AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / l'AGS de Paris, dont le siège est ...,
2 / l'UNEDIC, association déclarée en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) de Bordeaux, les Bureaux du Parc, ... Lac,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 mars 1998 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), au profit :
1 / de M. Michel Y..., demeurant ...,
2 / de M. X..., pris en sa qualité de mandataire liquidateur du Football club de Pau, demeurant : 64000 Pau,
3 / de la société Sadif, société à responsabilité limitée, domicilié chez Mobi Center international, ...,
défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 mars 2000, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Besson, conseiller référendaire rapporteur, M. Brissier, Mme Lemoine Jeanjean, conseillers, Mme Maunand, M. Liffran, conseillers référendaires, M. Duplat, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Besson, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS et de l'UNEDIC, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Y... a été engagé du 16 août 1994 au 28 mai 1995 par le Football club de Pau, en qualité de joueur de football, en vertu d'un contrat stipulant le paiement d'une rémunération composée d'un salaire mensuel de 8 000 francs et de primes de match, ainsi que le règlement d'une indemnité kilométrique maximale de 42 000 francs ; qu'il se liait à la même date, aux termes d'un protocole d'accord convenu également avec le Football club de Pau, à la société Sadif, laquelle s'engageait pour la période allant du 1er juillet 1994 au 28 mai 1995, moyennant une rémunération mensuelle de 4 500 francs ; que le Football club de Pau a été mis en redressement judiciaire le 22 décembre 1994, puis en liquidation judiciaire, le 7 février 1995 ; qu'ayant constaté l'absence de M. Y... depuis le 1er février 1995, le Football club de Pau l'avertissait le 8 février qu'il serait considéré comme démissionnaire s'il ne se manifestait pas sous huitaine ; que M. Y... faisait alors connaître au club qu'il considérait que son contrat avait été rompu par celui-ci, en raison notamment du non-paiement de ses salaires depuis le mois de janvier 1995, et saisissait la juridiction prud'homale afin de voir juger que la convention passée entre les parties constitue un contrat de travail à durée déterminée, dont la rupture incombe à l'employeur ;
Attendu que l'AGS et l'UNEDIC font grief à l'arrêt attaqué (Pau, 16 mars 1998) d'avoir décidé que le Football club de Pau et M. Y... étaient liés par un contrat de travail à durée déterminée, et d'avoir en conséquence fixé au passif de l'employeur diverses créances résultant de la rupture, et déclaré la décision opposable à l'AGS, alors, selon le moyen, d'une part, que tenu de vérifier si les conditions pour une qualification de contrat de travail à durée déterminée sont remplies, le juge doit rechercher si un joueur de football a été engagé en qualité de professionnel ou si, au contraire, il bénéficiait du statut de joueur promotionnel exclusif d'un contrat conclu dans le secteur du sport professionnel ; qu'en se bornant à relever l'existence d'un lien de subordination, sans rechercher si le salarié avait été engagé en qualité de joueur de football professionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1-1.3 et D. 121-2 du Code du travail ; alors, d'autre part, que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité permanente de l'entreprise ; qu'en s'abstenant de rechercher si le poste de joueur de football sur lequel avait été engagé le salarié correspondait à un emploi par nature temporaire, non lié à l'activité permanente de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1-1-3 et D. 121-2 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir constaté que le contrat liant M. Y... à la société Sadif était fictif, a fait ressortir que les conditions d'engagement de M. Y... par le Football club de Pau, notamment le niveau de sa rémunération qu'il percevait non seulement de ce club mais également de la société Sadif, assimilaient ce joueur à un joueur professionnel, et que l'intéressé, qui avait été engagé par le club pour une saison unique, occupait un emploi par nature temporaire, non lié à l'activité permanente de l'entreprise ; qu'elle a dès lors exactement décidé que les parties étaient liées, en application des articles L. 122-1-1.3 et D. 121-2 du Code du travail, par un contrat de travail à durée déterminée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'AGS et l'UNEDIC aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l'AGS et l'UNEDIC à payer à M. Y... la somme de 12 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille.