AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / Mme Marie-Françoise Y..., épouse A..., exerçant sous l'enseigne "Chez Benjamin tout est bien", ...,
2 / Mme Denise X..., épouse Y..., domiciliée ... 1er,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 mai 1998 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Jean-Louis Z..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, M. Finance, conseiller, M. Poisot, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de Mmes A... et Y..., de Me Guinard, avocat de M. Z..., les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Z..., employé par Mme A..., a été licencié par lettre du 3 septembre 1994, portant la mention "reçu en main propre" suivie de la signature du salarié ; qu'à la même date, une transaction a été conclue entre les parties ; que contestant la validité de la transaction, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de demandes en paiement de rappel de salaire, d'indemnités de rupture et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 29 mai 1998) d'avoir accueilli les demandes du salarié, alors, selon le moyen :
1 / que si une transaction ne peut être conclue qu'après rupture définitive du contrat de travail, une telle rupture peut parfaitement résulter de la remise en main propre au salarié de la lettre de licenciement ; qu'ainsi en considérant qu'une transaction n'aurait pu intervenir en l'espèce que postérieurement à la réception, par le salarié, de la lettre de licenciement, peu important que cette lettre ait été préalablement remise en main propre à son destinataire, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 122-14-1 du Code du travail et 2044 du Code civil ;
2 / que l'employeur indiquait clairement dans ses conclusions d'appel que les faits reprochés au salarié et la perte de confiance en résultant "justifiaient parfaitement un licenciement pour faute grave" ; qu'ainsi en affirmant, pour écarter l'existence de concessions de la part de l'employeur, que ce dernier aurait reconnu dans ses écritures que la perte de confiance invoquée dans la lettre de licenciement ne pouvait constituer une faute grave, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions dont elle était saisie et a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / qu'en déclarant la transaction inopposable à M. Z..., sans avoir autrement caractérisé l'absence de concessions réciproques, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-14-1 du Code du travail et 2044 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a décidé, à bon droit, qu'il résulte des articles L. 122-14 et L. 122-14-7 du Code du travail et 2044 et suivants du Code civil qu'une transaction ayant pour objet de régler les conséquences pécuniaires de la rupture du contrat de travail ne peut être valablement conclue qu'une fois la rupture devenue définitive par la réception, par le salarié, de la lettre de licenciement dans les conditions requises par l'article L. 122-14-1 du Code du travail ;
Et attendu que la cour d'appel a constaté que la transaction avait été conclue en l'absence de notification préalable du licenciement dans les formes légales ; que, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches du moyen, elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mmes A... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande Mmes A... et Y... ; les condamne à payer à M. Z... la somme de 8 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille un.