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05/07/2000 | FRANCE | N°98-20857

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 juillet 2000, 98-20857


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière (SCI) La Cordaire, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 15 juin 1998 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre civile, section A), au profit :

1 / de Mme Jacqueline R..., épouse U..., demeurant ...,

2 / de M. Z...,

3 / de Mme K..., épouse Z...,

demeurant ensemble ...,

4 / de M. A...,

5 / de Mme X..., épouse A...,

demeurant tous deux "Les Mees",

53410 Le Bourgneuf la Forêt,

6 / de M. F...,

7 / de Mme T..., épouse F...,

demeurant tous deux ...,

8 / de M. Lo...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière (SCI) La Cordaire, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 15 juin 1998 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre civile, section A), au profit :

1 / de Mme Jacqueline R..., épouse U..., demeurant ...,

2 / de M. Z...,

3 / de Mme K..., épouse Z...,

demeurant ensemble ...,

4 / de M. A...,

5 / de Mme X..., épouse A...,

demeurant tous deux "Les Mees", 53410 Le Bourgneuf la Forêt,

6 / de M. F...,

7 / de Mme T..., épouse F...,

demeurant tous deux ...,

8 / de M. Louis H...,

9 / de Mme Odette B..., épouse H...,

demeurant tous deux ...,

10 / de M. Pierre H..., demeurant ...,

11 / de Mme Richard, épouse I...,

12 / de M. Serge I...,

demeurant tous deux ..., "Le Castel Brissac", 49000 Angers,

13 / de M. J...,

14 / de Mme Y..., épouse J...,

demeurant tous deux ...,

15 / de M. O...,

16 / de Mme G..., épouse O...,

demeurant tous deux "l'Escutiere", 49490 Meigne le Vicomte,

17 / de M. Serge Q...,

18 / de Mme Claudine D..., épouse Q...,

demeurant tous deux ...,

19 / de M. M... Le Breton, demeurant chemin de Port, Charlotte Saint-Marc-sur-Mer, 44550 Saint-Nazaire,

20 / de M. Alain S...,

21 / de Mme XA..., épouse S...,

demeurant tous deux "Coulamer", 53700 Saint-Germain de Coulamer,

22 / de M. Gérard V..., demeurant ..., 2e étage,75116 Paris,

23 / de M. Maurice XX...,

24 / de Mme N..., épouse XX...,

demeurant tous deux ...,

25 / de M. XZ...,

26 / de Mme P..., épouse XZ...,

demeurant tous deux "Les Landes", 53240 Saint-Germain le Guillaume,

27 / de M. XB...,

28 / de Mme L..., épouse XB...,

demeurant tous deux ...,

29 / de la société Espace construction, société anonyme, dont le siège est ...,

30 / de M. Hervé C..., demeurant ...,

31 / de M. Denis E...,

32 / de Mme XY..., épouse E...,

demeurant tous deux ...,

défendeurs à la cassation ;

La société Espace construction a formé, par un mémoire déposé au greffe le 25 mai 1999, un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation, également annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 juin 2000, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Chemin, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Villien, Cachelot, Martin, Mme Lardet, conseillers, Mmes Masson-Daum, Fossaert-Sabatier, Boulanger, M. Betoulle, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Chemin, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la société civile immobilière La Cordaire, de la SCP Tiffreau, avocat de Mme U..., des époux Z..., des époux A... et des époux F..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Espace construction, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 15 juin 1998) qu'ayant entrepris, en 1989, la réalisation d'un programme immobilier comportant 48 logements répartis en deux bâtiments avec une première tranche de 28 logements et une seconde de 20 autres, 48 garages, et 20 emplacements de stationnement, la société Espace construction, après l'édification et la vente de la première partie de son programme, a, par acte du 13 octobre 1993, cédé les volumes non encore construits à la société civile immobilière La Cordaire (SCI) qui a fait édifier une résidence pour étudiants de 66 logements avec 72 emplacements de stationnement dont 35 extérieurs ; que les époux Z..., A..., M. C..., les époux E..., F..., H..., les consorts XW..., les époux I..., J..., O..., Q..., M. Le Breton, les époux S..., U..., XX..., XZ..., XB..., propriétaires des lots dans le premier bâtiment construit ont assigné la société Espace construction en réparation de la diminution de la valeur de leurs lots respectifs et du préjudice moral subi par chacun d'eux à la suite de la modification ainsi intervenue, et la SCI en déclaration de jugement commun ; que la société Espace construction a sollicité la garantie de la SCI ; que Mme U... est, après le décès de son mari, intervenue à la

procédure en qualité d'héritière de ce dernier ;

