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11/07/2000 | FRANCE | N°98-40146

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juillet 2000, 98-40146


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Claude B..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 4 juin 1997 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit :

1 / de la société Bata Europe, société à responsabilité limitée, dont le siège est Z... Eve, Défense 9 ...,

2 / de la société The Zimbabwe Bata Shoe company limited, dont le siège est Gweru (Zimbabwe),

défenderesses à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du

30 mai 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Claude B..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 4 juin 1997 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit :

1 / de la société Bata Europe, société à responsabilité limitée, dont le siège est Z... Eve, Défense 9 ...,

2 / de la société The Zimbabwe Bata Shoe company limited, dont le siège est Gweru (Zimbabwe),

défenderesses à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 mai 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, MM. Merlin, Le Roux-Cocheril, Finance, Texier, Mmes Lemoine Jeanjean, Quenson, conseillers, M. Poisot, Mmes Maunand, Bourgeot, MM. Soury, Liffran, Besson, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. B..., de la SCP Gatineau, avocat de la société Bata Europe, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que, soutenant avoir pour employeurs la société Bata Europe et la société The Zimbabwe Bata shoe company limited, faisant partie du groupe Bata, et que la rupture de son contrat de travail s'analysait en un licenciement dès lors qu'elle ne pouvait être attribuée à une volonté claire et non équivoque de sa part de démissionner, M. B... a engagé, devant le conseil de prud'hommes, une instance contre ces deux sociétés pour obtenir leur condamnation solidaire au paiement des indemnités de rupture et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur la recevabilité du premier moyen, contestée par la défense :

Attendu que la société Bata Europe prétend que le premier moyen, tiré de l'existence entre les sociétés du groupe Bata d'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction conférant à l'une et l'autre des sociétés précitées la qualité de co-employeur à l'égard de M. B..., est irrecevable comme nouveau ;

Mais attendu qu'il résulte tant des conclusions que des énonciations de l'arrêt attaqué que M. B... a soutenu avoir été employé au service des sociétés du groupe Bata en France et à l'Etranger ;

Qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir doit être rejetée ;

Sur le premier moyen, dirigé contre le chef de décision ayant débouté le salarié de ses demandes contre la société Bata Europe :

Vu l'article L. 121-1 du Code du travail ;

Attendu que pour décider que la société Bata Europe n'avait pas la qualité d'employeur de M. B..., l'arrêt attaqué énonce que M. B... ne produit aux débats aucun contrat de travail, avenant, lettre, ni le moindre écrit de nature à établir une relation quelconque de travail avec la société Bata Europe ; qu'aucun document ne démontre, en effet, que cette dernière société aurait exercé, à l'égard de M. B..., les prérogatives d'un employeur, ne l'ayant ni embauché, rémunéré, muté ou licencié, et n'étant jamais intervenue, à un titre quelconque, dans les diverses affectations de M. B... au sein du groupe Bata ; qu'ainsi, celui-ci ne produit aux débats aucun écrit par lui à Bata Europe ou reçu d'elle ; que lorsque M. B... a contesté les circonstances de la rupture de son contrat avec la société The Zimbabwe Bata shoe, il s'est adressé aux président et vice-président de Bata shoe organisation et de Bata Limited (Batalim) au Canada ; que c'est d'ailleurs la société Batalim de Toronto qui lui a répondu qu'elle n'avait pas de poste à lui proposer dans le groupe Bata ; que l'attestation de M. Jacques Y..., ex-directeur des affaires juridiques de la société Bata Europe, confirme que toutes les décisions concernant les embauches, les mutations et les rémunérations étaient prises en commun par les responsables de la holding régionale, soit en l'espèce Bata caro à Nairobi, et de la holding mondiale, à savoir Batalim à Toronto ; que la société Bata Europe n'a aucune qualité de holding ou de société mère et ne saurait représenter le groupe Bata ; qu'il résulte de l'ensemble de ces énonciations que la société Bata Europe n'a eu, à aucun moment, la qualité d'employeur de M. B... ;

Attendu, cependant, que le salarié employé en qualité de cadre international par un groupe de sociétés entre lesquelles existe une confusion d'intérêts, d'activités et de direction a, pour coemployeurs, les diverses sociétés appartenant à ce groupe de sociétés ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher s'il n'existait pas entre les diverses sociétés appartenant au groupe Bata une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, ce dont, dans l'affirmative, il résulterait que la société Bata Europe a été, notamment avec la société The Zimbabwe Bata Shoe company limited, coemployeurs de M. A..., ou si un lien de subordination de M. B... n'était caractérisé qu'à l'égard de la société Zimbabwe Bata Shoe company limited, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le second moyen, dirigé contre le chef de décision ayant débouté le salarié de ses demandes contre la société The Zimbabwe Bata Shoe company limited:

Vu les articles L. 122-4 et L. 122-5 du Code du travail ;

Attendu que pour décider que M. B... avait donné sa démission à l'égard de la société The Zimbabwe Bata Shoe company limited et le débouter de ses demandes précitées formées à l'encontre de cette dernière, l'arrêt énonce que M. B... a démissionné de ses fonctions de directeur général de la société The Zimbabwe Bata Shoe par lettre du 2 décembre 1991 adressée au président du conseil d'administration de cette société dans les termes suivants : "pour des raisons familiales, je suis obligé de remettre ma démission à The Zimbabwe Bata Shoe company limited" ; que dans un autre courrier du 2 décembre 1991 adressé à M. X... personnellement, celui-ci étant président de la société The Zimbabwe Bata Shoe, M. B... a expliqué qu'il démissionnait en raison de ce qu'il devait résider seul à Gweru, sa famille n'ayant pas pu rester dans cette localité du fait que sa fille ne pouvait y poursuivre ses études ; qu'aucun élément du dossier ne démontre que lors de son affectation au Zimbabwe, il aurait été promis à M. B... qu'il serait affecté à Harare, cette affectation ne pouvant nullement se déduire du fait qu'il avait été indiqué qu'il y existait une école française pour sa fille ; qu'au contraire, M. B..., qui avait été directeur dans plusieurs sociétés africaines ou malgaches du groupe Bata, ne pouvait ignorer que l'unité de fabrication de Bata Zimbabwe se trouvait à Gwery, à quatre cents kilomètres de Harare ; que même si lors de sa démission, M. B... escomptait obtenir un autre poste de direction au sein du groupe Bata, il n'en demeure pas moins que sa démission à l'égard de la société The Zimbabwe Bata Shoe n'était assortie d'aucune condition et qu'elle témoignait d'une volonté ferme, définitive et sans équivoque de l'intéressé de quitter cette société ;

Attendu, cependant, que la cour d'appel a constaté que, d'une part, M. B... n'avait donné sa démision qu'à l'égard d'une des sociétés du groupe et pour un poste déterminé et non de son emploi et que, d'autre part, il avait invoqué comme cause de sa démission une modification de son lieu d'affectation au Zimbabwe rendant impossible, faute d'établissement scolaire, la poursuite des études de sa fille et, en conséquence, une résidence avec sa famille dans ce pays, ce dont il résultait qu'il n'avait pas manifesté une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail et que la rupture de ce dernier s'analysait en un licenciement ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les sociétés Bata Europe et The Zimbabwe Bata Shoe company limited aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés Bata Europe et The Zimbabwe Bata Shoe company limited ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98-40146
Date de la décision : 11/07/2000
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Société - Groupe de sociétés employant un cadre international - Démission de celui-ci d'une de ces sociétés - Effet à l'égard des autres.


Références :

Code du travail L122-4 et L122-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), 04 juin 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2000, pourvoi n°98-40146


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WAQUET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.40146
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