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06/06/2000 | FRANCE | N°00-81725

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 juin 2000, 00-81725


REJET des pourvois formés par :
- X..., Y..., Z...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, du 16 février 2000, qui les a renvoyés devant la cour d'assises spéciale des Yvelines notamment sous l'accusation d'importation illicite de stupéfiants en bande organisée.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour Z..., pris de la violation des articles 156, 427, 591, 593 du Code de procédure pénale, 6.1 et 6.2 de la Convention européenne des droit

s de l'homme, 66 de la Convention d'application de l'accord de Schengen et 21 ...

REJET des pourvois formés par :
- X..., Y..., Z...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, du 16 février 2000, qui les a renvoyés devant la cour d'assises spéciale des Yvelines notamment sous l'accusation d'importation illicite de stupéfiants en bande organisée.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour Z..., pris de la violation des articles 156, 427, 591, 593 du Code de procédure pénale, 6.1 et 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66 de la Convention d'application de l'accord de Schengen et 21 de la loi du 10 mars 1927, contradiction et défaut de motifs :
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Z... devant la cour d'assises des Yvelines du chef d'importation de produits stupéfiants en bande organisée, fabrication de documents administratifs et diverses autres infractions commises pour la période allant jusqu'au 13 décembre 1997 ;
" aux motifs que Z... a fait déposer devant la chambre d'accusation un mémoire par lequel il demande qu'il soit constaté qu'il a été extradé sur le fondement d'un mandat d'arrêt international en date du 5 novembre 1996 au vu de réquisitions en date du 20 octobre 1996 et qu'en application du principe de la spécialité de l'extradition, sa mise en examen supplétive pour des faits allant du 13 décembre 1996 au 13 décembre 1997 est inopérante et qu'en conséquence il ne pourra être renvoyé devant la cour d'assises pour ces faits ; que Z... est toutefois mal fondé à soutenir ce moyen juridique dans la mesure où il résulte de l'arrêt d'extradition du tribunal central d'instruction de Madrid en date du 17 décembre 1997 qu'il a, alors qu'il était interrogé conformément à la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990, donné son accord pour être jugé en France afin d'y être jugé pour les faits incriminés dans les mandats d'arrêt internationaux mentionnés et, en raison de sa renonciation expresse au principe de la spécialité, pour y être jugé pour tout autre fait ; que cette renonciation a conduit le juge espagnol à accéder à la demande d'extradition formulée par la France concernant Z..., afin d'être jugé par les tribunaux ou de purger les peines imposées pour les faits énumérés dans les mandats d'arrêt internationaux mentionnés ou pour n'importe quel autre fait en raison de sa renonciation au bénéfice de la spécialité (D 3387, D 3388) ; que cette renonciation est conforme au principe fixé par l'article 66 de la Convention d'application de l'accord de Schengen ; que dans ces conditions, aucun obstacle juridique n'existe à la mise en accusation de Z... pour l'ensemble des faits pour lesquels il a été mis en examen ;
" alors qu'il ne résulte ni de l'arrêt d'extradition du tribunal central d'instruction de Madrid du 17 décembre 1997, ni d'aucune autre pièce de la procédure que Z... aurait expressément ou implicitement renoncé au principe de spécialité de l'extradition et accepté par avance d'être jugé sur les faits postérieurs au 13 octobre 1996 et non visés par les mandats d'arrêts internationaux et l'arrêt d'extradition ; qu'en affirmant le contraire la chambre d'accusation a dénaturé les pièces de la procédure et entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt prononcé le 17 septembre 1997 par le tribunal central d'instruction de Madrid que, dans la procédure d'extradition suivie contre lui en Espagne à la demande du gouvernement français, le juge a constaté que Z..., assisté de son avocat et d'un interprète, après avoir consenti à l'extradition sans procédure formelle, a déclaré renoncer au bénéfice de la spécialité de l'extradition, conformément aux dispositions de l'article 66 de la Convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation, à bon droit, a écarté la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de sa mise en examen supplétive pour les faits de trafic de stupéfiants postérieurs à ceux qui, visés dans le mandat d'arrêt international, ont motivé la demande d'extradition ;
