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22/12/2000 | FRANCE | N°98-21238

France | France, Cour de cassation, Assemblee pleniere, 22 décembre 2000, 98-21238


ARRÊT N° 4

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce ou observation présentée au juge en vue d'influencer sa décision ;

Attendu que M. Y..., qui avait déclaré être atteint d'une

maladie professionnelle à la suite d'une irradiation subie sur son lieu de travail, a ...

ARRÊT N° 4

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce ou observation présentée au juge en vue d'influencer sa décision ;

Attendu que M. Y..., qui avait déclaré être atteint d'une maladie professionnelle à la suite d'une irradiation subie sur son lieu de travail, a présenté diverses pathologies non désignées dans le tableau n° 6 des maladies professionnelles relatif aux affections provoquées par les rayonnements ionisants ; que la caisse primaire d'assurance maladie, estimant qu'il n'était pas affecté d'une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 66,66 %, a refusé la prise en charge demandée par l'intéressé au titre de la législation sur les maladies professionnelles ; que son recours contre cette décision ayant été rejeté, M. Y... a interjeté appel devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;

Attendu que l'arrêt a été rendu après examen préalable du dossier par un médecin qualifié, choisi sur une liste établie par le ministre chargé de la Sécurité sociale ou du ministre chargé de l'Agriculture, dont l'avis n'a pas été communiqué aux parties ; qu'il en résulte que l'appelant a été privé de la faculté de prendre connaissance et de discuter les observations présentées par le médecin qualifié à la Cour nationale ;

Que la procédure suivie ayant été dépourvue de caractère contradictoire, la Cour nationale a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 septembre 1997, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail autrement composée.

MOYENS ANNEXES

Moyen produit par M. X..., avocat aux Conseils pour M. Y....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la décision de la commission régionale d'invalidité d'Ile-de-France selon laquelle à la date de sa stabilisation, la maladie déclarée comme professionnelle par M. Y... René, le 25 octobre 1977, n'entraînait pas une incapacité permanente partielle au moins égale aux deux tiers.

AUX MOTIFS QUE considérant l'avis du médecin qualifié près la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification qui avait conclu son rapport en déclarant qu'à la date du 25 octobre 1977, l'incapacité permanente de l'état décrit était largement inférieure au taux de 66,66 %, les documents du dossier et l'ensemble des éléments d'appréciation visés à l'article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale, il y avait lieu de confirmer la décision de la commission régionale en estimant inférieur à 66,66 % à la date du 25 octobre 1977 le taux de l'incapacité permanente relative à l'affection en cause ;

ALORS QUE D'UNE PART il ne ressort d'aucune des constatations de l'arrêt attaqué que l'avis du médecin qualifié au vu duquel la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidentés du travail ait été communiqué au docteur Z... médecin désigné par M. Y... comme le prescrit l'article R. 143-29 du Code de la sécurité ociale qui a ainsi été violé ;

ALORS QUE D'AUTRE PART, l'évaluation du taux d'incapacité permanente doit être faite à la date à laquelle la maladie a été stabilisée, qu'en l'espèce M. Y... avait demandé que ce taux soit fixé au 4 janvier 1978 date à laquelle il a demandé à bénéficier des prestations de l'assurance maladie et non pas au 25 octobre 1998 date à laquelle la maladie a été déclarée par l'employeur, que l'arrêt attaqué en retenant néanmoins cette dernière date a entaché sa décision d'une contradiction et violé les articles L. 434-2, L. 461-1 et R. 461-8 du Code de la sécurité sociale et l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Assemblee pleniere
Numéro d'arrêt : 98-21238
Date de la décision : 22/12/2000
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - CONTENTIEUX - Contentieux spéciaux - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Composition - Fonctionnaire dépendant du ministère concerné - Convention européenne des droits de l'homme - Tribunal indépendant et impartial (non).

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droit à un tribunal impartial - Sécurité sociale - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Composition 1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droit à un tribunal indépendant - Sécurité sociale - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Composition - Fonctionnaire - Incompatibilité 1° COURS ET TRIBUNAUX - Composition - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Présence d'un fonctionnaire du ministère chargé de la Sécurité sociale ou de l'Agriculture - Tribunal indépendant et impartial (non).

