AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Philippe Y..., demeurant ... Ecole Normale d'Instituteurs, 87000 Limoges,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 septembre 1998 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), au profit :
1 / de l'Union départemental CFDT de la Haute-Vienne, dont le siège est ...,
2 / de la Caisse régionale du Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest (CRCAM), dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ;
La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest a formé un pourvoi provoqué ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen, faisant fonctions de président, Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire rapporteur, MM. Brissier, Finance, conseillers, M. Poisot, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret, Desaché et Laugier, avocat de la Caisse régionale du Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. Y... a été engagé, le 19 février 1993, en qualité d'agent d'application par le G.I.E. Logistique informatique Centre-Ouest prestations, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée d'une durée de trois mois conclu pour remplacer un agent en arrêt maladie ; que le 11 mai 1993, un avenant précisait que le contrat serait renouvelé "au mois le mois" en fonction de l'absence de l'agent remplacé ; que le 1er juillet 1993, le contrat de travail du salarié a été repris par la Caisse régionale de Crédit agricole du Centre-Ouest en application de l'article L. 122-12 du Code du travail ; que le 7 octobre 1994, la Caisse informait M. Y... de la reprise sous le régime du mi-temps thérapeutique de M. X... qu'il remplaçait et de la poursuite de son contrat de travail ; que le contrat de travail de M. Y... a été régulièrement prolongé durant le mi-temps thérapeutique de M. X... ; que le 14 mars 1995, l'employeur a indiqué à M. Y... que son contrat de travail prendrait fin le 3 avril 1995, en raison de la reprise à cette date par le salarié de ses fonctions à temp plein ; que M. Y... a saisi la juridiction prud'homale de différentes demandes ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal formé par M. Y... :
Attendu que le salarié fait grief à la cour d'appel de l'avoir débouté de ses demandes de classement au coefficient 365 de la convention collective nationale des banques et de rappel de salaires ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés et sans être tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que si le salarié occupait les mêmes fonctions que M. X..., il n'avait pas la même qualification ; qu'elle a exactement décidé que le coefficient réclamé ne devait pas lui être reconnu ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi principal :
Attendu que le salarié fait encore grief à la cour d'appel de ne pas lui avoir alloué des points garantis par l'article 27 de la convention collective nationale des Banques après un an d'ancienneté ;
Mais attendu que cette demande qui n'a pas été formée en cause d'appel, est irrecevable devant la Cour de Cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l'article L. 122-3-1 du Code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, lorsqu'un contrat est conclu en application de l'article L. 122-1-1.1 du Code du travail, il doit comporter le nom et la qualification du salarié remplacé ; qu'en l'absence de cette mention, le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée et l'employeur ne peut écarter la présomption légale ainsi instituée en apportant la preuve de la connaissance qu'avait le salarié du nom et de la qualification de la personne remplacée ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande de requalification et d'indemnités de rupture, la cour d'appel a retenu par motifs adoptés que s'il était exact que le contrat du 19 février 1993 ne mentionnait pas le nom et la qualification du salarié remplacé, l'article L. 122-3-1 du Code du travail n'attachait aucune conséquence à l'omission du nom et de la qualification du salarié remplacé au regard de la qualification du contrat ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi provoqué formé par la CRCO :
Vu l'article 549 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'appel incident ou provoqué peut émaner de toute personne ou être dirigé contre toute personne ayant été partie en première instance ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel incident formé par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest à l'encontre de la CFDT, la cour d'appel a énoncé que l'appel principal formé par M. Y... ne portait pas sur les dispositions du jugement relatives à l'intervention de la CFDT et que cette organisation syndicale n'avait donc pas la qualité d'intimée dans le cadre de la procédure ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la CFDT avait été partie en première instance et que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest avait été condamnée à lui verser des dommages-intérêts, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen du pourvoi principal,
CASSE et ANNULE mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de requalification et d'indemnités de rupture et déclaré irrecevable l'appel incident formé par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre-Ouest, l'arrêt rendu le 29 septembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ;
Laisse à chaque partie la charge respective de ses dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille un.