AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Michel X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 15 septembre 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre sociale), au profit de M. Didier Z..., demeurant bât. 3 - Y... Colette, 83310 Cogolin,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 novembre 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ransac, Coeuret, conseillers, M. Rouquayrol de Boisse, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, les observations de SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. X..., les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Z... qui était salarié de M. X... depuis le 15 septembre 1997 en qualité de chauffeur-manutentionnaire, a été licencié le 2 novembre 1993 pour le motif suivant : "nous accusons une chute de notre chiffre d'affaires d'un tiers au 30 septembre 1993 par rapport au 30 septembre 1992" ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 septembre 1998) de l'avoir condamné à payer des dommages-intérêts à M. Z... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes des articles L. 122-14-2 et L. 321-1 du Code du travail, la lettre de licenciement doit énoncer les motifs économiques invoqués par l'employeur, étant précisé que constitue un licenciement pour motif économique celui qui est effectué par un employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié et résultant, notamment, de la suppression d'un emploi consécutive à des difficultés économiques ; que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait invoqué, à l'appui du licenciement pour motif économique de M. Z..., la chute d'un tiers de son chiffre d'affaires d'où il résulte que le licenciement n'avait pas été prononcé pour un motif personnel au salarié mais qui a toutefois déclaré que le licenciement était nécessairement sans cause réelle et sérieuse, faute pour l'employeur d'avoir dit que les difficultés économiques rencontrées avaient pour conséquence la suppression de l'emploi du salarié, a violé les dispositions susvisées ;
2 / que conformément à l'article L. 122-14-3 du Code du travail, en cas de litige relatif à la cause de licenciement, les juges doivent apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur au vu des éléments fournis par les parties ; qu'en retenant que le licenciement de M. Z... était nécessairement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas examiné les documents transmis par l'employeur à M. Z..., sur sa demande, afin de justifier le motif économique invoqué et qui n'a pas pris en considération les explications relatives au choix du salarié licencié a, en statuant ainsi, violé la disposition susvisée ;
Mais attendu que, selon l'article L. 122-14-2 du Code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs de licenciement dans la lettre de licenciement ; qu'en application de l'article L. 321-1 du même Code est un motif économique, le motif non inhérent à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail consécutives à des difficultés économiques, des mutations technologiques, ou une réorganisation de l'entreprise ; qu'il en résulte que la lettre de licenciement donnée pour motif économique doit mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ; que l'énoncé d'un motif imprécis équivaut à une absence de motif ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la lettre de licenciement se bornait à faire état d'une baisse du chiffre d'affaires, ce qui ne constituait pas l'énoncé du motif exigé par la loi, a décidé, à bon droit, que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que le pourvoi est abusif ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 628 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à une amende civile de 10 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille.