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07/02/2001 | FRANCE | N°00-80328

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 février 2001, 00-80328


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept février deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Alain,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre correctionnelle, en date du 8 décemb

re 1999, qui, pour faux, usage de faux et infraction au Code de la mutualité, l'a condamné...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept février deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Alain,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre correctionnelle, en date du 8 décembre 1999, qui, pour faux, usage de faux et infraction au Code de la mutualité, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 2 amendes de 10 000 francs chacune ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-10, 441-11 du Code pénal, 388, 427 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu (Alain Debeaucé, le demandeur) coupable de faux et usage de faux au préjudice d'une mutuelle (la MFTEL) et, en répression, l'a condamné à une peine d'emprisonnement avec sursis de six mois ;

"aux motifs que, par lettre d'embauche du 4 décembre 1992, Michel Friant, président de l'UME, avait recruté Alain Debeaucé, président en exercice de la MFTEL, en qualité de directeur du secteur "développement et communication" ; qu'en réalité, rédacteur de cette lettre d'embauche, Alain Debeaucé avait fixé lui-même son salaire, Michel Friant ayant signé sans chercher à s'assurer des pouvoirs conférés en violation apparente de la loi ;

qu'à la suite de ce contrat de travail, une convention de service avait été signée le 2 février 1993 par les présidents de l'UME et de la MFTEL pour une durée d'un an, aux termes de laquelle la première mettait à la disposition de la seconde, pour assurer ses activités de développement et de communication, des moyens sous forme de participation financière fixée à 434 000 francs ; que cette convention initiale avait été prolongée par avenants établis a posteriori en décembre 1996 par Alain Debeaucé, et faussement datés des 9 décembre 1993, 6 décembre 1994 et 8 décembre 1995 ; que les sommes portées sur ces avenants correspondaient au salaire annuel d'Alain Debeaucé ; qu'il avait été constaté, fin 1996, au cours d'une inspection de la DRASS, qu'aucun avenant n'avait été passé pour prolonger la convention de services initialement conclue pour un an qui fixait le montant annuel de la participation financière de la MFTEL ; que, pour y remédier, Alain Debeaucé et Michel Friant avaient rédigé trois avenants pour les années 1994, 1995 et 1996, et, pour donner crédit à leurs actes, y avaient inscrit de fausses dates mais ajouté les sommes justes correspondant aux salaires annuels et aux charges perçus par le premier ; qu'ils avaient reconnu avoir commis des faux dans le but de régulariser la situation ; que les prévenus admettaient que les supports matériels dits "avenants" étaient des faux mais faisaient valoir que leur contenu était vrai, conforme à la teneur des relations, sans

altération de la vérité de l'exécution du renouvellement du contrat passé avec l'UME par tacite reconduction, et soutenaient que ces avenants n'avaient fait que constater une situation déjà entièrement consommée, de sorte qu'ils n'avaient pu entraîner un préjudice pour la MFTEL ; que, cependant, lesdits avenants, établis fin 1996 pour valoir accord d'augmentation de salaire pour 1994, 1995 et 1996 constituaient le renouvellement et la modification annuelle par amendement accepté par les deux parties de la convention conclue entre l'UME et la MFTEL, celle-ci étant supposée représentée par le seul bénéficiaire de la convention ; que chaque avenant était par conséquent censé contenir l'accord de la MFTEL et de son conseil d'administration, tandis qu'il était établi qu'il n'avait pas été débattu de son contenu et notamment des augmentations de salaire avant mai ou juin 1996 ;

qu'outre les dates fausses, chaque avenant contenait une altération intellectuelle de la vérité quant à l'accord supposé du conseil d'administration de la MFTEL ; que le quitus donné par l'assemblée générale était un argument sans portée dès lors que l'enregistrement comptable du poste des salaires l'était au titre des "services extérieurs" hors masse salariale ; qu'Alain Debeaucé avait la parfaite conscience de ce que les avenants qui entérinaient une reconduction de la convention sans accord du conseil d'administration pouvaient causer un préjudice notamment financier, ne serait-ce que parce que le conseil d'administration pouvait choisir le recrutement d'un salarié chargé de la communication au coût moins onéreux pour chaque année où la situation aurait dû être examinée ; que tel avait d'ailleurs été la conséquence tirée des auditions des membres du conseil d'administration et du bureau qui, à une exception près, s'étaient déclarés surpris du coût de la convention modifiée par les avenants au fil des années quant à la participation financière de la MFTEL ;

que les délits de faux et d'usage de faux étaient caractérisés en tous leurs éléments contre le demandeur ;

"alors que, d'une part, l'altération frauduleuse de la vérité, élément constitutif du faux, suppose l'indication dans l'écrit de faits matériellement inexacts et ne résulte ni de la fabrication d'un faux document pour relater une opération ayant réellement existé, ni du silence gardé sur l'existence d'un fait ; que la cour d'appel ne pouvait donc déclarer que les trois avenants rédigés fin 1996 pour entériner a posteriori la reconduction pour les années 1994, 1995 et 1996 de la convention initiale du 2 février 1996 constituaient des faux dès lors que, censés contenir l'accord du conseil d'administration de la mutuelle, ils réalisaient une "altération intellectuelle de la vérité quant à (cet) accord", et considérer ainsi que l'altération frauduleuse de la vérité pouvait n'être qu'implicite, purement intellectuelle et résulter d'une simple supposition ;

"alors que, d'autre part, le préjudice sans lequel il n'est pas de faux pénalement punissable doit être la conséquence du faux lui-même, en sorte que si un document faux est établi pour justifier a posteriori d'une opération ayant réellement existé, le préjudice financier éventuellement subi par la victime résulte de l'opération elle-même, qui a été réelle, et non de sa relation dans le document argué de faux ; que la cour d'appel ne pouvait retenir que les avenants établis fin 1996 pour valoir accord d'augmentation de salaire en 1994, 1995 et 1996, en vue d'entériner une reconduction de la convention sans autorisation du conseil d'administration, avaient pu causer un préjudice notamment financier, ne fût-ce que parce que le conseil d'administration aurait pu choisir de recruter un salarié moins onéreux, chaque année où la situation aurait dû être examinée, et que telle avait d'ailleurs été l'opinion des membres du conseil d'administration qui, à une exception près, s'étaient déclarés surpris du coût de la convention modifiée par les avenants au fil des années, et présumer ainsi que le préjudice financier trouvait son origine dans les avenants prétendument constitutifs de faux, bien qu'il résultât de ses propres constatations, ces avenants ayant été établis a posteriori pour régulariser une situation consommée, que cet éventuel préjudice découlait de la reconduction de la convention et non de sa relation dans les avenants argués de faux" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 4 décembre 1992, Alain Debeaucé, président de la mutuelle familiale des travailleurs d'Eure-et-Loire (MFTEL), a été embauché par Michel Friant, président de l'union des mutuelles de l'Essonne (UME), en qualité de directeur du secteur "développement et communication", tout en conservant ses autres fonctions ; que, le 2 février 1993, les deux présidents ont signé, pour une durée d'un an, une convention de services aux termes de laquelle l'UME mettait à disposition de la MFTEL des moyens pour assurer les activités de développement et de communication ; que cette convention s'est traduite par la mise à disposition, par l'UME, d'Alain Debeaucé auprès de la MFTEL ; que le salaire versé à Alain Debeaucé par l'UME a été ensuite facturé par l'UME à la MFTEL ; qu'à la suite de contrôles effectués par des agents de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales (DRASS), trois avenants à cette convention ont été établis en décembre 1996 ; que, datés de décembre 1993, 1994 et 1995, ils ont porté le montant de cette participation, correspondant au salaire d'Alain Debeaucé, à 546 603 puis 598 401 puis 647 258 francs pour les années 1994, 1995 et 1996 ;

Qu'Alain Debeaucé, renvoyé devant le tribunal correctionnel notamment pour faux et usage de faux, a été relaxé de ces chefs ;

Attendu que, pour le déclarer coupable de ces délits, la cour d'appel énonce que les avenants constituaient le renouvellement et la modification annuelle, par amendements acceptés par les deux parties de la convention conclue entre l'UME et la MFTEL, celle-ci étant supposée représentée par le seul bénéficiaire de la convention ; qu'elle ajoute que chaque avenant contenait notamment des dates fausses ;

Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, d'où il résulte que les avenants fabriqués par le prévenu et sur lesquels il avait apposé de fausses dates, étaient destinés à faire la preuve du renouvellement de la convention initiale, l'arrêt attaqué n'encourt pas la censure ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;

Avocat général : Mme Fromont ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-80328
Date de la décision : 07/02/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 9ème chambre correctionnelle, 08 décembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 fév. 2001, pourvoi n°00-80328


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.80328
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