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12/12/2000 | FRANCE | N°98-45917

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 décembre 2000, 98-45917


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Didier Y..., exerçant sous l'enseigne "La Taverne Irlandaise", demeurant ... Saint-Omer,

en cassation d'un arrêt rendu le 30 septembre 1998 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit de M. Jean-Marc X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Poisot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Merli

n, Le Roux-Cocheril, Finance, Texier, Mme Quenson, conseillers, Mme Maunand, MM. Soury, Be...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Didier Y..., exerçant sous l'enseigne "La Taverne Irlandaise", demeurant ... Saint-Omer,

en cassation d'un arrêt rendu le 30 septembre 1998 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit de M. Jean-Marc X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Poisot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Le Roux-Cocheril, Finance, Texier, Mme Quenson, conseillers, Mme Maunand, MM. Soury, Besson, Mme Ruiz-Nicoletis, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Poisot, conseiller référendaire, les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Y..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. X... a souscrit, le 30 décembre 1995 un contrat d'apprentissage d'une durée de deux ans pour préparer un CAP de cuisine ; que ce contrat a été transmis à l'autorité compétente le 1er mars 1996, qui a refusé tardivement de l'enregistrer le 7 mai 1995 ;

qu'un nouveau contrat conclu le 29 mai 1996 pour une durée de 18 mois en vue de la préparation d'un BEP d'hôtellerie restauration a également fait l'objet d'un refus d'enregistrement par décision notifiée le 18 juin 1996 ; que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir la requalification de son contrat en contrat à durée déterminée et faire constater la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur pour non-paiement des salaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 1998) d'avoir dit que les parties n'étaient pas liées par le contrat d'apprentissage conclu le 30 septembre 1995, d'avoir requalifié le contrat d'apprentissage du 29 mai 1996 en contrat à durée déterminée et de l'avoir condamné à payer différentes sommes au titre de la rupture de ce contrat, alors, selon le moyen :

1 / que, selon l'article L. 117-14 du Code du travail, l'absence de réponse de l'administration à la demande d'enregistrement d'un contrat d'apprentissage, dans le délai de quinze jours à compter de la réception de ce contrat, vaut acceptation ; que l'article L. 117-14 dispose que faute de décision de refus d'enregistrement du contrat d'apprentissage dans ce même délai, l'enregistrement est de droit ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat d'apprentissage de M. X..., reçu par la DDTE le 1er mars 1996, a fait l'objet d'un refus d'enregistrement qui n'a été notifié à M. Y... que le 7 mai 1996 ; que dès lors, en décidant que M. X... n'était pas employé par M. Y... en vertu d'un contrat d'apprentissage dûment enregistré, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui découlaient de ses propres constatations, en violation des textes précités ;

2 / que la conclusion entre les mêmes parties, postérieurement à l'enregistrement de droit d'un contrat d'apprentissage, d'un nouveau contrat, portant sur une formation différente, ne vaut pas, en l'absence de stipulation expresse en ce sens, renonciation à se prévaloir de l'enregistrement du premier ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat d'apprentissage dont l'enregistrement a été refusé par la DDTE portait sur la préparation à un diplôme différent de celui qui avait fait précédemment l'objet d'un enregistrement de droit ; qu'en décidant que la conclusion de ce second contrat privait d'effet l'enregistrement du premier, sans constater que les parties avaient expressément renoncé à se prévaloir de cet enregistrement, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'après avoir signé un premier contrat d'apprentissage pour une durée de deux ans en vue de la préparation à un CAP de cuisine, les parties avaient conclu un second contrat pour une formation de dix-huit mois à un BEP d'hôtellerie restauration, la cour d'appel a pu décider qu'en souscrivant ainsi un nouveau contrat pour une durée et une formation différentes les parties avaient renoncé au précédent contrat, quelle qu'ait pu être l'incidence sur la validité de celui-ci du défaut de réponse de l'administration dans le délai de quinze jours ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir requalifié le contrat d'apprentissage en contrat à durée déterminée de droit commun et de l'avoir condamné, sur le fondement de l'article L. 122-3-3 du Code du travail, au paiement d'une indemnité représentant le montant des salaires que l'apprenti aurait dû recevoir si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme ainsi qu'une indemnité de précarité, alors, selon le moyen :