Que le moyen, pris de la violation du principe de spécialité de l'extradition, n'est, dès lors, pas recevable ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour X..., pris de la violation des articles 347, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que la chambre d'accusation a refusé à X... la réalisation d'un curriculum vitae ;
" aux motifs, repris de l'arrêt de rejet de demande d'actes du 3 décembre 1999, que le dossier de personnalité de X... contient copie d'un interrogatoire de même nature établi le 16 mars 1988 ainsi que de l'enquête subséquente dans le cadre d'une affaire dans laquelle l'intéressé a été condamné le 26 mars 1992 à 8 années de réclusion criminelle, peine exécutée le 5 décembre 1994 ; qu'il apparaît dès lors qu'à l'époque des faits aujourd'hui reprochés à X..., cet interrogatoire avait conservé toute son actualité et qu'un nouvel interrogatoire ne serait qu'une répétition du précédent ;
" alors qu'il se déduit des dispositions combinées des articles 347 du Code de procédure pénale et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que tout accusé renvoyé devant la Cour d'assises a droit à ce que le curriculum vitae figurant dans le corps de l'arrêt de renvoi pièce conservée par le président de la cour d'assises en vue de la délibération de la cour et du jury tienne compte de l'évolution la plus récente de sa personnalité et de son existence ; que dans son mémoire régulièrement déposé devant la chambre d'accusation et de ce chef délaissé, X... faisait valoir qu'il n'avait pas fait l'objet dans la présente procédure d'une audition de curriculum vitae alors que sa situation avait fondamentalement évolué depuis le dernier curriculum vitae réalisé dans le cadre d'une précédente procédure criminelle et, qu'en décidant, a priori, que le dernier interrogatoire datant de 12 ans conservait toute son actualité et qu'un nouveau curriculum vitae était inutile, la chambre d'accusation a privé objectivement X... du procès équitable auquel il a droit devant la cour d'assises " ;
Attendu que X... a demandé à la chambre d'accusation d'ordonner un supplément d'information afin qu'il soit procédé à son interrogatoire de curriculum vitae ;
Que la juridiction d'instruction a écarté cette prétention en se référant à son précédent arrêt ayant déjà refusé de faire droit à la demande d'acte d'information au motif qu'était versé au dossier de personnalité de l'intéressé un interrogatoire de cette nature, établi dans une autre procédure, conservant son actualité à l'époque des faits poursuivis ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation, qui a souverainement estimé que l'information était complète, a justifié sa décision ;
Que le moyen, pris du caractère prétendument insuffisant des éléments de personnalité figurant dans l'arrêt de renvoi, ne saurait être admis ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par Y..., pris de la violation des articles 156, 427 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 et 6.2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défauts de motifs, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué, qui a renvoyé Y... devant une cour d'assises du chef du crime d'importation en contrebande de produits stupéfiants, a rejeté la demande de supplément d'information du prévenu, tendant à l'instauration d'une expertise vocale ;
" aux motifs que Y... a fait déposer devant la chambre d'accusation un mémoire par lequel il demande un supplément d'information pour qu'il soit procédé à l'audition des bandes des conversations téléphoniques entre "le nain" et les autres personnes ; que cette demande extrêmement tardive a pour objet une mesure qui n'est pas indispensable à la manifestation de la vérité, sachant qu'il est par ailleurs établi que Z..., lorsqu'il parlait du "nain", faisait allusion à Y... ; qu'il convient donc de ne pas l'accueillir ;
" alors, d'une part, que dans son mémoire régulièrement déposé, Y... faisait valoir que, dans la mesure où les personnes interrogées n'affirmaient pas qu'il était "le nain", et que lui-même avait contesté correspondre à ce personnage, il partait légitimement du principe qu'il était acquis au dossier qu'il n'était pas "le nain", et que c'est seulement au vu de l'ordonnance de transmission des pièces, tenant pour acquis qu'il était surnommé non seulement "Marco", mais également "le nain" ou "le nain de jardin", qu'il s'était vu dans l'obligation de demander l'expertise vocale ; qu'en qualifiant cette demande de tardive, sans répondre sur ce point au mémoire de Y..., la chambre d'accusation a privé sa décision de motifs ;
