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08/11/2000 | FRANCE | N°00-83570

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 novembre 2000, 00-83570


CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Mohamed,
- X... Abdelkader,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 mars 2000, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'association de malfaiteurs, a partiellement rejeté la requête du premier aux fins d'annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 14 juin 2000, joignant les pourvois et en prescrivant l'examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation,

commun aux 2 demandeurs, et pris de la violation des articles 80, 170 à 174,...

CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Mohamed,
- X... Abdelkader,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 mars 2000, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'association de malfaiteurs, a partiellement rejeté la requête du premier aux fins d'annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 14 juin 2000, joignant les pourvois et en prescrivant l'examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, commun aux 2 demandeurs, et pris de la violation des articles 80, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des principes généraux du droit :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le réquisitoire introductif en date du 18 mars 1998 (D 21) et la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il appartient au seul ministère public d'apprécier l'opportunité d'ouvrir une information au vu des éléments parvenus à sa connaissance dont il est seul juge de la pertinence ; que le fait que de tels éléments proviennent d'une source anonyme n'est nullement contraire aux stipulations de l'article 6.1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que si des informations anonymes ne peuvent asseoir, de façon décisive, une condamnation, rien ne s'oppose à ce qu'elles soient prises en considération, même comme élément unique, pour ouvrir une information ; qu'il importe seulement, pour que la saisine du juge d'instruction soit régulière, que les faits dont le procureur de la République le saisit soient déterminés et que son réquisitoire satisfasse en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ; que tel est le cas en l'espèce, la saisine du juge portant sur des faits de trafic de substances déterminées (résine de cannabis et cocaïne), ayant pour centre un lieu déterminé ("la Nouvelle Taverne"), effectué selon un mode précisé (entre la France et l'Espagne) ;
" alors que caractérise l'existence d'un artifice ou d'un stratagème ayant pour but de permettre des mesures de surveillance, notamment téléphoniques, l'ouverture d'une information fondée sur une dénonciation anonyme qui n'est corroborée par aucun autre élément et que, dans ces conditions, le réquisitoire introductif devait être annulé par la chambre d'accusation en application des principes généraux de la procédure pénale ;
" alors que la saisine du magistrat instructeur étant déterminée par les pièces annexées au réquisitoire, le procureur de la République ne saurait, sans méconnaître les dispositions de l'article 80 du Code de procédure pénale, requérir l'ouverture d'une information au vu d'une dénonciation anonyme faisant état de manière vague et éventuelle d'un "trafic de cannabis et de cocaïne entre la France et l'Espagne ayant pour centre tel bar", de tels faits n'étant pas, contrairement à ce qu'a estimé la chambre d'accusation, suffisamment déterminés pour pouvoir justifier l'ouverture d'une information " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, commun aux 2 demandeurs, et pris de la violation des articles 80, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des principes généraux du droit :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le réquisitoire supplétif en date du 21 septembre 1998 (D 25) et la procédure subséquente ;
" aux motifs que les conditions de régularité d'un réquisitoire supplétif sont semblables à celles, précédemment rappelées, d'un réquisitoire introductif, c'est-à-dire que, pour que la saisine du juge d'instruction soit régulière, il importe que les faits dont le procureur de la République le saisit soient déterminés et que son réquisitoire satisfasse en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ; qu'en l'espèce, le procureur de la République, ayant eu connaissance d'un nouvel acte entrant dans le trafic de stupéfiants dénoncé (acquisition d'un véhicule destiné à servir de moyen de transport des produits stupéfiants et départ vers l'Espagne pour une nouvelle importation) en a saisi le magistrat instructeur ; qu'il est exact qu'il n'était pas nécessaire de saisir le magistrat instructeur de ce fait, même s'il était inconnu au moment de la saisine originelle du juge d'instruction ; qu'en effet, en matière de trafic de stupéfiants, infraction continue, la saisine du juge s'opère y compris pour les faits qui, intervenus postérieurement à la date du réquisitoire introductif, ne sont que la poursuite de l'infraction dénoncée ; que le caractère superfétatoire de ce réquisitoire est sans incidence ni sur sa validité ni sur celle de la procédure ; que, surabondamment, à supposer que l'on puisse considérer qu'une nouvelle importation de produits stupéfiants ne rentrerait pas dans le cadre d'un trafic déterminé, le réquisitoire supplétif aurait alors toute sa justification ;