1 / que selon l'article L. 117-14 du Code du travail, le refus d'enregistrement d'un contrat d'apprentissage fait seulement obstacle à ce que ce contrat reçoive ou continue de recevoir application ; qu'aucune disposition ne prévoit que le défaut d'enregistrement d'un contrat d'apprentissage entraîne sa requalification en contrat à durée déterminée ;

que dés lors, en décidant que le refus d'enregistrement du contrat d'apprentissage de M. X... avait eu pour effet de le transformer en contrat à durée déterminée et en condamnant M. Y... à payer le montant des salaires restant à courir jusqu'au terme du contrat, sur le fondement de l'article L. 122-3-8 applicable à la rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée, la cour d'appel a violé l'article L. 117-14 du Code du travail ;

2 / qu'en tout état de cause, la rupture par l'employeur d'un contrat d'apprentissage n'ayant pas fait l'objet d'un enregistrement ne peut être sanctionnée que par le paiement de l'indemnité prévue en cas de rupture injustifiée d'un contrat a durée indéterminée ; que cette indemnité est, s'agissant d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté, calculée en fonction du préjudice subi ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que la rupture du contrat de travail de M. X..., embauché le 30 décembre 1995, est intervenue le 10 septembre 1996 ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher la réalité et l'étendue du préjudice subi par le salarié du fait de la rupture de son contrat, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 122-14-5 du Code du travail ;

3 / que le jugement de première instance, non contredit sur ce point par l'arrêt avait retenu que M. X... devait effectuer son service national dès la première année de son contrat d'apprentissage ; que cette constatation excluait que le préjudice du salarié, dont le contrat n'aurait pu se poursuivre jusqu'à son terme, soit équivalent aux salaires dus jusqu'à la fin de ce contrat ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer sur cette circonstance de fait relevée par les premiers juges, la cour d'appel a encore privé sa décision de toute base légale au regard du même texte ;

Mais attendu que le refus d'enregistrement d'un contrat d'apprentissage par l'administration, qui fait obstacle à ce que le contrat reçoive ou continue de recevoir exécution, ne prive pas le salarié de la faculté de demander la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée déterminée, lorsque cette relation se poursuit après la notification du refus d'enregistrement ; qu'ayant constaté que l'employeur avait conservé le salarié à son service postérieurement cette notification mais qu'il avait ensuite cessé de remplir ses obligations à son égard, la cour d'appel a décidé à bon droit que le salarié était fondé à demander la requalification de son contrat en contrat à durée déterminée et à réclamer des dommages-intérêts en application de l'article L. 122-3-8 du Code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer un rappel de salaires portant sur la période du 30 septembre 1995 au 30 septembre 1996 et au paiement d'une indemnité de quinze mois de salaires, alors, selon le moyen, que le second contrat d'apprentissage conclu entre M. Y... et M. X..., en date du 29 mai 1996, produit aux débats, portait sur une période de dix-huit mois à compter du 30 décembre 1995 et non de deux ans comme le premier ; que la cour d'appel a condamné M. Y... au paiement d'un rappel de salaires sur la base du minimum conventionnel pour la période d'exécution du contrat, du 30 décembre 1995 au 30 septembre 1996 ; que dès lors, en le condamnant en outre à titre d'indemnité pour rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée, au paiement des salaires dus du 1er octobre 1996 au 30 décembre 1997, la cour d'appel a dénaturé le contrat du 29 mai 1996, en violation de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel s'est conformée aux prescriptions de l'article L. 122-3-8 du Code du travail en allouant au salarié, à titre de dommages-intérêts, une somme supérieure à la rémunération forfaitaire minimale prévue par ce texte ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98-45917
Date de la décision : 12/12/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

APPRENTISSAGE - Contrat - Existence du contrat - Souscription d'un nouveau contrat - Renonciation au précédent - Refus d'enregistrement par l'administration - Requalification du contrat continué après ce refus - Indemnités dues.


Références :

Code civil 1134
Code du travail L122-3-8

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai (chambre sociale), 30 septembre 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 déc. 2000, pourvoi n°98-45917


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.45917
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