Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 122-14-2 du Code du travail, ensemble l'article L. 122-40 du même Code ;
Attendu que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent le cadre du débat ;
Attendu que M. Y... au service de la Caisse d'épargne de Picardie depuis le 1er juin 1983, en dernier lieu en qualité de responsable d'agence chargé de clientèle, a été licencié le 10 avril 1995 avec dispense d'exécuter son préavis ; que contestant le bien-fondé de cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir des dommages intérêts pour licenciement irrégulier, licenciement sans cause réelle et sérieuse et préjudice moral ;
Attendu que pour rejeter les demandes de M. Y..., la cour d'appel a énoncé que dans la longue lettre de licenciement qu'elle a adressée au salarié, la Caisse d'épargne de Picardie a rappelé les libéralités consenties par Mme X..., cliente âgée de l'agence et sans héritiers réservataires, au profit du responsable de cette agence ou de membres de sa famille ; qu'elle n'a pas reproché à M. Y... des manoeuvres illicites ou frauduleuses pour obtenir ces libéralités ; qu'elle a seulement souligné l'ambiguïté de la situation que la réserve et la prudence de tout agent de banque devraient conduire à éviter ; qu'elle a analysé les conséquences de la situation sur l'image de l'entreprise vue par la clientèle ; que la Caisse d'épargne n'a imputé au salarié aucune faute particulière, mais constatant une situation dont elle a analysé les conséquences néfastes pour elle, en a tiré la conclusion que la confiance nécessaire entre elle et son collaborateur, responsable d'agence, ne pouvait plus exister ;
Attendu, cependant, que la lettre de licenciement énonçait " Devant ces faits, ce qui vous est personnellement reproché, concerne d'une part la relation commerciale avec votre cliente, et d'autre part, votre comportement à l'égard de la Caisse d'épargne et ses instances responsables... Face à votre attitude, aux faits constatés et au discrédit que cette situation a jeté sur l'entreprise, il ne nous est pas possible de maintenir notre collaboration dans le climat normal de confiance qui doit régner entre une entreprise et ses collaborateurs " ; qu'il résulte des termes de cette lettre que l'employeur reprochait au salarié des fautes : comportement avec une cliente consistant à s'être fait consentir, pour lui-même et sa famille, des libéralités, et a ainsi prononcé un licenciement disciplinaire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième et quatrième moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.