" alors, d'autre part, que lorsque la mise en accusation d'un prévenu du chef du crime d'importation en bande organisée de produits stupéfiants, dépend de la question de savoir s'il peut, ou non, être considéré comme étant la personne appelée "le nain" dans les conversations téléphoniques interceptées par les enquêteurs, la chambre d'accusation ne peut refuser de procéder à une expertise vocale pour déterminer avec certitude si le prévenu correspond, ou non, à cette personne ; qu'en refusant l'expertise vocale à Y..., au motif que cette mesure n'était pas indispensable à la manifestation de la vérité, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés et les droits de la défense " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour X..., pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 100 et suivants et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de X... d'importation de produits stupéfiants en bande organisée, importation et circulation en contrebande de marchandises prohibées, en l'espèce de la résine de cannabis, acquisition, cession, détention et transport de produits stupéfiants ;
" aux motifs que de nombreuses conversations téléphoniques démontraient que X... et "ses amis" constituaient un débouché important pour le cannabis de Z... ;
" alors que dans son mémoire régulièrement déposé, X... demandait à la chambre d'accusation d'écarter les éléments tirés des écoutes téléphoniques au double motif qu'ils n'avaient pas fait l'objet d'empreintes vocales et que les conversations téléphoniques, objet des écoutes, n'avaient jamais fait l'objet de retranscription intégrale et qu'en ne s'expliquant pas sur ces arguments péremptoires du mémoire du demandeur, la chambre d'accusation a privé sa décision de base légale ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour X..., pris de la violation des articles 222-36 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de X... des chefs d'importation de produits stupéfiants en bande organisée, importation et circulation en contrebande de marchandises prohibées, en l'espèce de la résine de cannabis, acquisition, cession, détention et transport de produits stupéfiants ;
" alors que les arrêts des chambres d'accusation prononçant une mise en accusation devant la cour d'assises doivent être déclarés nuls en cas d'absence, d'insuffisance ou de contradiction de motifs, et que les énonciations de l'arrêt relatives à la prétendue participation de X... à un trafic d'importation de stupéfiants, qui revêtent tantôt un caractère intelligible, tantôt un caractère hypothétique, ne permettent pas de justifier légalement la décision attaquée " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles des mémoires dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimées suffisantes contre X... et Y... pour ordonner leur renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation, notamment, d'importation illicite de stupéfiants en bande organisée ;
Qu'en effet, les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle les accusés ont été renvoyés, que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-81725
Date de la décision : 06/06/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

EXTRADITION - Effet - Principe de spécialité - Renonciation - Convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 (article 66) - Condition.

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 - Extradition - Effet - Principe de la spécialité - Renonciation - Condition

Le principe de spécialité de l'extradition n'est pas applicable lorsque la personne réclamée y a renoncé expressément en application de l'article 66 de la Convention signée à Schengen le 19 juin 1990. Tel est le cas de la personne qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui en Espagne à la demande du gouvernement français, a, selon l'arrêt d'une juridiction espagnole, déclaré renoncer au bénéfice de la spécialité de l'extradition après avoir consenti à l'extradition sans procédure formelle. Justifie dès lors sa décision, la chambre d'accusation qui rejette la demande de l'intéressé, tendant à l'annulation de sa mise en examen supplétive pour des faits postérieurs à ceux qui, visés dans le mandat d'arrêt international, ont motivé la demande d'extradition. (1).


Références :

Convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 art. 66

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles Chambre d'accusation, 16 février 2000

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1999-06-22, Bulletin criminel 1999, n° 144, p. 390 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 jui. 2000, pourvoi n°00-81725, Bull. crim. criminel 2000 N° 212 p. 626
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 212 p. 626

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Ferrari.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Gatineau, la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:00.81725
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