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21/11/2000 | FRANCE | N°98-11900

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 novembre 2000, 98-11900


Donne acte à la société Hoechst Marion Roussel de ce qu'elle se désiste du pourvoi formé contre M. X... ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 décembre 1997), que la société Roussel UCLAF, aux droits de laquelle se trouve la société Hoechst Marion Roussel (société Hoechst) est propriétaire d'un brevet français n° 79 23545 déposé le 21 septembre 1979 et d'un brevet américain correspondant n° 4472 382 déposé le 23 février 1983, concernant une nouvelle application utilisant l'hormone LHRH ou des agonistes

associés à un produit anti-androgène pour le traitement du cancer de la prostate ;...

Donne acte à la société Hoechst Marion Roussel de ce qu'elle se désiste du pourvoi formé contre M. X... ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 décembre 1997), que la société Roussel UCLAF, aux droits de laquelle se trouve la société Hoechst Marion Roussel (société Hoechst) est propriétaire d'un brevet français n° 79 23545 déposé le 21 septembre 1979 et d'un brevet américain correspondant n° 4472 382 déposé le 23 février 1983, concernant une nouvelle application utilisant l'hormone LHRH ou des agonistes associés à un produit anti-androgène pour le traitement du cancer de la prostate ; que les demandes de brevets ont désigné comme coïnventeur M. Y..., salarié de cette société ; que par arrêt irrévocable du 10 février 1994, la cour d'appel a qualifié l'invention couverte par le brevet français d'invention de mission et dit que M. Y... avait droit à la rémunération supplémentaire prévue par les articles L. 611-7.1° du Code de la propriété intellectuelle et 17-2 de l'avenant cadres à la convention collective nationale des industries chimiques ; qu'après dépôt du rapport d'expertise, la cour d'appel a statué sur le montant de cette rémunération ;

Attendu que la société Hoechst fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. Y... la somme de 4 millions de francs à titre de rémunération supplémentaire, alors, selon le moyen :

1° qu'au moment où le brevet a été déposé, en 1979, la loi prévoyait que " les conditions dans lesquelles le salarié auteur d'une invention peut bénéficier d'une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les accords d'entreprise et les contrats individuels de travail " ; que la convention collective nationale des industries chimiques alors en vigueur prévoyait que l'inventeur " a droit à une gratification en rapport avec la valeur de l'invention... le montant de cette gratification sera établi forfaitairement en tenant compte du cadre général de recherche dans lequel s'est placée l'invention, des difficultés de la mise au point pratique, de la contribution personnelle originale de l'intéressé dans l'individualisation de l'invention elle-même et de l'intérêt commercial de celle-ci " ; qu'une rémunération supplémentaire ou une gratification établie forfaitairement ne peut être qu'une somme en rapport avec le salaire habituel de l'inventeur salarié ; que le cadre général de recherche, les difficultés de mise au point, la contribution personnelle de l'intéressé et l'intérêt commercial de l'invention doivent être pris en compte, mais seulement pour déterminer la fraction ou le multiple de salaire qui constituera la gratification allouée ; qu'en calculant la rémunération supplémentaire due à M. Y... sur la seule base des résultats réels ou attendus de l'exploitation commerciale du brevet par elle, sans se référer au salaire perçu par l'intéressé, la cour d'appel a violé l'article 17-2 de l'avenant cadres à la convention collective nationale des industries chimiques ;

2° que la règle " à travail égal, salaire égal " impose une interprétation et une application uniforme pour tous les salariés, spécialement pour ceux des entreprises soumises à la même convention collective, des dispositions légales ou conventionnelles applicables à leur rémunération ; que les inventions dites " de mission ", qui appartiennent à l'employeur, sont celles faites par le salarié dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail et qu'elles sont donc le fruit d'un travail salarié ; que la société Hoechst faisait valoir que tant les dispositions en cause de la convention collective que les dispositions légales sont de manière constante appliquées par elle, par les autres entreprises de la branche et, plus généralement, par la Commission nationale des inventions de salariés, comme fixant le montant de la rémunération supplémentaire à deux ou trois mois de salaire ; que déterminer la rémunération supplémentaire en fonction du seul bénéfice de l'exploitation du brevet, de sorte que la rémunération n'est en aucune manière proportionnelle au travail effectué par l'inventeur salarié, peut aboutir aussi bien à fixer, dans un cas, une somme équivalente à plusieurs années de salaire, et dans un autre cas, à l'inverse, à fixer une somme dérisoire au regard du travail effectué ; qu'en calculant exclusivement la gratification due à M. Y... sur la base des résultats réels ou attendus de l'exploitation commerciale du brevet par elle, la cour d'appel a violé la règle " à travail égal, salaire égal " énoncée par les articles L. 133-5.4° et L. 136-2.8° du Code du travail ;

3° que la convention collective imposait de prendre en compte quatre éléments pour déterminer la rémunération supplémentaire : le cadre général de recherche, les difficultés de mise au point, la contribution originale de l'intéressé à l'invention, et l'intérêt commercial de celle-ci ; qu'en se fondant exclusivement sur l'état du marché potentiel, le chiffre d'affaires relatif aux anti-androgènes et à l'anandron, les bénéfices et les redevances qu'elle avait perçus, soit uniquement sur l'intérêt économique de l'invention, sans examiner les trois autres critères, la cour d'appel a violé l'article 17-2 de l'avenant à la convention collective nationale des industries chimiques ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte d'aucun texte légal ou conventionnel applicable en l'espèce que la rémunération due au salarié, auteur d'une invention de mission, doive être fixée en fonction de son salaire ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant constaté qu'aucune des parties ne contestait les conclusions de l'expert sur le cadre légal de cette rémunération complémentaire, sur la définition, l'intérêt scientifique et les difficultés de la mise au point pratique de l'invention ainsi que sur l'importance de la contribution personnelle de M. Y..., c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'a pas fixé le montant de la rémunération supplémentaire due à celui-ci uniquement, comme allégué par la société Hoechst, sur l'intérêt économique de l'invention, a statué comme elle a fait ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa dernière branche, n'est pas fondé en ses autres branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-11900
Date de la décision : 21/11/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BREVET D'INVENTION - Propriété - Inventeur au service d'un employeur - Invention réalisée dans le cadre du contrat de travail - Invention de service - Rémunération supplémentaire de l'inventeur - Calcul .

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Cause - Travail du salarié - Invention du salarié - Invention de mission - Fixation de la rémunération supplémentaire - Fixation en fonction du salaire - Obligation (non)

Il ne résulte d'aucun texte légal ou conventionnel que la rémunération due au salarié, auteur d'une invention de mission, doive être fixée en fonction de son salaire. Une cour d'appel, ayant constaté qu'aucune des parties ne contestait les conclusions de l'expert sur le cadre légal de cette rémunération complémentaire, sur la définition, l'intérêt scientifique et les difficultés de la mise au point pratique de l'invention pas plus que sur l'importance de la contribution personnelle du salarié, et qui n'a pas fixé le montant de cette rémunération en fonction de l'intérêt économique de l'invention, a pu condamner l'employeur à verser une somme de 4 millions de francs au salarié.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 décembre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 nov. 2000, pourvoi n°98-11900, Bull. civ. 2000 IV N° 179 p. 157
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2000 IV N° 179 p. 157

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dumas .
Avocat général : Avocat général : M. Jobard.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Garnier.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Monod et Colin, la SCP Thomas-Raquin et Bénabent.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.11900
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