AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
I - Sur le pourvoi n° M 98-45.459 formé par M. Benoît X..., demeurant ..., 97427 Etang-Sale,
II - Sur le pourvoi n° N 98-45.460 formé par M. Jean-Joseph Y..., demeurant ..., 97427 Etang-Sale,
en cassation de 2 arrêts rendus le 22 septembre 1998 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale) au profit de l'Office national des forêts (ONF), dont le siège est colline de la Providence, 97488 Saint-Denis Cedex,
defendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Besson, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Le Roux-Cocheril, Finance, Texier, Mme Quenson, conseillers, M. Poisot, Mme Maunand, M. Soury, Mme Ruiz-Nicoletis, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Besson, conseiller référendaire, les observations de Me Delvolvé, avocat de l'Office national des forêts (ONF), les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° M 98-45.459 et N 98-45.460 ;
Sur le moyen unique commun aux deux pourvois :
Attendu que MM. X... et Y... ont été employés, entre 1991 et 1995, par l'Office national des forêts, selon plusieurs contrats à durée déterminée ; qu'ils ont ensuite été engagés en qualité de manoeuvres occasionnels, aux termes de contrats de travail en date du 18 octobre 1995 prévus pour la "réalisation de travaux d'investissement forestier saisonniers" ; que ces contrats, dénommés contrats "d'usage à terme imprécis", prévoyaient une durée minimum d'engagement de deux mois à compter du 23 octobre 1995 ; que par lettres du 15 janvier 1996 adressées à l'Office national des forêts, MM. X... et Y... ont demandé la requalification de leurs contrats de travail ; qu'en raison de la suite défavorable réservée par l'employeur à ces demandes, ils ont saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que MM. X... et Y... font grief aux arrêts attaqués (Saint-Denis de la Réunion, 22 septembre 1999) de les avoir déboutés de leurs demandes tendant à la requalification de leurs contrats de travail en contrats à durée indéterminée, ainsi qu'au paiement d'un rappel de salaire et d'une indemnité de requalification, alors selon le moyen :
1 / que l'activité de l'Office nationale des forêts entre dans le cadre de la sylviculture, et non dans le cadre de l'exploitation forestière visée à l'article D. 121-2 du Code du travail ; que la cour d'appel, en développant une notion très extensive de l'exploitation forestière, contraire à toutes les pratiques, a commis un faux sens, et ainsi violé les dispositions des articles L. 122-1-1 et D 121-2 du Code du travail, qui doivent être interprétées de manière limitative ;
2 / que l'Office national des forêts n'apporte pas la preuve que l'emploi occupé par MM. X... et Y..., quand bien même les activités de l'employeur figureraient dans la liste des activités prévues à l'article D. 121-2 du Code du travail, soit un emploi pour lequel il est d'usage d'utiliser des contrats à durée déterminée ;
3 / que la cour d'appel, en retenant ensuite que les contrats de MM. X... et Y... sont des contrats saisonniers, s'est contredite ;
4 / que l'arrêt ne tient pas compte du caractère successif des contrats à durée déterminée de MM. X... et Y..., dont l'interruption correspond souvent aux périodes de congés habituellement pris, dans le département de La Réunion, à la fin du mois de décembre et au mois de janvier pendant la période de l'été austral ;
Mais attendu que la cour d'appel a décidé, à bon droit, qu'en application de l'article L 121-5 du Code forestier, l'Office national des forêts était autorisé à exercer une activité d'exploitation forestière dans le cadre de son ouvrage de service public industriel et commercial chargé de la gestion du domaine forestier et de l'équipement des forêts ; qu'ayant retenu, sans contradiction, que les travaux pour lesquels MM. X... et Y... avaient été embauchés se rattachaient à cette activité et qu'ils concernaient une tâche précise et temporaire, et non des opérations de plantation effectuées de façon continue, elle a pu décider que l'emploi auquel les salariés étaient occupés n'était pas lié à l'activité normale et permanente de l'Office national des forêts, et que la succession des contrats à durée déterminée passés entre les parties, de 1991 à 1995, n'était pas de nature à faire perdre à celui-ci sa nature temporaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille.