La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/11/2000 | FRANCE | N°99-88083

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 novembre 2000, 99-88083


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit novembre deux mille, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de la société civile professionnelle URTIN-PETIT et ROUSSEAU-VAN TROEYEN, et de la société civile professionnelle ROUVIERE et BOUTET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilbert, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appe

l de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 1999, qui, dans la procédure...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit novembre deux mille, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de la société civile professionnelle URTIN-PETIT et ROUSSEAU-VAN TROEYEN, et de la société civile professionnelle ROUVIERE et BOUTET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilbert, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 1999, qui, dans la procédure suivie contre Isabelle Y... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1149 et 1382 du Code civil, 1 à 6 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble les principes de réparation intégrale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a fixé à la somme de 236 795, 56 francs le montant de la part soumise au recours des tiers payeurs du préjudice subi par Gilbert X... consécutivement à l'accident dont il fut victime le 26 septembre 1994 au Val de Reuil ;

"aux motifs que Gilbert X..., qui a bénéficié d'indemnités journalières versées par la CPAM de l'Eure entre le 25 mars et le 23 juin 1995 (70 224, 74 - 45 992, 36 = 24 232, 38 francs), ne justifie par aucun élément de preuve de son allégation selon laquelle il aurait subi une perte de salaires de 63 000 francs entre le 25 mars et le 31 août 1995, date de son licenciement (arrêt, page 12) ;

"alors qu'il résulte de l'attestation Assedic en date du 5 septembre 1995 qu'au cours de la période du 1er avril au 30 juin 1995, Gilbert X... n'a pas travaillé et, partant, n'a perçu aucun salaire, tandis qu'au mois de juillet de la même année, il n'a travaillé que partiellement, soit 134 heures mensuelles ; qu'il a ainsi démontré avoir subi, sur la période du 25 mars au 31 août 1995, une perte de salaire supérieure au montant des indemnités journalières versées par la CPAM, soit la somme de 24 232, 38 francs ; qu'en estimant ,dès lors, que le demandeur ne justifiait pas de l'existence d'une perte de salaires, sur cette période, d'un montant de 63 000 francs, sans rechercher si, en l'état des pièces produites au débat, Gilbert X... n'établissait pas, à tout le moins, la réalité d'un préjudice indemnisable, fût-il inférieur à la somme de 63 000 francs, la cour d'appel, qui méconnaît le principe de la réparation intégrale, n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1149 et 1382 du Code civil, 1 à 6 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble le principe de la réparation intégrale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a fixé à la somme de 236 795,56 francs le montant de la part soumise au recours des tiers payeurs du préjudice subi par Gilbert X... consécutivement à l'accident de la circulation dont il fut victime le 26 septembre 1994 au Val de Reuil ;

"aux motifs que l'auteur d'une infraction a l'obligation de réparer en totalité le dommage qui en est résulté, sans pouvoir invoquer l'état préexistant de la victime ; qu'en l'espèce, il est établi par les indications médicales fournies dans son rapport par l'expert judiciaire que le licenciement de Gilbert X... a été en relation directe et certaine avec son accident du 26 septembre 1994, aucun autre poste de travail de son entreprise n'étant adapté à ses aptitudes, mais qu'il ne se trouvait pas pour autant empêché d'exercer une quelconque activité professionnelle et qu'il conservait la possibilité d'obtenir un reclassement dans une autre entreprise ;

que dans ces conditions, même s'il n'a pas retrouvé d'emploi entre le 1er septembre 1995 et le 1er avril 1999, date de son départ à la retraite, la perte de revenus qu'il a subie en ne percevant pendant cette période que des indemnités versées par les Assedic (231 219 francs) ne résulte elle-même que pour partie des infractions dont il a été victime et son préjudice professionnel doit être indemnisé sous la forme d'une majoration de la valeur du point incapacité partielle permanente ; qu'eu égard à l'âge de Gilbert X... à la date de consolidation de ses blessures (56 ans) et à la profession qu'il exerçait antérieurement (conducteur de machine), il peut lui être accordé au titre de l'incapacité partielle permanente de 10 % qu'il conserve, incidence professionnelle incluse, une somme "globale de 104 000 francs" (arrêt, pages 13 et 14) ;

"alors que le principe de la réparation intégrale impliquant de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se trouvait avant la survenance du fait dommageable, l'indemnisation de la perte d'emploi directement liée à l'incapacité physique de la victime, elle-même imputable au responsable de l'accident, ne saurait être affectée par la circonstance que l'intéressé ait conservé la faculté théorique de retrouver un emploi adapté à son handicap ; qu'en l'espèce, pour refuser d'allouer au demandeur, au titre de la perte d'emploi subie entre son licenciement et son départ à la retraite, une somme strictement égale au salaire qu'il aurait perçu s'il était demeuré

à son poste, la cour d'appel s'est déterminée par la circonstance que même diminué physiquement, Gilbert X... conservait la possibilité d'obtenir un reclassement dans une autre entreprise ;

qu'en statuant ainsi, tout en énonçant d'une part que le licenciement de Gilbert X... a été en relation directe et certaine avec son accident, d'autre part que le demandeur n'a pas retrouvé de travail avant l'âge de la retraite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu le principe de la réparation intégrale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour Gilbert X... de l'atteinte à son intégrité physique, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;

D'où il suit que les moyens, le premier mélangé de fait, nouveau, et, comme tel irrecevable en ce qu'il se fonde sur une attestation des Assedic non soumise aux juges du fond, ne sauraient être accueillis ;

Mais, sur le troisième moyen, pris de la violation des articles 485, 544, 591, 593, 800-1 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a dit que les dépens d'appel seraient supportés, à concurrence de moitié, par Gilbert X..., sans motif ;

"alors qu'aux termes de l'article 800-1 du Code de procédure pénale, institué par la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993, les frais de justice criminelle, correctionnelle et de police sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les parties ; qu'ainsi, en condamnant le demandeur à supporter les dépens d'appel, à concurrence de moitié, la cour d'appel a violé le texte susvisé" ;

Attendu qu'aux termes de l'article 800-1 du Code de procédure pénale, nonobstant toutes dispositions contraires, les frais de justice criminelle, correctionnelle ou de police sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les condamnés ;

Attendu qu'après avoir infirmé le jugement et réduit l'indemnité allouée à la partie civile par le premier juge, la juridiction du second degré déclare que les dépens d'appel seront partagés par moitié entre la partie civile et la prévenue ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les dispositions du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle doit être prononcée par voie de retranchement et sans renvoi, l'annulation ainsi prononcée ayant effet tant à l'égard de la partie qui ne s'est pas pourvue que du demandeur au pourvoi ;

Par ces motifs,

CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rouen, en date du 6 décembre 1999, par voie de retranchement, en ce qu'il a condamné la prévenue et la partie civile aux dépens d'appel, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rouen, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Blondet conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-88083
Date de la décision : 28/11/2000
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, 06 décembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 nov. 2000, pourvoi n°99-88083


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.88083
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award