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17/01/2001 | FRANCE | N°00-82381

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 janvier 2001, 00-82381


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept janvier deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Jean-Marie,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 21 mars 2000, qui, pour agress

ions sexuelles autres que le viol et atteintes sexuelles, sur mineurs de 15 ans par p...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept janvier deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Jean-Marie,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 21 mars 2000, qui, pour agressions sexuelles autres que le viol et atteintes sexuelles, sur mineurs de 15 ans par personne ayant autorité, l'a condamné à 5 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis, à l'interdiction pendant 5 ans de toute activité professionnelle ou sociale en contact avec des mineurs ainsi qu'à 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et qui a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 176, 177, 188, 388, 593 du Code de procédure pénale, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Marie Y... coupable d'agressions sexuelles et d'atteintes sexuelles sur mineur de 15 ans avec abus d'autorité ;

" aux motifs que C... a cité le fait qu'après avoir reçu un choc aux genoux, le prévenu l'avait fait se dévêtir, lui avait décalotté la verge et avait procédé à une prise de température rectale ; que la jeune victime s'est plainte en outre d'avoir subi deux prises de température rectale, en août 1996 et février 1997, par le prévenu ; que D... indique qu'après une chute sur le coccyx à Strezza (Italie), le prévenu l'avait fait se dévêtir et lui avait imposé un long et douloureux toucher rectal ;

qu'en février 1996 et en août 1997 en Suisse, le prévenu avait pratiqué des prises de température rectale ; que le jeune M... a estimé " anormale " la prise de température rectale par le prévenu ; qu'il résulte encore des éléments du dossier que Jean-Marie Y... a procédé en 1994 à l'examen de l'anus de T..., ce qui a entraîné pour ce dernier une grande gêne ; que le prévenu a admis que le toucher rectal pratiqué par lui sur le jeune D... correspondait à la réalisation d'un désir d'ordre sexuel ; que le prévenu n'avait aucune formation médicale ou d'infirmier alors que le geste précité constitue à l'évidence un acte médical pour lequel il n'avait aucune compétence, l'ayant au demeurant pratiqué sans gants et sans connaissance médicale particulière ; que l'expertise a mis en lumière sa tendance à rationaliser sa déviance sexuelle en actes infirmiers, ce qui lui permet d'éviter la mise en place d'une culpabilité par rapport aux faits reprochés ; que le jugement a retenu a bon droit sa culpabilité ;

" alors que, par une ordonnance définitive de non-lieu partiel du 20 janvier 1999, le juge d'instruction a exclu de la prévention les faits relatifs à des soins infirmiers notamment les prises de température rectale et le toucher rectal justifiés médicalement ; que ces faits ne pouvaient donc être examinés et faire l'objet d'une déclaration de culpabilité devant la juridiction de jugement ; qu'en jugeant le prévenu sur des faits expressément exclus de sa saisine par l'ordonnance de renvoi, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;

Attendu qu'après avoir rappelé les infractions retenues par le juge d'instruction dans son ordonnance de renvoi et objet de la prévention, l'arrêt attaqué, confirmant sur ce point le jugement, déclare Jean-Marie Y... coupable des faits qui lui sont reprochés ;

Attendu qu'en cet état, il n'importe que, dans la motivation de sa décision, la cour d'appel ait évoqué d'autres faits écartés des poursuites par une ordonnance de non-lieu partiel ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-29, 222-30 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, du principe " non bis in idem " ;

" en ce que le demandeur a été déclaré coupable d'agressions sexuelles sur mineur de 15 ans avec abus d'autorité ;

" aux motifs qu'après avoir effectué librement des déclarations détaillées, précises et très personnelles à trois reprises au cours de sa garde à vue et devant le juge d'instruction lors du procès-verbal de première comparution, le prévenu est revenu sur des aveux spontanés, minimisant la portée de ses actes, que cette deuxième thèse du prévenu ne correspond pas à certains éléments objectifs du dossier, comme par exemple, la pratique de massages sur le jeune D..., préalablement dévêtu intégralement, alors que ce dernier se plaignait d'une poussière dans l'oeil ; que le prévenu a nié alors avoir tiré du plaisir à l'occasion de ces faits, de même que tout assouvissement de pulsions homosexuelles lors de ces " soins infirmiers ", pratiqués selon le prévenu, sur la demande expresse des enfants, ce que les déclarations effectuées par ces derniers contredisent formellement ; qu'il n'est pas inutile de préciser qu'il n'a pas été mis en relief, au cours de la procédure, de motif de litige qui auraient pu motiver les accusations précises et concordantes des jeunes, qui de surcroît se sont heurtés très rapidement aux pressions de l'association et même de leurs propres parents ; qu'il résulte de leurs déclarations que les jeunes ne souhaitaient pas parler, car le prévenu, aumônier, directeur de chorale et de colonie de vacances, était très connu et respecté comme tel ; que l'expertise a mis en lumière sa tendance à rationaliser sa déviance sexuelle en actes infirmiers, ce qui lui permet d'éviter la mise en place d'une culpabilité par rapport aux faits reprochés ; qu'il a encore été relevé que le prévenu agit en toute circonstance avec un bon niveau de conscience et d'intentionnalité ;

" et aux motifs adoptés que toutes les conditions posées par les articles visés dans la prévention sont bien réunies en l'espèce ; que les atteintes sexuelles sont caractérisées par les gestes physiques à caractère sexuel imposés aux mineurs ; que l'intention est manifestement décrite par Jean-Marie Y... lui-même au cours de son audition en garde à vue la recherche de son plaisir sexuel personnel, même s'il est vrai que dans certains cas, on peut admettre que ses actes s'inscrivaient également dans le cadre thérapeutique ; que l'autorité de Jean-Marie Y... est incontestable et incontestée ; que dans le cas des agressions sexuelles, il est clair que Jean-Marie Y... n'a agi ni avec violences, ni avec menace ni avec surprise, mais avec une certaine contrainte morale qui ressort tout au long de ce dossier ; l'incapacité dans laquelle se trouvaient les enfants de lui dire non, même lorsqu'ils prenaient leur température seuls par exemple, le fait de ne pas demander l'autorisation aux enfants et de leur imposer ses pratiques ;

" 1) alors que, le délit d'agression sexuelle suppose l'usage, par son auteur, de violence, contrainte, menace ou surprise ; que cet élément ne peut se déduire de la seule minorité de la victime ou de la qualité de personne ayant autorité de l'auteur des faits ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui, par motifs adoptés, n'a retenu la qualification d'agression sexuelle qu'en raison de l'âge des victimes et d'une " contrainte morale " caractérisée par l'incapacité dans laquelle se trouvaient les enfants de dire non, n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

" 2) alors que, un même fait ne saurait être retenu à la fois comme élément constitutif d'une infraction et comme circonstance aggravante de la même infraction ; qu'en retenant, comme élément constitutif de l'infraction d'agression sexuelle, l'autorité morale dont aurait disposé le demandeur sur les enfants et en retenant ensuite le même fait d'autorité comme circonstance aggravante de l'infraction, la cour d'appel a violé le principe " non bis in idem " et les textes susvisés " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-25, 225-26 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Marie Y... coupable d'atteintes sexuelles avec abus d'autorité ;

" aux motifs qu'après avoir effectué librement des déclarations détaillées, précises et très personnelles à trois reprises au cours de sa garde à vue et devant le juge d'instruction lors du procès-verbal de première comparution, le prévenu est revenu sur des aveux spontanés, minimisant la portée de ses actes ; que cette deuxième thèse du prévenu ne correspond pas à certains éléments objectifs du dossier, comme par exemple, la pratique de massages sur le jeune D..., préalablement dévêtu intégralement, alors que ce dernier se plaignait d'une poussière dans l'oeil ; que le prévenu a nié alors avoir tiré du plaisir à l'occasion de ces faits, de même que tout assouvissement de pulsions homosexuelles lors de ces " soins infirmiers ", pratiqués selon le prévenu, sur la demande expresse des enfants, ce que les déclarations effectuées par ces derniers contredisent formellement ; qu'il n'est pas inutile de préciser qu'il n'a pas été mis en relief, au cours de la procédure, de motif de litige qui auraient pu motiver les accusations précises et concordantes des jeunes, qui de surcroît se sont heurtés très rapidement aux pressions de l'association et même de leurs propres parents ; qu'il résulte de leurs déclarations que les jeunes ne souhaitaient pas parler, car le prévenu, aumônier, directeur de chorale et de colonie de vacances, était très connu et respecté comme tel ; que l'expertise a mis en lumière sa tendance à rationaliser sa déviance sexuelle en actes infirmiers, ce qui lui permet d'éviter la mise en place d'une culpabilité par rapport aux faits reprochés ; qu'il a encore été relevé que le prévenu agit en toute circonstance avec un bon niveau de conscience et d'intentionnalité ;

" et aux motifs adoptés que toutes les conditions posées par les articles visés dans la prévention sont bien réunies en l'espèce ; que les atteintes sexuelles sont caractérisées par les gestes physiques à caractère sexuel imposés aux mineurs ; que l'intention est manifestement décrite par Jean-Marie Y... lui-même au cours de son audition en garde à vue la recherche de son plaisir sexuel personnel, même s'il est vrai que dans certains cas, on peut admettre que ses actes s'inscrivaient également dans le cadre thérapeutique ; que l'autorité de Jean-Marie Y... est incontestable et incontestée ;

" alors que le demandeur a contesté la connotation sexuelle des faits qui lui étaient reprochés et rappelé que ces faits étaient justifiés dans le cadre de soins infirmiers et d'hygiène qu'il assumait en tant que responsable de jeunes enfants pré-adolescents ; qu'en se bornant pour retenir la qualification d'atteinte sexuelle à faire état d'une certaine gêne des enfants sans rechercher si objectivement les actes reprochés à Jean-Marie Y... ne pouvaient se concevoir dans le cadre des fonctions qu'il exerçait, peut important à cet égard qu'il ait les qualifications légales lui reconnaissant le titre d'infirmier ou de médecin, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer les préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-82381
Date de la décision : 17/01/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, 21 mars 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jan. 2001, pourvoi n°00-82381


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.82381
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