" alors que constitue un fait déterminé susceptible de justifier la signature d'un réquisitoire supplétif, un fait nouveau qui relève objectivement en lui-même la participation à l'infraction visée par cet acte de poursuite et que, contrairement à l'appréciation qu'en a faite la chambre d'accusation, ni l'acquisition d'un véhicule de tourisme, même immatriculé au nom d'un tiers, ni un départ vers l'Espagne ne constituent objectivement des faits déterminés au regard d'un prétendu délit d'importation de stupéfiants ;
" alors que les infractions de participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre des infractions à la législation sur les stupéfiants et d'importation de produits stupéfiants en bande organisée étant des infractions distinctes, la première continue, la seconde instantanée, ne revêt pas un caractère superfétatoire, le réquisitoire supplétif pris pour importation de stupéfiants venant à la suite d'un réquisitoire introductif du chef d'association de malfaiteurs en vue de commettre des infractions à la législation des stupéfiants en sorte que ledit réquisitoire supplétif doit, pour être régulier, remplir toutes les conditions déduites des dispositions de l'article 80 du Code de procédure pénale et, notamment, viser des faits déterminés, ce qui n'était manifestement pas le cas du réquisitoire supplétif du 21 septembre 1998 " ;
Sur le troisième moyen de cassation, commun aux 2 demandeurs, et pris de la violation des articles 80, 151, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les commissions rogatoires délivrées par le magistrat instructeur les 19 mars 1998 et 21 septembre 1998 ;
" aux motifs que, loin de délivrer des commissions rogatoires générales, le magistrat instructeur, saisi de faits précis, a demandé au SDPJ des Hauts-de-Seine de poursuivre les investigations effectuées en enquête préliminaire sur lesdits faits et, partant, n'a nullement délivré un mandat général aux officiers de police judiciaire ;
" alors que le juge d'instruction ne peut délivrer une commission rogatoire que sur présomption d'une infraction déterminée et que le réquisitoire introductif en date du 18 mars 1998 et le réquisitoire supplétif en date du 21 septembre 1998 ayant été pris au vu de faits indéterminés n'ayant pu valablement saisir le juge d'instruction, les commissions rogatoires des 19 mars 1998 et 21 septembre 1998 fondées sur ces réquisitoires irréguliers devaient être annulées par voie de conséquence ;
" alors que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer, par l'examen de ces commissions rogatoires, qu'elles visent de façon éventuelle toute une série d'infractions, et que, dès lors, elles revêtent, contrairement à ce qu'a jugé la chambre d'accusation, la forme de commissions rogatoires générales par lesquelles le juge d'instruction a abandonné ses pouvoirs aux autorités de police en violation des dispositions substantielles de l'article 151 du Code de procédure pénale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour refuser d'annuler le réquisitoire introductif du 18 mars 1998, le réquisitoire supplétif du 21 septembre 1998, ainsi que les commissions rogatoires délivrées le 19 mars et le 21 septembre 1998 ensuite de ces réquisitoires, l'arrêt attaqué se prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par une analyse souveraine des pièces précédant les réquisitoires introductif et supplétif, et alors que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que ces actes satisfont en la forme aux conditions essentielles de leur existence légale, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le quatrième moyen de cassation présenté pour Mohamed X... et pris de la violation des articles 105, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les auditions de Mohamed X... en garde à vue (cotes D 255 à D 293), du procès-verbal de première comparution (cote D 672) ainsi que de tous les actes subséquents ;
" alors que la chambre d'accusation, qui constatait qu'avant l'interpellation de Mohamed X... les services de police disposaient, outre d'un renseignement anonyme le mettant en cause, ainsi que son frère, Abdelkader X..., dans un important trafic de stupéfiants entre le Maroc, l'Espagne et la France, du résultat d'interceptions téléphoniques corroborant ce renseignement et qui constatait en outre qu'il résultait de la retranscription d'une communication téléphonique que Mohamed X... avait acquis de Mohamed Y... 9 kilos de cannabis, ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale, affirmer que ces éléments étaient insuffisants à constituer des indices graves et concordants de la participation de Mohamed X... aux faits de trafic de drogue poursuivis " ;
Sur le cinquième moyen de cassation présenté pour Mohamed X... et pris de la violation des articles 105, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a omis d'annuler les auditions en garde à vue de Mohamed X... à compter du 16 juin 1999, 15 heures 20 ;
" aux motifs qu'il est vrai que, comme le fait observer Mohamed X..., celui-ci a, lors de son interrogatoire du 16 juin 1999 à 15 heures 20, déclaré que, dans une conversation téléphonique, il parlait effectivement de "shit", expliquant que Mohamed Y... était monté le voir et lui avait donné de la merde, qu'il n'arrivait pas à la revendre et qu'il l'avait jetée et précisant que c'était la première fois que Mohamed Y... lui amenait du shit ; que, cependant, le magistrat instructeur était seulement saisi de faits d'association de malfaiteurs en vue d'infractions à la législation sur les stupéfiants et de ces délits ; que la reconnaissance ainsi effectuée par Mohamed X... et qui aurait demandé à être vérifiée portait seulement sur des actes préparatoires à une cession de stupéfiants suivie d'un désistement volontaire ou, au plus, en une tentative de cette infraction ; que, dès lors, l'élément apporté par Mohamed X... dans sa déclaration n'était pas de nature à constituer un indice de sa participation aux faits poursuivis ;
