AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) des Hautes-Pyrénées, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 septembre 1998 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), au profit de la société anonyme Giat Industries, dont le siège est ... Tarbes,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 22 juin 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Dupuis, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Thavaud, Mmes Ramoff, Duvernier, M. Duffau, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Dupuis, conseiller, les observations de Me Delvolvé, avocat de l'URSSAF des Hautes-Pyrénées, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Giat industries, les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que, du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1992, la société Giat industries a appliqué, pour son établissement de Tarbes, les taux de cotisations réduits du régime des fonctionnaires et ouvriers d'Etat aux rémunérations des anciens ouvriers sous statut des établissements industriels dépendant du Groupement industriel des armements terrestres qui, s'étant prononcés pour leur recrutement par cette société, avaient demandé à être placés sous un régime défini par décret leur assurant le maintien des droits et garanties de leur ancien statut ; qu'à la suite d'un contrôle, l'Urssaf a notifié à la société Giat industries un redressement fondé sur l'application des taux du régime général ;
Sur le moyen unique pris en ses deux premières branches :
Vu l'article L. 311-2 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 6 b de la loi n° 89.924 du 23 décembre 1989 autorisant le transfert à une société nationale des établissements industriels et commerciaux dépendant du Groupement industriel des armements terrestres, et le décret n° 90-582 du 9 juillet 1990 pris pour son application ;
Attendu que pour annuler le redressement, l'arrêt attaqué énonce que la société GIAT - Industries n'a été soumise au régime général de la sécurité sociale qu'à compter du décret n° 95-727 du 9 mai 1995 en vertu duquel les ouvriers recrutés par cette société ont bénéficié à la charge de celle-ci du maintien de leurs salaires ou demi-salaires en cas d'indemnisation des risques et charges de maladies ou d'accidents du travail, selon les modalités prévues par le Code de la sécurité sociale, par les caisses de régime général dont ils relèvent ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les ouvriers d'Etat concernés ayant cessé, à la suite du changement de la nature juridique de leur employeur, d'être employés par un établissement industriel de l'Etat pour devenir salariés de la société GIAT - Industries selon un contrat de travail de droit privé, se sont trouvés, dès leur recrutement par cette société, affiliés au régime général de la sécurité sociale, avec l'obligation corrélative pour
l'employeur de cotiser aux taux de ce régime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale ;
Attendu que pour annuler le redressement, l'arrêt attaqué énonce encore que, pendant six années, l'URSSAF a reçu sans les contester les bordereaux de règlement des cotisations de sécurité sociale mentionnant les taux réduits appliqués par la société ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la preuve d'une décision antérieure de l'organisme de recouvrement incombe à celui qui l'invoque, et que la simple référence à une possibilité de connaître la pratique de l'employeur et au silence gardé par l'URSSAF lors du règlement des cotisations ne suffit pas à caractériser l'existence d'une décision implicite admettant en connaissance de cause la pratique litigieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Giat industries aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de l'URSSAF des Hautes-Pyrénées et de la société Giat industries ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille.