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31/05/2000 | FRANCE | N°99-81042

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mai 2000, 99-81042


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 15 janvier 1999, qui, pour agression et harcèlement sexuels, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, à 3 000 francs d'amende et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22 et 222-27 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs et défaut de base légale :
" en ce que

l'arrêt attaqué a condamné X..., déclaré coupable d'agression sexuelle sur la per...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 15 janvier 1999, qui, pour agression et harcèlement sexuels, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, à 3 000 francs d'amende et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22 et 222-27 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs et défaut de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné X..., déclaré coupable d'agression sexuelle sur la personne de Y..., à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis, à une peine d'amende de 3 000 francs et au paiement à celle-ci d'une somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts, outre 1 500 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs que la matérialité des faits dénoncés par Y... est compatible avec la version minimaliste qu'en donne X... qui reconnaît la préoccupation de ne pas encourir l'ire de son épouse ; qu'alors qu'il n'est fait état par Y... d'aucun grief qui motiverait une dénonciation calomnieuse ; qu'au contraire l'intéressée a attendu la plainte d'une collègue de travail pour dénoncer des faits sur lesquels elle avait redouté de n'être pas crue ; qu'il échet de considérer que X... a commis les faits dénoncés, tentant d'embrasser Y..., lui caressant les seins, la faisant tomber avec lui sur un lit ;
" alors, d'une part, qu'il résulte des propres énonciations de l'arrêt que lors de son audition, X... avait déclaré "quant à Y... :
je lui ai pris les mains, je lui ai dit : vous me plaisez en plaisantant. J'ai vu à son attitude que ces paroles la marquaient. Je me suis immédiatement excusé" ; qu'en retenant dès lors, pour dire caractérisé le délit d'agression sexuelle, que les allégations de Y..., selon lesquelles X... avait tenté de l'embrasser, lui caressant les seins et la faisant tomber sur un lit avec lui, étaient compatibles avec lesdites déclarations du prévenu, pourtant radicalement discordantes, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;
" alors, en tout état de cause, que la seule compatibilité de la version de la prétendue victime avec celle qualifiée de minimaliste du prévenu ne suffisait pas à elle seule à établir la matérialité du délit d'agression sexuelle poursuivi ; qu'en se fondant dès lors exclusivement sur cet élément, pourtant impropre à caractériser l'élément matériel du délit d'agression sexuelle, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale ;
" alors, enfin, qu'en se bornant à retenir les déclarations de la prétendue victime, selon lesquelles X... avait tenté de l'embrasser, lui caressant les seins et la faisant tomber avec lui sur un lit, la cour d'appel n'a pas caractérisé en quoi les atteintes sexuelles dénoncées auraient été commises avec violence, contrainte ou surprise, privant ainsi sa décision de toute base légale " ;
Attendu que, pour déclarer X... coupable d'agression sexuelle sur la personne de Y..., apprentie-serveuse, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'alors qu'elle était occupée à faire le ménage dans une chambre de l'hôtel qu'il dirigeait, il avait tenté de l'embrasser, lui avait caressé les seins et l'avait fait tomber sur le lit ; que les juges ajoutent qu'elle s'était débattue et avait menacé de prévenir l'épouse de l'agresseur ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a retenu la constance et la précision des déclarations de la victime ainsi que leur compatibilité avec la version des faits donnée par le prévenu, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4 et 222-33 du nouveau Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné X..., déclaré coupable de harcèlement sexuel sur la personne de Z..., à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis, à une peine d'amende de 3 000 francs et au paiement à celle-ci d'une somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts, outre 1 500 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs que X... convient avoir tenté d'embrasser Z..., lui avoir passé la main sur le cou au bar ; qu'il nie d'autres attouchements que la Cour considère comme établis, alors que la crédibilité de la