" alors que, par nature, les actes préparatoires à une cession de produits stupéfiants caractérisant de toute évidence la participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre des infractions à la législation sur les stupéfiants, les déclarations de Mohamed X... lors de son interrogatoire du 16 juin 1999, 15 heures 20, constituaient à son encontre des indices graves d'avoir commis les faits dont était saisi le magistrat instructeur venant corroborer les éléments à charge figurant au dossier de la procédure et imposant aux policiers d'interrompre son audition sous serment et que, dès lors, en refusant de prononcer la nullité des procès-verbaux d'audition à compter de cette heure, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée de l'article 105 du Code de procédure pénale " ;
Sur le quatrième moyen de cassation présenté pour Abdelkader X... et pris de la violation des articles 105, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les auditions en garde à vue d'Abdelkader X... (cotes D 309, D 314, D 317, D 320) ;
" aux motifs qu'en ce qui concerne Mohamed X..., les éléments recueillis avant son interpellation, s'ils étaient de nature à donner à penser qu'il pouvait être impliqué dans les faits dont le magistrat instructeur était saisi, étaient, cependant, insuffisants à constituer des indices graves et concordants d'y avoir participé ; que, durant cette perquisition, Kader X..., entendu sous serment sur les différents objets découverts, a, à chaque fois, soit donné des réponses de nature à le mettre hors de cause sur les infractions qui faisaient l'objet de la saisine du magistrat instructeur et de la commission rogatoire, soit refusé de répondre ; qu'en ce qui concerne la résine de cannabis, il a seulement déclaré qu'une personne avait amené chez lui la malle qui la contenait et, d'autre part, en ce qui concerne les seuls 100 grammes, que c'était du shit pour sa consommation personnelle ; que, si cette réponse pouvait être de nature à mettre en cause sa responsabilité pénale pour détention et usage de stupéfiants, cet élément à charge demandait à être corroboré par d'autres éléments compte tenu, notamment, de l'équivoque dans la possession de cette substance résultant de ce que le domicile occupé par Kader X... était partagé notamment par une autre personne, Karima Z... ;
" alors que la découverte de la malle contenant 60,612 kg de résine de cannabis au domicile d'Abdelkader X... le 14 juin 1999 à 6 heures du matin (D 695) venant corroborer tant le renseignement le mettant en cause ainsi que son frère, Mohamed X..., dans un important trafic de stupéfiants entre le Maroc, l'Espagne et la France que le résultat d'interception téléphoniques, des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits d'association de malfaiteurs en vue de commettre des infractions à la législation sur les stupéfiants dont était saisi le juge d'instruction existaient dès cet instant à l'encontre d'Abdelkader X... mettant obstacle à son audition en qualité de témoin et que, dès lors, en omettant d'annuler ses auditions en garde à vue, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée de l'article 105 du Code de procédure pénale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour refuser d'annuler les auditions comme témoins de Mohamed X... et de son frère Abdelkader X..., l'arrêt attaqué retient que les éléments recueillis jusque-là étaient insuffisants pour constituer des indices graves et concordants de la participation des intéressés aux faits dont était saisi le juge d'instruction ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
Qu'en effet, le magistrat instructeur a la faculté de ne mettre en examen une personne qu'après s'être éclairé, notamment en faisant procéder à son audition en qualité de témoin, sur sa participation aux agissements incriminés dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Mais sur le sixième moyen de cassation présenté pour Mohamed X... ainsi que sur le cinquième moyen de cassation présenté pour Abdelkader X... et pris de la violation des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 7 avril 1997, 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 170 à 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité de la retranscription de la conversation téléphonique entre un avocat et son client figurant aux cotes D 3378 et D 3379 ;