Attendu que la société Espace construction et la SCI font grief à l'arrêt de les condamner, la première, à payer aux divers copropriétaires une indemnité, la seconde, après condamnation de la première, à garantir cette dernière, alors, selon le moyen, "1 ) que la condition potestative fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher et rend nulle la convention en son entier ; que ne constituait pas une telle condition la clause aux termes de laquelle le promoteur vendeur n'apporterait aucune restriction, condition ou réserve à son obligation de délivrer le lot vendu mais se réservait la faculté de modifier son programme de construction, notamment par la création de volumes supplémentaires ou la subdivision de volumes existants, une telle stipulation s'analysant en une renonciation licite des acquéreurs à exiger l'environnement initialement prévu ; qu'en décidant qu'elle était inopposable aux acquéreurs qui ne pouvaient être réputés l'avoir acceptée en toute connaissance de cause dès lors que les modifications étaient abandonnées au gré du promoteur et aboutissaient à bouleverser de manière unilatérale une partie substantielle des actes de vente en tant qu'ils définissaient les caractéristiques de l'ensemble immobilier au vu desquelles lesdits acquéreurs s'étaient engagés, considérant ainsi, certes implicitement mais nécessairement, que la clause litigieuse constituait une condition potestative, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1174 du Code civil ; 2 ) que, saisi d'une demande tendant à voir constater qu'un vendeur d'immeuble à construire n'a pas rempli ses obligations, le juge, tenu de motiver sa décision, se doit de préciser quelles étaient ces obligations et en quoi elles n'ont pas été exécutées ; qu'en retenant, pour déclarer que le promoteur cédant n'avait pas délivré aux acquéreurs le cadre qui leur avait été assuré, après avoir néanmoins constaté que le second immeuble édifié avait le même volume et la même emprise que celui projeté, que la présence d'étudiants présentait nécessairement des inconvénients quant à la promiscuité et à la tranquillité et que la construction litigieuse, si elle ne pouvait être qualifiée de "hideuse", présentait un aspect beaucoup moins flatteur que le premier bâtiment érigé en fond de parcelle et ainsi partiellement occulté par un second de moindre qualité, tandis que les documents publicitaires vantaient la noblesse de l'architecture ou la haute qualité esthétique et technique de l'ensemble, élevé dans un quartier résidentiel, se prononçant ainsi par des considérations abstraites et de portée générale, d'ailleurs péjoratives à l'égard de certains citoyens, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des prescriptions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile" ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que les plans, l'état descriptif de division, le cahier des charges, le règlement de copropriété qui sont visés aux actes de vente et qui ont valeur contractuelle concernaient une résidence divisée en deux bâtiments et limitée à 48 appartements, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que la stipulation contractuelle selon laquelle la société Espace construction conservait, malgré la vente et les documents descriptifs, toute latitude pour modifier le programme de construction qu'elle entreprenait ou l'affectation de tout ou partie des bâtiments ne saurait être valablement opposée aux acquéreurs des appartements du premier bâtiment construit, dès lors que les modifications que ces acquéreurs ne pouvaient être ainsi réputés avoir accepté en toute connaissance de cause, étaient abandonnées au gré du promoteur et aboutissaient à bouleverser de manière unilatérale une partie substantielle des actes de vente en ce qu'ils définissaient les caractéristiques du programme immobilier au vu desquelles ces acquéreurs s'étaient engagés ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que le deuxième bâtiment ne représentait, hormis son volume et son emprise, rien de commun avec celui initialement projeté puisqu'il comportait 66 logements avec 72 emplacements de stationnement au lieu de 20, et que l'aspect extérieur des espaces communs se trouvait modifié par la création de places supplémentaires de stationnement, la cour d'appel a suffisamment caractérisé le manquement du promoteur cédant à délivrer aux premiers acquéreurs le cadre qui leur avait été promis ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à garantir la société Espace construction, alors, selon le moyen, "1 / que, sauf à lui conférer un caractère indéterminé, l'engagement pris par la société La Cordaire dans l'acte du 13 octobre 1993 de se substituer à toutes obligations ou engagements pouvant être à la charge du vendeur et de faire son affaire personnelle de tout recours pouvant être intenté par un tiers ne pouvait concerner que les actions relatives à la délivrance du permis de construire, ainsi que l'exprimait clairement et sans ambiguïté la clause litigieuse insérée dans un chapitre intitulé "permis de construire" ;

qu'en décidant que cette promesse de substitution n'était pas limitée aux recours concernant le permis de construire mais visait tout engagement quel qu'il fût à la charge du vendeur, même ceux que l'acquéreur ne pouvait connaître, la cour d'appel a dénaturé la stipulation par elle appliquée en violation de l'article 1134 du Code civil ; 2 / que la clause en question ne visait que les recours pouvant être intentés par un tiers quant aux constructions que le cessionnaire se proposait d'édifier et ne pouvait en conséquence concerner les actions susceptibles d'être exercées par des copropriétaires, lesquels n'étaient pas des tiers à l'égard de leur vendeur et, partant, du cessionnaire de celui-ci ; qu'en fondant sur une telle stipulation, la condamnation de la SCI La Cordaire à garantir son cédant de toutes les condamnations prononcées contre lui au profit de ses cocontractants, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine, qu'en dépit de sa place au chapitre "permis de construire" de l'acte de cession du 13 octobre 1993, la clause, par laquelle l'acquéreur se substituait à toutes les obligations ou engagements pouvant être à la charge du vendeur, avait une portée générale et que la SCI était parfaitement informée des difficultés suscitées par les copropriétaires du premier bâtiment face à son projet de construction d'un second, la cour d'appel a pu en déduire, sans dénaturation, que cette clause concernait les actions susceptibles d'être engagées par les copropriétaires à son encontre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne, ensemble, la société civile immobilière La Cordaire et la société Espace construction aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société civile immobilière La Cordaire à payer à Mme U..., aux époux Z..., A... et Chateau, ensemble, la somme de 12 000 francs ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société civile immobilière La Cordaire et de la société Espace construction ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 98-20857
Date de la décision : 05/07/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers (1re chambre civile, section A), 15 juin 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 jui. 2000, pourvoi n°98-20857


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEAUVOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.20857
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