AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze décembre deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MISTRAL, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Umberto,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de GRENOBLE, en date du 26 septembre 2000, qui, dans l'information suivie contre lui pour violences aggravées, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5.3, 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 144, 144-1, 148-1, 593 du Code de procédure pénale, insuffisance de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la chambre d'accusation a rejeté la demande de mise en liberté formée par l'accusé ;
"aux motifs que les faits sont, de par leur nature, de ceux qui portent atteinte le plus gravement à l'ordre public ; que ce trouble ne manquerait pas d'être exacerbé par la mise en liberté d'une personne qui en a rendu une autre grabataire ; que ce trouble à l'ordre public est exceptionnel de par la gravité des faits et persiste ; que les déclarations de Umberto Y... sont en totale contradiction avec celles du principal témoin ; que c'est d'ailleurs ce dernier qui était recherché pour avoir une explication avec lui lorsque les faits se sont produits ; que la détention est donc le seul moyen d'éviter les pressions sur le témoin, qu'un contrôle judiciaire n'y pourrait suffire, ne pouvant garantir une surveillance 24 heures sur 24 heures ; que la détention est dans un délai raisonnable eu égard à la Convention européenne des droits de l'homme de par la gravité des faits et la nécessité de mener une longue instruction criminelle ; que le passage devant une cour d'assises est envisageable début 2001, ce qui est raisonnable ; qu'au surplus, les nouveaux délais institués par la loi à compter du 1er janvier 2001 et constatant le délai raisonnable au vu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sont respectés ;
"alors que, d'une part, selon l'article 5.3 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne arrêtée ou détenue a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure ; que l'appréciation du caractère raisonnable de la durée de la détention provisoire n'est souveraine qu'autant que la chambre d'accusation répond effectivement aux mémoires dont elle est saisie et indique avec précision quel est le terme de la période à prendre en considération, l'obligation de libérer dans un délai raisonnable demeurant tant que l'accusé n'est pas jugé ; qu'en se limitant à énoncer que le passage de l'accusé devant la cour d'assises "est envisageable début 2001, ce qui est raisonnable", la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"alors que, d'autre part, l'accusé a fait valoir, dans son mémoire régulièrement déposé le 20 septembre 2000, que la simple justification rétrospective de la détention provisoire déjà effectuée ne répond pas aux voeux du législateur ; qu'en l'espèce, quel que soit le fondement de la détention provisoire déjà effectuée par Umberto Y..., il n'en demeure pas moins que le délai d'achèvement de la procédure est au contraire aujourd'hui totalement imprévisible ; que l'audiencement de l'affaire n'est en effet enfermé dans aucun délai impératif ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que le demandeur ne saurait être admis à critiquer les motifs pour lesquels la chambre d'accusation a estimé que la durée de la détention provisoire n'excédait pas le délai raisonnable prévu par l'article 144-1 du Code de procédure pénale, une telle appréciation échappant au contrôle de la Cour de Cassation ;
Attendu que, lorsque les juges sont saisis d'une demande de mise en liberté formée par une personne détenue en vertu d'une ordonnance de prise de corps, sur le fondement de l'article 148-1 du Code de procédure pénale, ils n'ont pas à se prononcer par référence aux dispositions de l'article 145-3 dudit Code ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions de l'article 144 du Code de procédure pénale ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Mistral conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Lucas ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;