AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller FARGE, les observations de Me Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X..., épouse Z..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de GRENOBLE du 8 juillet 1999 qui, dans l'information suivie contre Y..., a renvoyé ce dernier devant la cour d'assises de l'ISERE sous l'accusation de viols et agressions sexuelles aggravés mais a déclaré l'action publique éteinte par prescription pour d'autres faits de viols aggravés ;
Vu le mémoire produit ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 3, du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-23, 222-24, 2, du Code pénal, 7, alinéa 3, 575, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'action publique prescrite en ce qui concerne les agissements commis par Y... au préjudice de X... ;
" aux motifs que X..., née le 16 juin 1972, a déclaré avoir été victime de viols, courant 1981 à 1984 ; que les lois de 1989 et 1995 ont repoussé la prescription des crimes commis sur des mineurs lorsqu'ils ont été commis par un ascendant ou une personne ayant autorité ; qu'Y... n'avait aucunement une de ces qualités ; que la loi de 1998 ne fixe pas ces conditions mais que lors de sa survenance, les faits étaient prescrits depuis déjà 1994 ;
" alors que tout arrêt doit contenir les motifs propres à justifier sa décision ; que la prescription de l'action publique est suspendue, pendant la minorité de la victime, lorsque les faits ont été commis par un ascendant ou par une personne ayant autorité ;
qu'en l'espèce, il ressort de l'ordonnance du 25 mai 1999 que Y... avait eu la charge de la victime au cours des week-end et des vacances d'été, durant lesquelles il l'avait hébergée à Forcalquier, et se trouvait par-là même investi d'une autorité à son égard ; qu'ainsi, en se bornant, pour déclarer l'action publique prescrite, à relever que le prévenu n'avait aucunement l'une de ces qualités, sans préciser en quoi la relation d'autorité faisait défaut, la chambre d'accusation a privé sa décision de base légale " ;
Attendu que, pour décider que les faits de viols aggravés qui auraient été commis, de 1981 à 1984, sur X..., née le 16 juin 1972, étaient prescrits à la date du premier acte de poursuite, le 5 juin 1998, la chambre d'accusation se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre d'accusation a justifié sa décision dès lors qu'après avoir souverainement constaté qu'Emile X... n'était pas un ascendant de la victime et n'avait aucune autorité sur elle, la juridiction du second degré énonce, à bon droit, que les lois des 10 juillet 1989 et 4 février 1995, qui ont reporté le point de départ du délai de prescription à la majorité de la victime, ne pouvaient recevoir application qu'au cas où le crime avait été commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la victime ou par une personne ayant autorité sur elle, et que la loi du 17 juin 1998, ayant supprimé cette exigence, ne pouvait s'appliquer à des faits déjà prescrits lors de son entrée en vigueur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Farge conseiller rapporteur, M. Pelletier conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Launay ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;