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18/07/2000 | FRANCE | N°98-20447

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 juillet 2000, 98-20447


Attendu que la société compagnie Cargill France a adhéré, en 1963, au régime de retraites complémentaires de l'Union de prévoyance des salariés (UPS) et a opté pour des taux de cotisation de 8,5 % sur le salaire total pour les agents de maîtrise, employés et ouvriers, et, pour les cadres, de 8,5 % limité à une première tranche de salaire (T 1) et de 2,5 % sur une seconde tranche (T 2) ; qu'elle a cédé, le 1er avril 1990, son établissement de Guingamp à la société André Glon ; que cette dernière société a affilié les salariés dont les contrats de travail lui ont été

transmis à l'Institution nationale de retraite et de prévoyance des salarié...

Attendu que la société compagnie Cargill France a adhéré, en 1963, au régime de retraites complémentaires de l'Union de prévoyance des salariés (UPS) et a opté pour des taux de cotisation de 8,5 % sur le salaire total pour les agents de maîtrise, employés et ouvriers, et, pour les cadres, de 8,5 % limité à une première tranche de salaire (T 1) et de 2,5 % sur une seconde tranche (T 2) ; qu'elle a cédé, le 1er avril 1990, son établissement de Guingamp à la société André Glon ; que cette dernière société a affilié les salariés dont les contrats de travail lui ont été transmis à l'Institution nationale de retraite et de prévoyance des salariés des industries agricoles et alimentaires et des commerces qui s'y rattachent (Isica), à laquelle elle adhérait, pour l'ensemble de son personnel, à un taux de cotisation uniformément fixé à 6 %, l'assiette en étant limitée à la tranche T 1 pour les cadres ; que l'UPS a réclamé à la société André Glon le paiement d'une contribution au maintien des droits acquis par les salariés au titre du régime de retraite complémentaire auquel ils avaient été affiliés par leur précédent employeur ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 9 et 11 de l'annexe A à l'accord du 8 décembre 1961 conclu entre, d'une part, le CNPF et, d'autre part, la CFDT, la CFTC, la CGC, la CGT-FO et la CGT, ensemble l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;

Attendu qu'en vertu du premier de ces textes les changements d'institutions gérant les régimes de retraites complémentaires sont autorisés lorsqu'ils correspondent à des modifications rendues nécessaires par la transformation des entreprises, notamment en cas de cessions d'établissements, mettant en présence plusieurs entreprises ou établissements adhérant à des régimes différents ; que l'utilisation de la faculté de changer de régime de retraites suppose la régularisation complète de la situation au regard de l'institution destinée à être quittée (règlement des cotisations et de toute somme due) ; que, selon le second texte, les transferts d'affiliation ainsi autorisés ne donnent lieu de la part des institutions ni à imposition d'une indemnité de démission, ni à l'exigence d'un droit d'entrée, sous réserve des conséquences qui pourraient résulter des modifications des niveaux d'engagement (taux, assiette) ;

Attendu que, pour débouter l'UPS de sa demande, l'arrêt attaqué retient que les changements d'institution des seuls salariés, non accompagnés, comme en la cause, d'un changement d'institution de l'entreprise elle-même, sont exclus du champ d'application de l'accord du 8 décembre 1961 ; que la société André Glon n'a pas, à la suite de l'acquisition de l'établissement de Guingamp, changé d'institution de retraite complémentaire mais est demeurée adhérente de l'Isica auprès de laquelle son personnel salarié est affilié depuis 1961 ; qu'elle s'est contentée, par sa déclaration à cet organisme en date du 31 décembre 1990, d'étendre aux salariés repris le régime applicable à son personnel avant l'achat de l'usine de Guingamp ; que la seule modification affectant ainsi les onze salariés effectivement repris ne saurait constituer le changement d'institution prohibé, de caractère volontaire et lucratif ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les changements d'institutions prévus par les articles 9 et 11 de l'accord du 8 décembre 1961 sont ceux qui affectent le régime de retraite complémentaire des salariés dont l'entreprise a été transformée, peu important que l'entreprise cessionnaire n'ait pas elle-même changé d'institution, la cour d'appel, qui a constaté par des motifs propres et des motifs adoptés des premiers juges que la société compagnie Cargill France avait cédé à la société André Glon le fonds de commerce et l'immeuble composant l'usine qu'elle exploitait à Guingamp, que les contrats de travail en cours au jour de la vente avaient subsisté entre l'acquéreur et le personnel de l'usine cédée en vertu de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail et que les deux entreprises adhéraient à des régimes différents, a violé lesdits textes ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 23 du règlement intérieur de l'ARRCO ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, si, à la suite d'une transformation mettant en présence plusieurs entreprises, le nouveau contrat conclu par l'entreprise issue de l'opération prévoit un taux ou une assiette de cotisation sur des bases inférieures à celles retenues précédemment, mais au moins égales à celles figurant dans le contrat antérieur le moins favorable, les droits acquis sont maintenus et l'entreprise absorbante ou résultant de la transformation, est tenue, à ce titre, de verser une contribution calculée en fonction de la diminution des cotisations provenant soit du taux, soit de l'assiette, soit de ces deux éléments ;