1° Le fait que la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail comprenne des fonctionnaires de catégorie A, en activité ou honoraires, du ministère chargé de la Sécurité sociale ou du ministère chargé de l'Agriculture, nommés sans limitation de durée, de sorte qu'il peut être mis fin à tout moment et sans condition à leurs fonctions par les autorités de nomination au nombre desquelles se trouve le ministre exerçant ou ayant exercé, lorsqu'ils étaient en activité, le pouvoir hiérarchique sur eux, constitue des circonstances de nature à porter atteinte à l'indépendance de cette juridiction et à faire naître un doute légitime sur son impartialité. Il résulte de la présence, au sein des membres de la formation de jugement de cette Cour, d'un fonctionnaire honoraire du ministère chargé de la Sécurité sociale, que la cause n'a pas été entendue par un tribunal indépendant et impartial au sens de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (arrêts n°s 1 et 2).

2° SECURITE SOCIALE - CONTENTIEUX - Contentieux spéciaux - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Procédure - Droits de la défense - Avis du médecin qualifié - Défaut de communication - Portée.

2° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droits de la défense - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Avis du médecin qualifié - Défaut de communication - Portée 2° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droits de la défense - Sécurité sociale - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Avis du médecin qualifié - Communication aux parties - Nécessité 2° PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Sécurité sociale - Contentieux - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Avis du médecin qualifié - Communication aux parties - Nécessité.

2° Il résulte de ce que l'arrêt prononcé par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a été rendu après examen préalable du dossier par un médecin qualifié, choisi sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de la Sécurité sociale ou du ministre chargé de l'Agriculture, dont l'avis n'a pas été communiqué aux parties, que l'appelant a été privé de la faculté de prendre connaissance et de discuter les observations présentées par ce médecin. La procédure suivie ayant été ainsi dépourvue de caractère contradictoire, la Cour nationale a violé tant les dispositions de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile que celles de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (arrêts n°s 1, 3 et 4).

3° SECURITE SOCIALE - CONTENTIEUX - Contentieux spéciaux - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Procédure - Droits de la défense - Appelant - Convocation - Mention nécessaire.

3° SECURITE SOCIALE - CONTENTIEUX - Contentieux spéciaux - Contentieux technique - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Débats - Appelant - Audition publique - Possibilité - Mention nécessaire 3° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droit à la publicité des débats - Cours et tribunaux - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification - Appelant - Convocation - Mention nécessaire 3° PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Violation - Principe de la contradiction - Domaine d'application - Cour nationale de l'incapacité et de la tarification.

3° Dès lors qu'il ne ressort pas des mentions de l'arrêt attaqué que la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ait convoqué l'appelant à l'audience et organisé des débats lui permettant de faire valoir publiquement ses prétentions, cette juridiction a violé tant les dispositions des articles 14 et 433 du nouveau Code de procédure civile que celles de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (arrêts n°s 1 et 5).


Références :

2° :
nouveau Code de procédure civile 14, 433
3° :
3° :
Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales art. 6.1
nouveau Code de procédure civile 16

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, 17 septembre 1997

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 2000-03-09, Bulletin 2000, V, n° 97, p. 76 (cassation)

arrêt cité. EN SENS CONTRAIRE : (1°). Chambre sociale, 1998-05-28, Bulletin 1998, V, n° 290, p. 219 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Ass. Plén., 22 déc. 2000, pourvoi n°98-21238, Bull. civ. 2000 A. P. N° 12 p. 21
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2000 A. P. N° 12 p. 21

Composition du Tribunal
Président : Premier président :M. Canivet.
Avocat général : Avocats généraux : M. Lyon-Caen (arrêts nos 1, 2, 3 et 4), M. Joinet (arrêt n° 5).
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Etienne, assisté de M. Liffran, conseiller référendaire et de Mme Marie-Aleth Trapet, auditeur.
Avocat(s) : Avocats : M. Balat (arrêt n° 1), la SCP Lesourd (arrêt n° 2), la SCP Coutard et Mayer (arrêts nos 3 et 4), la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez (arrêt n° 5).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.21238
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