victime qui savait perdre son emploi en dénonçant ces faits ne peut être remise en cause, alors encore que le comportement équivoque de X... est dénoncé dans la procédure par d'autres employées ; qu'il ressort de la propre audition de X..., qui revendique d'emblée la qualité de patron du bar, que celui-ci qui dirige l'activité des salariées au bar et au restaurant, donne les ordres, reçoit les professeurs du CFA venus apprécier le travail des apprenties, jouit de l'autorité du "patron", vocable sous lequel le désignent les parties civiles ; que les gestes posés par X..., de nature à lui apporter des gratifications de nature sexuelle, alors qu'il avoue s'inquiéter "de plaire encore", n'ont été supportés par Z.... que sous l'effet de la contrainte, liée à sa dépendance économique, alors qu'il est particulièrement difficile de trouver un stage d'apprentissage ;
" alors, d'une part, que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ; que le délit de harcèlement sexuel n'est constitué que lorsqu'une personne, abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, exerce des menaces, contraintes ou pressions graves, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle ; qu'en l'espèce, il ne ressort d'aucun des motifs de l'arrêt que X... ait usé de menaces à l'encontre de Z... pour obtenir des avantages de nature sexuelle ; que tout au contraire, il y est relevé que lors de son audition, Z... avait précisé que X... ne lui avait jamais fait de proposition indécente et ne l'avait jamais menacée ; qu'en retenant néanmoins la culpabilité de X... du chef de harcèlement sexuel, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;
" alors, d'autre part, que les affirmations péremptoires de l'arrêt selon lesquelles la crédibilité de la victime qui savait perdre son emploi en dénonçant ces faits ne peut être remise en cause ; et les faits poursuivis n'ont été supportés par Z... que sous l'effet de la contrainte, liée à sa dépendance économique n'établissent nullement le chantage à l'emploi imputable à X... à défaut duquel le harcèlement sexuel n'est pas caractérisé ; qu'ainsi, faute de caractériser l'existence d'une contrainte qu'aurait exercé X... sur la prétendue victime dans le but d'obtenir ses faveurs sexuelles, la cour d'appel a de nouveau entaché son arrêt d'un défaut de base légale " ;
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 222-33 du Code pénal, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 1998 ;
Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;
Attendu que, pour déclarer X... coupable de harcèlement sexuel, commis de septembre 1996 à avril 1997, sur la personne de Z..., l'arrêt attaqué prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en l'état de ses énonciations, qui ne caractérisent pas en quoi X... aurait usé d'ordres, de menaces ou de contraintes, en abusant de son autorité, en vue d'obtenir d'elle des faveurs sexuelles, la cour d'appel, qui, en outre, n'a pas recherché si les faits poursuivis pouvaient recevoir une autre qualification, n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, en date du 15 janvier 1999, en ses seules dispositions relatives au délit de harcèlement sexuel, au prononcé de la peine et aux réparations civiles accordées à Z..., la déclaration de culpabilité et les réparations civiles relatives au délit d'agression sexuelle commis sur Y... étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-81042
Date de la décision : 31/05/2000
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

AGRESSIONS SEXUELLES - Harcèlement sexuel - Eléments constitutifs - Ordres, menaces, contraintes.

L'usage d'ordres, de menaces ou de contraintes par une personne abusant de son autorité est un élément constitutif du harcèlement sexuel prévu et réprimé par l'article 222-33 du Code pénal, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 1998. Ne justifie pas sa décision la cour d'appel qui ne caractérise pas en quoi le prévenu aurait usé d'ordres, de menaces ou de contraintes, en abusant de son autorité, en vue d'obtenir de la victime des faveurs sexuelles. .


Références :

Code pénal 222-33 (rédaction antérieure)
loi 98-468 du 17 juin 1998)

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers (chambre correctionnelle), 15 janvier 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 mai. 2000, pourvoi n°99-81042, Bull. crim. criminel 2000 N° 208 p. 613
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 208 p. 613

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Caron.
Avocat(s) : Avocat : la SCP de Chaisemartin et Courjon.

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.81042
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