" aux motifs que, si l'interception fortuite des conversations tenues entre un avocat et son client ne saurait être une cause de nullité, le respect du principe de confidentialité desdites conversations s'oppose à ce qu'elles fassent l'objet d'une retranscription versée au dossier de la procédure ; qu'il n'en est autrement que s'il apparaît que l'avocat s'est placé en dehors de sa mission de défenseur et n'agissait plus en sa qualité d'avocat auxiliaire de justice aux termes de l'article 3, alinéa 1er, de la loi du 31 décembre 1971 , en tenant des propos de nature à établir sa participation à la commission d'infractions ; que, si les conversations transcrites sous les cotes D 3471 à D 3474 ne sont pas de nature à établir la participation de l'avocat qui les a tenues à la commission d'une infraction, il en va autrement de celle transcrite sous les cotes D 3378 et D 3379 ; que cette conversation est en effet entièrement codée en ce qu'elle consiste, de la part de l'avocat, après que celui-ci ait demandé à son interlocuteur de patienter un moment, en la dictée d'une succession de chiffres et de lettres ne présentant aucun sens mais manifestement comprise de l'interlocuteur ; que, si cette conversation n'est, en l'état, pas susceptible de constituer la preuve de la commission d'une infraction par l'avocat, le caractère éminemment suspect de sa teneur ne saurait conduire, au vu des principes ci-dessus rappelés, à son annulation d'office ; qu'en outre, incompréhensible en l'état de la procédure, sa retranscription ne saurait porter atteinte ni aux droits de la défense ni au principe de confidentialité des propos échangés entre un avocat et son client ;
" alors que les correspondances entre un avocat et son client sont couvertes par le secret ; qu'il n'est fait exception à ce principe, qui est d'ordre public comme l'a reconnu la chambre d'accusation, que dès lors qu'il est établi sans ambiguïté par le dossier de la procédure que l'avocat a méconnu les obligations de son serment ; qu'est insusceptible de constituer objectivement une telle violation de son serment l'adoption par l'avocat, dans le but de renforcer le secret de ses communications, d'un code confidentiel connu de lui seul et de son client, un tel mode d'opérer n'étant interdit par aucune disposition légale et que l'arrêt qui, tout en constatant que la conversation téléphonique, critiquée en raison du seul fait qu'elle était codée, était insusceptible de constituer la preuve d'une quelconque infraction commise par l'avocat, ne pouvait, sans méconnaître le principe susvisé, omettre de prononcer d'office l'annulation de sa retranscription ;
" alors que l'annulation de la retranscription d'une conversation téléphonique pour méconnaissance du principe visé à l'article 66-5 de la loi modifiée du 31 décembre 1971 n'est pas subordonnée au caractère compréhensible de la conversation interceptée " ;
Vu les articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 100-5 du Code de procédure pénale, 6.3 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que, même si elle est surprise à l'occasion d'une mesure d'instruction régulière, la conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée au dossier de la procédure que s'il apparaît que son contenu est de nature à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction ;
Attendu qu'alors qu'il n'avait pas encore décidé la mise en examen de Mohamed X..., le juge d'instruction a ordonné l'interception des conversations échangées sur le téléphone utilisé par celui-ci ; que des conversations avec son avocat ont été enregistrées et transcrites ; que la chambre d'accusation a annulé les transcriptions à l'exception de l'une d'elle, qui paraissait codée ; que, pour refuser d'annuler celle-ci, l'arrêt retient que, si la conversation n'est pas, en l'état, susceptible de constituer la preuve de la commission d'une infraction par l'avocat, elle est éminemment suspecte et qu'étant incompréhensible, sa transcription ne porte pas atteinte aux droits de la défense et à la confidentialité des propos échangés entre un avocat et son client ;
Mais attendu qu'en prononçant par ces motifs, d'où il ne résulte pas que la conversation transcrite était de nature à faire présumer la participation de l'avocat à une infraction, la chambre d'accusation a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 mars 2000, en ses seules dispositions ayant refusé d'annuler les actes de la procédure cotée D 3378 et D 3379 et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-83570
Date de la décision : 08/11/2000
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Pouvoirs du juge - Interception de correspondances émises par la voie des télécommunications - Transcription de la conversation entre un avocat et son client - Validité - Condition.

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 8.1 - Droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance - Interception de correspondances émises par la voie des télécommunications - Transcription de la conversation entre un avocat et son client - Validité - Condition

Même si elle est surprise à l'occasion d'une mesure d'instruction régulière, la conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée au dossier de la procédure que s'il apparaît que son contenu est de nature à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction. (1).


Références :

Code de procédure pénale 100-5
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6.3, art. 8
Loi 71-1130 du 31 décembre 1971 art. 66-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambre d'accusation), 21 mars 2000

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1997-01-15, Bulletin criminel 1997, n° 14, p. 29 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 nov. 2000, pourvoi n°00-83570, Bull. crim. criminel 2000 N° 335 p. 994
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 335 p. 994

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Palisse.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:00.83570
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