AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Gérard X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 31 janvier 1997 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit de l'Union de crédit pour le bâtiment, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, MM. Merlin, Le Roux-Cocheril, Finance, Texier, Mmes Lemoine Jeanjean, Quenson, M. Bailly, conseillers, M. Poisot, Mmes Maunand, Bourgeot, MM. Soury, Liffran, Besson, Mme Ruiz-Nicoletis, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. X..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de l'Union de crédit pour le bâtiment, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 121-1 du Code du travail ;
Attendu que l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont données à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ;
Attendu que, par contrat du 8 janvier 1976, a été confié à M. X... par l'Union de crédit du bâtiment (UCB) un "mandat d'agent" avec pour mission de recueillir et de transmettre à cet établissement les demandes de prêt entrant dans son domaine d'activité ; que plusieurs contrats ayant le même objet ont été par la suite conclus, sans discontinuité, entre les parties ; que M. X... a mis fin à ses relations contractuelles avec l'UCB par lettre du 6 juillet 1992 ; que soutenant avoir eu, en réalité, la qualité de salarié de l'UCB, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir, notamment, le paiement d'une indemnité de 13e mois, des indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que l'UCB a décliné la compétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de grande instance ;
Attendu que, pour déclarer incompétente la juridiction prud'homale pour statuer sur le litige opposant les parties, l'arrêt attaqué statuant sur contredit, énonce que les contrats conclus successivement entre la société UCB et M. X... ne contiennent aucune clause faisant naître, à la charge de ce dernier, des obligations caractérisant un lien de subordination ; que la "politique par objectifs" ou les "objectifs de production" devaient conventionnellement être déterminés par la commune volonté des parties ; que l'organisation de l'activité de M. X... n'était soumise à aucune directive de nature contraignante, la référence à un "contrôle" étant légitime dans une convention de mandat ;
Qu'en statuant ainsi, en se fondant uniquement sur les dispositions des contrats, sans rechercher si, indépendamment de ces dernières, M. X... n'était pas soumis, dans l'accomplissement de son travail, aux ordres et directives de l'UCB, qui avait le pouvoir d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements ou s'il n'exerçait pas son activité au sein d'un service organisé, dont les conditions de travail étaient unilatéralement déterminées par l'UCB, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 janvier 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne l'Union de crédit pour le bâtiment aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille un.