Attendu qu'à l'appui de sa décision l'arrêt énonce qu'au surplus, " la transformation mettant en présence plusieurs entreprises " visée à l'article 23 du règlement intérieur de l'ARRCO, se différencie de la simple cession d'un établissement, limitée, comme en l'espèce, à l'intégration d'une unique structure matérielle et à une légère augmentation d'effectif, et ne se traduisant pas par un changement de forme sociale ou de statut juridique de l'entreprise (fusion, absorption...) ; que l'établissement de Guingamp n'était pas adhérent de l'UPS, à lui seul et en tant que tel, mais en qualité d'entité faisant partie intégrante de la société compagnie Cargill France, elle-même affiliée à cet organisme ; qu'à partir du moment où l'établissement de Guingamp a été détaché de la société compagnie Cargill France pour être rattaché à la société André Glon, c'est le régime de retraite de cette entreprise, à savoir l'Isica, qui est directement et aussitôt entré en vigueur sans qu'il y ait eu de nouveau contrat avec ledit organisme (Isica) ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'au sens de l'article 23 du règlement intérieur de l'ARRCO, auquel renvoie expressément l'article 11, paragraphe A, alinéa 1, relatif aux conséquences des transferts d'affiliation à l'égard des entreprises, de l'accord du 8 décembre 1991, la transformation mettant en présence plusieurs entreprises doit s'entendre, conformément à l'article 9, paragraphe A. a) du même accord, des fusions, absorptions totales ou partielles d'une entreprise par une autre, ainsi que des cessions d'un établissement, mettant en présence plusieurs entreprises ou établissements adhérant à des régimes différents, la cour d'appel, qui a constaté qu'une entreprise, adhérant à l'UPS pour l'ensemble de ses établissements, avait cédé un établissement à une seconde entreprise adhérant à l'Isica, a violé ledit texte ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98-20447
Date de la décision : 18/07/2000
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Cession partielle - Cession d'un établissement - Effets - Retraite - Retraite complémentaire - Affiliation à une caisse de retraite - Accord du 8 décembre 1961 - Application - Changement d'institution - Définition - Portée.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Cession partielle - Cession d'un établissement - Effets - Retraite - Retraite complémentaire - Affiliation à une caisse de retraite - Contribution au maintien des droits acquis - Paiement - Conditions - Changement d'institution de l'entreprise cessionnaire - Nécessité (non).

1° Viole les articles 9 et 11 de l'annexe A à l'accord du 8 décembre 1961 conclu entre, d'une part, le CNPF et, d'autre part, la CFDT, la CFTC, la CGC, la CGT-FO et la CGT, la cour d'appel qui, pour débouter une caisse de retraite complémentaire de sa demande de contribution au maintien des droits acquis des salariés, formée à l'encontre du cessionnaire d'un fonds de commerce, retient que les changements d'institution des seuls salariés, non accompagnés d'un changement d'institution de l'entreprise elle-même, sont exclus du champ d'application desdits textes. En effet, les changements d'institution qui donnent lieu à paiement d'une contribution au maintien des droits acquis par les salariés au titre du régime de retraite complémentaire auquel ils avaient été affiliés par leur précédent employeur sont ceux qui affectent le régime de retraite complémentaire des salariés dont l'entreprise a été transformée, peu important que l'entreprise cessionnaire n'ait pas elle-même changé d'institution.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Cession partielle - Cession d'un établissement - Effets - Retraite - Retraite complémentaire - Affiliation à une autre caisse de retraite - Règlement intérieur de l'Association des régimes de retraites complémentaires - Transformation mettant en présence plusieurs établissements - Définition - Portée.

2° Viole l'article 23 du règlement intérieur de l'Association des régimes de retraites complémentaires (ARRCO) la cour d'appel qui, pour débouter une caisse de retraite complémentaire de sa demande de contribution au maintien des droits acquis des salariés, formée à l'encontre du cessionnaire d'un fonds de commerce, énonce que la transformation mettant en présence plusieurs entreprises, visée à l'article 23 du règlement intérieur de l'ARRCO se différencie de la simple cession d'un établissement, limitée à l'intégration d'une unique structure matérielle et à une légère augmentation d'effectif et ne traduisant pas un changement de forme sociale ou de statut juridique de l'entreprise. En effet, au sens dudit texte la transformation mettant en présence plusieurs entreprises doit s'entendre des fusions, absorptions totales ou partielles d'une entreprise par une autre, ainsi que des cessions d'un établissement, mettant en présence plusieurs entreprises ou établissements adhérant à des régimes différents.


Références :

1° :
1° :
2° :
Accord du 08 décembre 1961 Annexe A art. 9, art. 11
Code du travail L122-12 al. 2
Règlement intérieur de l'Association des régimes de retraites complémentaires ARRCO art. 23

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 16 juin 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jui. 2000, pourvoi n°98-20447, Bull. civ. 2000 V N° 284 p. 224
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2000 V N° 284 p. 224

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Chagny.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Delaporte et Briard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.20447
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