qui présentait toutes les apparences de la régularité, la chambre des appels correctionnels n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle au regard des textes visés au moyen ;

"alors que, de quatrième part, selon l'article 121-3 du Code pénal nouveau, entré en vigueur le 1er mars 1994, il n'y a point de crime ou délit, sans intention de le commettre ; que ce texte, exprimé en termes généraux et absolus, est applicable à tous les délits ; qu'en l'espèce, en omettant de constater que le prévenu avait conscience, au moment même de l'accomplissement de prétendues manoeuvres, de la fausseté de l'entreprise ou du caractère chimérique de l'évènement espéré, l'arrêt attaqué n'a pas caractérisé l'intention frauduleuse du prévenu et a, en conséquence, violé les textes susvisés ;

"alors qu'enfin, les juges d'appel ne pouvaient se borner à confirmer la condamnation solidaire de Norbert X... à certaines des réparations civiles sans s'expliquer sur le fait que Norbert X... n'avait touché qu'une rémunération de 100 000 francs et n'avait tiré aucun profit de l'opération ; que la décision se trouve à cet égard dépourvue de toute motivation sérieuse" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont ils étaient saisis, ont caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont ils ont déclaré les prévenus coupables, et ont ainsi justifié l'allocation au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer les préjudices en découlant ;

Qu'il s'ensuit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;

Avocat général : Mme Fromont ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-81130
Date de la décision : 07/02/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre, 03 janvier 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 fév. 2001, pourvoi n°00-81130


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.81130
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